Deux types de névrose de guerre (hystérie)1

Il n’est nullement dans mes intentions d’exprimer des opinions définitives sur l’important problème des névroses de guerre après un temps d’étude relativement si court. Cela fait deux mois seulement que j’ai pris la direction du service de neurologie de l’hôpital. Deux cents cas environ étaient soumis à mon observation. Le nombre de cas était trop grand, le temps pour les étudier trop court. La psychanalyse nous a appris que ce n’est pas tant l’exploitation statistique d’un grand nombre de cas que l’investigation approfondie de cas individuels qui peut conduire à des progrès dans la théorie des névroses. Ces communications sont donc à considérer comme des travaux préliminaires dont le seul but est de refléter les impressions qu’un psychanalyste peut retirer de l’observation massive des névroses de guerre.

Ma première impression en pénétrant dans la salle d’hôpital entièrement occupée par des névrosés de guerre fut un profond étonnement que vous partagerez sans doute lorsque vous aurez jeté un coup d’œil sur ce groupe de malades qui sont là devant vous, assis, debout ou couchés. Il y a là environ cinquante patients qui presque tous donnent l’impression d’être gravement atteints ou, même, invalides. Certains sont incapables de se déplacer, chez la plupart la moindre tentative de déplacement provoque un tremblement si violent des genoux et des pieds que ma voix couvre difficilement le bruit des semelles frappant le sol.

Comme je l’ai dit, dans la plupart des cas ce sont les jambes qui tremblent, cependant il y en a d’autres où — comme vous pouvez le constater — la moindre velléité de mouvement de la musculature tout entière s’accompagne de tremblements. C’est la démarche de ces trembleurs qui frappe le plus ; elle donne l’impression d’une parésie spasmodique ; cependant les différentes combinaisons de tremblement, de raideur et de faiblesse produisent des types de démarche tout à fait particuliers que seul le cinématographe pourrait éventuellement reproduire. La plupart des patients racontent qu’ils sont tombés malades à la suite de l’explosion d’un obus tout près d’eux ; une forte minorité explique sa maladie par un refroidissement brutal et violent (immersion dans l’eau glacée, station en plein air dans des vêtements trempés), les autres évoquent divers accidents ou bien sont soi-disant tombés malades du seul fait de l’effort excessif fourni sur le champ de bataille. Les victimes des explosions d’obus parlent d’un « souffle » qui les a renversées, d’autres ont été en partie ensevelies par les masses de terre soulevées par la déflagration.

La correspondance qui existe chez un grand nombre de malades entre les symptômes et les causes pathogènes pourrait justifier ici l’hypothèse d’une affection organique du cerveau ou de la moelle épinière. Moi-même j’ai d’abord eu l’impression que cette étrange symptomatologie, ignorée jusqu’ici par la pathologie, pourrait résulter de quelque altération organique du système nerveux central ; il s’agit de paralysie et d’excitation centrales, qui n’ont pu être observées auparavant, du fait que les chocs subis par les soldats pendant cette guerre étaient inconnus en temps de paix. Je m’en suis longtemps tenu à cette hypothèse, même lorsque l’examen des cas individuels m’eut convaincu qu’on ne retrouvait jamais ici les symptômes qui sont pourtant constants dans les lésions centrales organiques, en particulier les signes d’une lésion du faisceau pyramidal [réflexe rotulien spasmodique, signe de Babinski, clonus du pied2]. Mais j’ai dû admettre par la suite que l’absence de ces symptômes caractéristiques et d’autre part le tableau d’ensemble de chaque cas individuel, plus particulièrement la présence de troubles de l’innervation inhabituels et extrêmement variés, constituaient de solides arguments contre la thèse de l’altération organique, ou même seulement « moléculaire » ou « micro-organique », du tissu nerveux.

L’impression d’étrangeté et d’inconnu ne s’est dissipée qu’après avoir procédé à un examen plus approfondi d’un petit groupe de malades dont la maladie semblait n’avoir atteint que certaines parties du corps et non le corps tout entier. Seule la compréhension de ces cas monosymptomatiques a permis la classification nosologique correcte de ce groupe morbide.

