Condensation
= D. : Verdichtung. – En. : condensation. – Es. : condensación. – I. : condensazione. – P. : condensação.
● Un des modes essentiels du fonctionnement des processus inconscients : une représentation unique représente à elle seule plusieurs chaînes associatives à l'intersection desquelles elle se trouve. Du point de vue économique, elle est alors investie des énergies qui, attachées à ces différentes chaînes, s’additionnent sur elle.
On voit la condensation à l’œuvre dans le symptôme et, d’une façon générale, dans les diverses formations de l’inconscient. C’est dans le rêve qu’elle a été le mieux mise en évidence.
Elle s’y traduit par le fait que le récit manifeste, comparé au contenu latent, est laconique : il en constitue une traduction abrégée. La condensation ne doit pas pour autant être assimilée à un résumé : si chaque élément manifeste est déterminé par plusieurs significations latentes, inversement chacune de celles-ci peut se retrouver en plusieurs éléments ; d’autre part, l’élément manifeste ne représente pas sous un même rapport chacune des significations dont il dérive, de sorte qu’il ne les subsume pas comme le ferait un concept.
◼ La condensation a d’abord été décrite par Freud dans L’interprétation du rêve (Die Traumdeutung, 1900) comme un des mécanismes fondamentaux par lesquels s’accomplit le « travail du rêve* ». Elle peut s’effectuer par différents moyens : un élément (thème, personne, etc.) est seul conservé parce qu’il est présent plusieurs fois dans différentes pensées du rêve (« point nodal ») ; divers éléments peuvent être rassemblés en une unité disparate (personnage composite par exemple) ; ou encore la condensation de plusieurs images peut aboutir à estomper les traits qui ne coïncident pas, pour maintenir et ne renforcer que le ou les traits communs (1).
Analysé sur le rêve, le mécanisme de condensation n’est pas spécifique de celui-ci. Dans Psychopathologie de la vie quotidienne (Zur Psychopathologie des Alltagslestebens, 1901) et Le mot d’esprit et ses rapports avec l’inconscient (Der Wilz und seine Beziehung zum Unbeslewussten, 1905), Freud établit que la condensation est un des éléments essentiels de la technique du trait d’esprit, du lapsus, de l’oubli des mots, etc. ; dans L’interprétation du rêve, il note que le processus de condensation est particulièrement sensible quand il atteint les mots (néologismes).
Comment rendre compte de la condensation ? On peut y voir un effet de la censure et un moyen d’y échapper. Si, comme Freud l’a noté, on n’a pas l’impression qu’elle soit un effet de la censure, « la censure y trouve son compte quand même » (2) ; en effet la condensation complique la lecture du récit manifeste.
Mais si le rêve procède par condensation, ce n’est pas seulement pour déjouer la censure : la condensation est une caractéristique de la pensée inconsciente. Dans le processus primaire, sont réalisées les conditions – énergie libre*, non liée ; tendance à l’identité de perception* – qui permettent et favorisent la condensation. Le désir inconscient y sera donc soumis d’emblée, tandis que les pensées préconscientes, « attirées dans l’inconscient », le seront secondairement à l’action de la censure. Peut-on situer à quel stade s’accomplit la condensation ? « On doit probablement la considérer comme un processus qui s’étend sur l’ensemble du parcours jusqu’à l’arrivée dans la région des perceptions mais en général on se contentera de supposer qu’elle résulte d’une action simultanée de toutes les forces qui interviennent dans la formation du rêve » (3).
Comme le déplacement*, la condensation est pour Freud un processus qui trouve son fondement dans l’hypothèse économique ; sur la représentation-carrefour, viennent s’additionner les énergies qui ont été déplacées le long des différentes chaînes associatives. Si certaines images, notamment dans le rêve, acquièrent une vivacité toute particulière, c’est dans la mesure où, produits de la condensation, elles se trouvent fortement investies.
(1) Cf. Freud (S.). G.W., V, 299-300 ; S.E., IV, 293-5 ; Fr., 220-2.
(2) Freud (S.). Vorlesungen zur Einführung in die Psychoanalyse, 1916-17. G.W., XI, 176 ; S.E., XV, 173 ; Fr., 191.
(3) Freud (S.). Der Witz und seine Beziehung zum Unbeuiussten, 1905. G.W., V, 187-8 ; S.E., VIII, 164 ; Fr., 191.