Voici deux malades. Tous deux présentent — outre le trouble caractéristique de la marche (que je ne décrirai pas ici) — un symptôme frappant : un oscillement permanent de la tête dû à une contraction rythmique alternante des muscles du cou. Le bras droit d’un troisième malade est immobilisé par une contracture de l'articulation du coude à angle obtus ; tout mouvement actif de ce membre paraît impossible, tout essai de mobilisation active ou passive déclenche un tremblement violent de la musculature du bras et une accélération simultanée du pouls. La sensibilité à la douleur de ce bras est diminuée, la main est cyanosée. La musculature de la face et celle des membres inférieurs ne présentent aucune trace de parésie. Lorsque le patient fait un très gros effort, il est capable, malgré un violent tremblement, de modifier légèrement sa position rigide. Cet autre malade ressemble au précédent, seulement son bras droit est contracté à angle aigu au niveau du coude et l'avant-bras serré spasmodiquement contre la cage thoracique. Le symptôme d’un autre malade se localise dans la région scapulaire. Il remonte son épaule droite d'une façon permanente et vous constaterez également des contractions rappelant les tics.

Voici un malade qui reste assis, parfaitement calme ; si nous l’invitons à se lever, de violentes contractions cloniques apparaissent à la jambe gauche — et à sa jambe gauche seulement. Lorsque nous faisons déshabiller le malade, l’unique symptôme apparent est une contracture permanente de la musculature de la jambe gauche, une sorte de crampe fixe. Le tremblement clonique n’apparaît que lors des tentatives de mobilisation active ou passive de la position en pied équin, mais ce tremblement n’a pas le caractère d’un clonus du pied typique et les autres signes de lésion du faisceau pyramidal manquent également. Cette contracture s’est prolongée pendant plusieurs semaines et n’a jamais disparu à l’état de veille. Cet autre malade présente une contracture et un tremblement de ses deux membres droits, la moitié gauche du corps est indemne.

Une anamnèse plus précise et les rapports qui apparaissent entre les données d’anamnèse et les différents symptômes nous permettent de définir avec certitude ces cas comme « fonctionnels », ou, plus exactement, comme des psychonévroses. Demandons par exemple à cet homme qui présente une contracture du côté gauche de son corps comment il est tombé malade ; il nous racontera qu’un obus a explosé à sa gauche et que le « souffle » l’a atteint à gauche. Si le souffle avait vraiment provoqué une altération organique dans le cerveau de ce soldat, c’est essentiellement l’hémisphère gauche qui aurait été touché (abstraction faite de l’éventualité d’un contrecoup) et les symptômes devraient être beaucoup plus marqués du côté opposé (droit) du corps ; or, ici, le côté droit est parfaitement indemne. Une hypothèse beaucoup plus plausible paraît être qu’il s’agit ici d’un état psychogène, de la fixation traumatique de l’investissement psychique sur un côté du corps, c’est-à-dire d'hystérie.

Cette hypothèse se transforme en certitude lorsque vous étudiez l’anamnèse des cas qui viennent d’être présentés. Le soldat dont le bras droit est contracté à angle obtus a été touché par la déflagration alors qu’il avançait en tenant son arme en position de balance. Or cette position correspond parfaitement à celle que reproduit la contracture. L’autre qui serre l’épaule contre son flanc et tient le coude fixé à angle aigu conserve également la position qu’il avait au moment de l’explosion : il était allongé pour épauler et il devait pour cela serrer le bras contre ses côtes et plier le coude à angle aigu. Dans ces cas il est impossible que la commotion ait provoqué l’apparition de foyers centraux organiques. Il n’est pas concevable que dans un si grand nombre de cas une lésion cérébrale puisse attaquer précisément les centres correspondant aux muscles qui fonctionnaient au moment du traumatisme. Une hypothèse plus vraisemblable serait celle d’une fixation de l'innervation prévalente au moment de la commotion (de l'effroi). Le soldat dont une moitié du corps est contractée prolonge sans doute indéfiniment l’innervation de la moitié du corps la plus menacée — ce que nous pourrions interpréter comme un réflexe de fuite. Les deux autres conservent la position du bras qu’ils avaient immédiatement avant la commotion : la position en balance et celle d’épauler. À l’appui de cette conception je peux citer un fait bien connu de la vie quotidienne, et un autre, un peu moins connu, dans le domaine de la psychanalyse. On peut couramment observer que lorsqu’on est saisi par une peur soudaine « les pieds prennent racine » dans la position même où l’on se trouvait, et que l’innervation alors prévalente dans tout le corps, les bras, les muscles du visage, se prolonge également pendant un certain temps. Les acteurs connaissent bien ce « moyen d’expression » et s’en servent efficacement pour figurer la peur.

Cependant il existe une variété de mouvements expressifs moins connue en tant que telle. Depuis Breuer et Freud nous savons que la nature des phénomènes d’excitation et de paralysie hystériques consiste à proprement parler en la transformation durable, en la conversion d’un affect en une innervation physique. La psychanalyse peut ramener tous ces cas d’« hystérie de conversion » à une ou plusieurs expériences affectives inconscientes et « oubliées » en elles-mêmes (ou, comme nous dirions aujourd’hui, refoulées), mais qui prêtent leur énergie à certains processus physiques associés en pensée à ces événements qui se dressent dans le présent comme les pierres tombales de souvenirs ensevelis dans les profondeurs, immobiles et inaltérables comme un monument. Il n’y a pas lieu ici de nous étendre sur les conditions qui doivent nécessairement s’ajouter au traumatisme psychique décrit pour que se réalise le tableau symptomatique d’une hystérie de conversion (constitution sexuelle) ; il suffit de constater que les cas de névrose de guerre que nous vous présentons doivent être considérés, sur la base des données d’anamnèse, comme des hystéries de conversion dans le sens de Breuer et Freud. Ici aussi le traumatisme est la conséquence d’un affect soudain (la peur) qui ne peut pas être maîtrisé par le psychisme ; les innervations prévalentes au moment du traumatisme, qui persistent sous forme de symptômes morbides, indiquent que la motion affective, en partie non encore liquidée, reste active dans la vie psychique inconsciente. Autrement dit : ces patients ne sont pas encore revenus de leur effroi, même s’ils ne repensent plus du tout consciemment à ce qu’ils ont vécu et sont parfois gais et de bonne humeur comme si leur esprit n’était nullement torturé par d’aussi horribles souvenirs.

Compte tenu des réflexions qui précèdent, je n’ai pas été surpris, et vous ne le serez pas non plus, qu’une anamnèse plus précise nous ait également permis de comprendre les autres cas « monosymptomatiques » présentés ici. Ce soldat dont la jambe gauche présente une contracture permanente raconte qu’il était en Serbie en train de descendre prudemment une pente escarpée et qu’il allongeait sa jambe gauche vers le bas pour chercher un appui lorsque, commotionné par une explosion, il a roulé jusqu’en bas. Donc ici encore le sujet est « resté pétrifié » dans la position qu’il avait juste à ce moment-là. Quant aux deux malades qui ont un tremblement de la tête, l’un raconte qu’au moment critique sa tête avait cogné le mur de l’abri, et l’autre, qu’il avait « rentré la tête entre les épaules » lorsqu’il avait entendu le sifflement caractéristique de l’obus qui approchait. Le patient dont l’épaule gauche tremble sans arrêt a été, au moment de l’explosion, blessé légèrement à la partie de son corps qui actuellement est atteinte de spasmes (la cicatrice est encore visible).

Au début, lorsque les patients me fournissaient ces données d’anamnèse, leur importance dans la formation du symptôme m’échappait tout comme à eux-mêmes et il est donc exclu que j’aie exercé sur eux une suggestion par mes questions. Plus tard, naturellement, j’attirais délibérément l’attention de mes patients sur les circonstances du traumatisme, mais en évitant de leur laisser voir l’importance que j’accordais à leurs réponses.

Je m’attends à ce que cette hypothèse soulève quelques objections de votre part. Vous allez me dire qu’au moment critique le patient n’était pas en mesure d’observer aussi précisément la situation réelle, que ces données d’anamnèse ne sont peut-être que des essais d’explication a posteriori de la part du patient lui-même et que nous nous sommes tout simplement « laissé avoir » par les patients.

Voici ce que je pourrais répondre : il est certain que dans l’instant qui précède la commotion le soldat avait toute sa conscience ; il pouvait donc apercevoir l’approche du danger (c’est confirmé par un grand nombre de personnes qui ne sont pas tombées malades malgré la proximité de l’explosion). Au moment de la commotion elle-même, il a pu perdre connaissance et plus tard une amnésie rétroactive a pu se développer chez lui ; la trace mnésique de la situation qui a précédé la commotion était alors déjà fixée et elle a pu — dans l’inconscient — influencer la formation du symptôme. C’est précisément la crainte d’être trompé par le patient et la méfiance à l’égard de ses dires qui sont la cause de cette totale ignorance qui, il y a peu de temps encore, régnait dans les cercles médicaux pour tout ce qui concerne la psychologie des névroses. C’est seulement depuis que Breuer, et surtout Freud, ont commencé à écouter les névrosés qu’ils ont pu trouver accès au mécanisme secret de leurs symptômes. Même lorsque les patients avaient inventé après coup les détails de la situation traumatique, cette « invention » devait être déterminée par les traces mnésiques de l’événement réel devenues inconscientes.

Seule une analyse en règle pourrait décider si dans les cas qui vous sont présentés ici il y a eu ou non, outre le traumatisme, une quelconque complaisance somatique comme facteur prédisposant. Mais on peut aisément imaginer qu’au moment de la commotion c’est précisément l’innervation active qui joue le rôle de « facteur prédisposant », de « complaisance somatique » et qui explique la fixation de l’excitation affective (reléguée dans l’inconscient du fait même de sa force) aux parties du corps innervées. Ces « déplacements d’affects » sur une innervation corporelle, indifférente mais accessible au moment critique, sont bien connus grâce à la psychanalyse des hystéries de conversion.

Malheureusement je ne suis pas en mesure de confirmer mes remarques par la psychanalyse de ces cas. Aussi devrai-je mécontenter de classer ces névroses de guerre « monosymptomatiques » dans le groupe des hystéries de conversion.

Considérons maintenant le deuxième groupe de malades, beaucoup plus nombreux, qui présentent, comme vous le voyez, un tremblement généralisé et des troubles de la marche. Ici encore, pour comprendre ce tableau clinique, il faut partir du symptôme majeur : le trouble de la marche. Voyez par exemple ce patient tranquillement allongé : dès qu’il essaie de se lever, ses membres inférieurs commencent à trembler, d’abord au niveau des articulations de la cheville et du genou, puis le tremblement s’intensifie progressivement, son amplitude augmente jusqu’à ce que finalement l’équilibre statique du corps soit compromis au point que le malade tombe si on ne le retient pas ; dès qu’il s’assoit ou qu’il s’allonge, le tremblement cesse spontanément. (J’insiste encore une fois sur l’absence totale de tout symptôme organique.) Cet autre malade peut marcher en s’appuyant sur deux cannes, mais sa démarche est incertaine et lorsqu’il avance sa jambe droite nous percevons un bruit double : c’est son talon droit qui à chaque pas frappe le sol par deux fois avant que le malade n’ose s’y appuyer de tout son poids. La démarche de ce troisième est ample et raide, comme celle d’un tabétique ; le quatrième qui se tient près de lui a l’allure d’un ataxique — et pourtant, en position allongée, il n’y a chez eux aucune trace d’ataxie véritable et encore moins d’atteinte de la moelle épinière. Ce qui pourrait le mieux rendre la démarche de ces deux malades c’est le « pas de parade » : ils soulèvent la jambe sans plier le genou puis la laissent retomber avec bruit. Le cas le plus grave, c’est celui de cet autre malade qui lors de ses tentatives de marche passe du tremblement intentionnel au spasme généralisé de toute la musculature, dont le paroxysme s’accompagne de troubles de la conscience.

Ce dernier symptôme nous incite à prêter une plus grande attention aux phénomènes qui accompagnent le trouble de la marche. Chez tous ces malades, sans exception, lorsqu’ils tentent de marcher ou de se tenir debout sans appui, apparaissent des palpitations intenses et une accélération du pouls ; la plupart transpirent abondamment, principalement dans la région axillaire, mais aussi frontale ; ils ont une expression angoissée. — Si nous les observons plus attentivement, nous notons, outre les troubles de la marche, l’existence d’autres symptômes constants : hyperesthésie de la plupart des organes des sens3, le plus souvent de la sensibilité auditive, mais aussi visuelle. L’hyperacousie et la photophobie rendent ces malades très craintifs ; la plupart d’entre eux se plaignent d’un sommeil trop léger, troublé par des cauchemars angoissants et terribles. En général ces rêves répètent les situations dangereuses vécues au front. En outre, presque tous se plaignent d’une inhibition totale ou d’une forte diminution de leur libido et de leur puissance sexuelle.

Avant de se décider pour une classification nosographique de ce syndrome, il nous faut étudier très attentivement l’anamnèse, comme dans les cas « monosymptomatiques ». La plupart des patients affirment qu’ils ont été touchés par le « souffle d’un obus » ; certains ont été recouverts de terre. Ils ont aussitôt perdu connaissance pour se réveiller à l’arrière, dans un poste sanitaire. Ensuite ils sont restés complètement « paralysés » pendant plusieurs jours ou même plusieurs semaines — un ou deux mois pour certains. Le tremblement est apparu dès les premières tentatives de marche alors qu’au lit ils avaient depuis longtemps retrouvé leur faculté de mouvement et qu’apparemment ils ne présentaient plus aucun symptôme de paralysie. Dans certains cas le soldat a continué d’assurer son service après la commotion et ce n’est que plus tard, à l’occasion d’une peur insignifiante, purement psychique, qu’il est tombé malade. Ce volontaire par exemple est parti en patrouille de reconnaissance dans la nuit qui a suivi la commotion ; en chemin, il a trébuché dans un fossé, il a eu peur, et c’est après cet événement seulement que la maladie s’est déclarée. La « sommation des facteurs pathogènes » est plus frappante encore dans ces cas très fréquents où selon l’anamnèse ce n’est pas l’explosion, mais d’autres événements terrifiants ou bien uniquement la somme des efforts et des privations surhumaines et la tension anxieuse permanente, inhérents à la guerre, qui apparaissent comme les causes de la maladie. D’après les renseignements fournis à l’anamnèse on rencontre à peu près avec la même fréquence les commotions par déflagration, les refroidissements soudains ou répétés ou insupportables par leur durée (plongeon dans de l’eau glacée, en particulier en hiver au passage d’une rivière ; pluie, neige lors d’un campement en plein air). Le même jour douze soldats d’un même régiment sont arrivés dans notre hôpital avec ce syndrome d’incapacité de marche que nous avons décrit ; tous sont tombés malades dans la même circonstance, au passage d’une rivière, après plusieurs jours de marche sous la neige et la pluie. Chez eux aussi une « période de paralysie » a précédé l’état actuel ; elle a assez rapidement disparu pour céder la place, dès la première tentative de marche, au syndrome actuel.

Il est inutile de répéter qu’ici aussi j’ai recherché soigneusement, mais sans succès, l’existence éventuelle de symptômes organiques.

En ce qui concerne ces cas de refroidissement, il est fréquent d’entendre dire que l’état du malade était en voie d’amélioration spontanée lorsqu’on entreprit de traiter leurs soi-disant « rhumatismes » par des bains chauds ou qu’on les envoya en convalescence faire une cure thermale dans une ville d’eaux (Trencsén-Teplicz, Pöstyén) où ils faisaient une rechute.

Résumons ce que nous venons de dire : la maladie survient chez les soldats à la suite d’une commotion soudaine ou de traumatismes répétés plus ou moins importants. La perte de connaissance (non constante) est suivie par un stade de paralysie qui disparaît spontanément au bout d’un certain temps pour céder la place à l’état chronique dès la première tentative de marche ou à l’occasion d’un essai thérapeutique. Cet état consiste en divers phénomènes généraux et en un trouble de la marche que rien ne justifie sur le plan organique. Il y a un rapport certain entre les troubles de l’innervation qui surviennent lors des tentatives de marche et les symptômes généraux, dans la mesure où ces derniers sont renforcés ou souvent déclenchés par les troubles de la marche. En outre, il existe certains symptômes constants dont le plus remarquable est l’hyperesthésie de tous les sens.

Cependant nous connaissons en psychanalyse un état où toute tentative du malade pour accomplir certains actes déclenche des phénomènes généraux. C’est l’hystérie d'angoisse selon Freud, qui se caractérise souvent par le fait que les tentatives de déplacement, l’innervation volontaire pour se lever ou marcher, sont liées à une angoisse intense qui contraint le patient à éviter certains mouvements et à transformer tout son mode de vie dans ce sens. Les neurologues connaissent de longue date ces évitements sous le nom de phobies, mais sans les avoir jamais compris. Ils ont donné aux troubles de l’innervation les noms d’astasie (incapacité de se tenir debout) ou d’abasie (incapacité de marcher), et ils ont nommé les évitements précédemment mentionnés sur la base de caractéristiques superficielles (agoraphobie, claustrophobie, topophobie, etc.).

Seule la psychanalyse a fourni une explication de ce curieux tableau clinique. Il est apparu que chez ces malades les effets affectifs de certains traumatismes psychiques, notamment les expériences propres à ébranler leur confiance en eux-mêmes, sont refoulés dans l’inconscient, et, à partir de là, entravent la capacité d’action de ces malades. À toute menace de répétition de l’expérience pathogène ils réagissent par une production d’angoisse ; puis le patient s’habitue peu à peu à éliminer ces états d’angoisse en évitant tout acte qui pourrait conduire d’une façon ou d’une autre à la répétition de la situation pathogène pour lui. L’astasie-abasie n’est que le stade final de ce système d’évitement ; elle empêche toute locomotion en général pour éviter d’autant plus sûrement une certaine situation. Je me bornerai à rappeler ici que toute angoisse névrotique a une racine sexuelle (Freud) et qu’il existe aussi une prédisposition constitutionnelle à la topophobie (Abraham).

En ce qui concerne nos patients, leurs symptômes « généraux » correspondent exactement au syndrome de l’angoisse. Comme je l’ai déjà dit, toute tentative de surmonter l’apparente paralysie pour pouvoir se déplacer peut provoquer chez nos malades des palpitations, une accélération du pouls, de la transpiration, une altération des traits du visage, et même un état voisin de l’inconscience.

Toutefois ce tableau reproduit en tous points cette soudaine irruption de l’angoisse que la vie quotidienne comme l’histoire des patients atteints de névrose d’angoisse nous a rendu familière. Même l’hyperesthésie de tous les sens, mentionnée comme un symptôme constant, et le sommeil troublé de cauchemars correspondent à cette constante « attente angoissée » dont se plaignent les personnes qui souffrent de névrose d’angoisse. Quant aux troubles de la libido et de la puissance sexuelle, nous pouvons les considérer à plus forte raison comme névrotiques.

Ceci dit, je crois qu’il est justifié de considérer toutes les névroses de guerre comme des hystéries d’angoisse et d’interpréter les troubles de la motilité comme une manifestation de phobies ayant pour but d’empêcher l’apparition de l’angoisse. La plupart des cas qui vous sont présentés ici pourraient donc être désignés sous le nom « d’astasie-abasie hystérique » ; quant aux cas particuliers où, comme vous l’avez vu, la position assise est également impossible, le nom d’« anhédrie hystérique » leur conviendrait.

Essayons maintenant de nous représenter comment les chocs révélés par l’anamnèse ont pu produire ces tableaux cliniques. Nous ne pourrons y parvenir que très imparfaitement, puisque, comme nous l’avons dit, nous ne sommes pas en mesure d’effectuer des psychanalyses en règle. Mais le contact quotidien avec les patients et le bref interrogatoire psychanalytique de quelques-uns d’entre eux m’ont tout de même fourni quelques éléments qui permettent de répondre provisoirement à ce problème.

J’ai été frappé par le nombre de ces soldats devenus angoissés qui avaient obtenu de hautes décorations soit pour des services rendus précédemment, soit pour leur conduite héroïque face à l’ennemi. Lorsqu’on leur demandait si autrefois ils étaient d’un tempérament angoissé ils répondaient pour la plupart que ni maintenant ni autrefois ils n’éprouvaient aucune espèce d’angoisse. « Au contraire, disaient certains, j’étais toujours le premier à me proposer pour une mission dangereuse. » Je ne peux pas vous dire grand chose des quelques cas analysés de façon plus approfondie. Un paysan hongrois qui avait perdu son père dans sa toute petite enfance, avait été obligé très jeune à faire les mêmes travaux agricoles que les « grands ». Pour des raisons que l’analyse n’a pas pu élucider il était devenu très ambitieux, voulait tout faire aussi bien que les adultes et prenait très à cœur toute critique de son travail ou, ce qui arrivait souvent, toute moquerie. Plus tard il eut de fréquentes disputes avec les voisins et les gendarmes du village et, à la fin, comme il disait, « il ne craignait plus personne ». Au front il fut commotionné par une explosion et tomba d’une très grande hauteur ; depuis lors il marche en tremblant (et présente également un symptôme de conversion : une crampe du mollet), il est hypersensible, pleure facilement, mais il a aussi parfois des accès de fureur, par exemple en apprenant qu’il doit encore poursuivre son traitement. Un autre malade que j’ai pu interroger plus à fond est un technicien juif hongrois ; à l’école c’était un élève très appliqué qui nourrissait des projets ambitieux (des découvertes, la fortune, etc.) ; autrefois il pratiquait sa religion mais peu à peu il réussit à pouvoir vivre sans dieu ; par ailleurs, il avait l’intention de rompre ses fiançailles conclues six ans auparavant car il estimait qu’une promesse faite lorsqu’il était jeune et insouciant n’avait plus de valeur et que ce mariage nuirait à sa carrière. Il s’engagea comme volontaire pour servir au front et se rappelle fort bien les circonstances dans lesquelles sa maladie débuta. Sa compagnie subissait un violent pilonnage d’artillerie ; lorsqu’il entendit siffler l’obus qui venait vers lui, il se fit le serment que si jamais il en réchappait indemne il épouserait tout de même la jeune fille ; en même temps il murmura une prière hébraïque « Schéma Israël ». L’obus s’abattit près de lui. Après un court moment d’étourdissement il reprit ses sens mais s’aperçut qu’il ne pouvait plus marcher. Il a en effet une curieuse démarche ; il fait de tout petits pas (sans trembler) en s’aidant d’une canne, il a constamment peur de tomber, et prend autant que possible appui sur le mur ou les meubles. À tous égards il est devenu humble et très modeste, il parle d’une voix basse, d’un débit haletant et pressé, son écriture est à peine lisible. Il a plus ou moins renoué le contact avec sa fiancée, mais (depuis qu’il va mieux) il a de nouveau renoncé à la foi.

Les conditions qui peuvent conduire, comme nous venons de le dire, à l’apparition d’une hystérie d’angoisse accompagnée de phobies se manifestent clairement dans ces deux cas. Les deux patients s’estimaient très haut, se surestimaient peut-être. La confrontation à une puissance par trop supérieure, le souffle d’un obus, qui les a jetés à terre comme des fétus de paille, a sévèrement ébranlé leur confiance en eux-mêmes. Ce choc psychique a très bien pu entraîner une régression névrotique, c’est-à-dire le retour à un stade depuis longtemps dépassé (sur le plan onto- et phylogénétique). (Cette régression ne manque jamais dans la symptomatologie des névroses, puisque les phases totalement surmontées en apparence ne perdent jamais complètement leur pouvoir d’attraction et se manifestent toujours dès qu’une occasion propice se présente.) Il semble que le stade auquel ces deux névrosés ont régressé soit le stade infantile de la première année où l’on ne sait pas encore se tenir debout ni marcher correctement. Nous savons qu’il existe dans la phylogenèse un prototype de ce stade, car la marche verticale n’est qu’une conquête assez tardive de nos ancêtres mammifères.

Tous les névrosés de guerre ne présentent pas nécessairement un amour-propre aussi excessif. Un traumatisme suffisamment grand peut tout autant ébranler la confiance en soi d’un homme dit normal et éveiller en lui une angoisse si intense que même la tentative de s’asseoir, de se lever ou de marcher s’accompagne chez lui — comme chez l’enfant qui apprend à marcher — d’un sentiment d’angoisse. L’exclamation naïve d’une infirmière à la visite du matin vint confirmer ma conception : « Docteur, me dit-elle, cet homme marche comme un petit enfant qui apprend à marcher. » À côté de ce trait régressif qui cloue les malades au lit et entrave leur mobilité, la fonction secondaire de la névrose est sans doute toujours présente elle aussi. On peut aisément comprendre que la perspective de retourner aussitôt guéri au front, où tout s’est déjà si mal passé pour eux la première fois, effraye ces malades et retarde — plus ou moins inconsciemment — leur guérison.

Examinons encore quelques-uns des symptômes que nous venons de décrire. Le plus frappant est sans doute le tremblement qui domine le tableau clinique dans la plupart des cas. D’ailleurs les troubles de la marche que nous venons d’étudier sont presque toujours la conséquence d’un clonus des membres inférieurs. Le symptôme du tremblement présente également ce caractère régressif impossible à méconnaître. Un membre susceptible de recevoir différentes innervations et disposant d’une coordination motrice complexe se transforme chez ces névrosés en un appendice corporel secoué d’inutiles tremblements à la moindre velléité de mouvement. Le modèle ontogénétique de ce mode de réaction se trouve dans la toute première enfance et le modèle phylogénétique dans la lointaine série des ancêtres animaux, lorsque l’être vivant réagissait encore aux excitations non par la modification du milieu extérieur (fuite, approche), mais par une transformation de son propre corps. — Je crois donc que ce tremblement « névrotique » relève d’un trouble d’innervation identique à celui que nous connaissons dans la vie courante : c’est un tremblement d’angoisse — ou plutôt de peur. Toute innervation musculaire peut être freinée ou empêchée par l’innervation inhibitrice des antagonistes. Lorsque les muscles agonistes et antagonistes sont innervés simultanément il se produit une raideur spasmodique ; lorsque leur innervation alterne rythmiquement il en résulte un tremblement du membre innervé. Nos cas reproduisent toutes les combinaisons possibles de spasmes et de tremblements. C’est ainsi que se réalise ce trouble spécifique de la marche qui consiste en une impossibilité totale à se déplacer en dépit de tout effort et que l’expression : « piétiner sur place »4 caractériserait le mieux. Ce trouble de la coordination devient en même temps un dispositif de défense qui empêche le malade de revivre l’angoisse. Notons ici que dans les astasies et abasies habituelles de notre pratique en temps de paix cette combinaison du trouble de la marche et du tremblement fait la plupart du temps défaut. Les états topophobiques sont alors provoqués uniquement par de la faiblesse, des sensations de vertige, etc.

Un autre symptôme remarquable et constant des névroses de guerre est l’hyperesthésie plus ou moins marquée de tous les sens : la photophobie, l’hyperacousie et l’angoisse liée au contact passif. Ce dernier symptôme n’est généralement pas attribué à l’hyperesthésie cutanée ; la sensibilité cutanée peut être diminuée ou même supprimée ; il s’agit ici d’une simple exagération de la réaction de défense contre le contact. Nous tenterons d’expliquer ce symptôme par l’hypothèse de Freud que voici : lorsqu’une personne est préparée à un choc, à un danger imminent, l’investissement d’attention mobilisée pendant l’attente est capable de localiser l’excitation produite par le choc et peut empêcher l’apparition d’effets à distance comme ceux que nous observons dans les névroses traumatiques. L’autre possibilité de localisation des effets du choc est — selon Freud — une lésion grave et réelle du corps au moment du traumatisme, qui soit à la mesure du choc psychique. Dans les cas d'hystérie d’angoisse que vous voyez ici, rien de semblable ne s’est produit ; il y a eu un choc brutal, la plupart du temps inattendu, sans lésion organique grave. Même dans les cas où l’approche du danger a été perçue, l’attention mobilisée pendant l’attente n’a pas été proportionnelle à l’intensité réelle de l’excitation produite par le choc et elle n’a pas pu empêcher l’écoulement de l’excitation par des voies anormales. Il est d’ailleurs probable que la conscience exclut automatiquement ces excitations trop intenses. Nous pouvons supposer qu’il se produit après le traumatisme un certain déséquilibre entre la conscience plus ou moins épargnée par le choc et les autres parties de l’appareil neuro-psychique. L’ajustement ne peut se faire que si la conscience prend sa part des excitations déplaisantes ; c’est justement le rôle d’un certain dispositif « traumatophile » : l’hyperesthésie des organes des sens, qui transmet à la conscience, progressivement et par petites doses, la quantité d’attente angoissée et de choc que le patient avait tenté d’économiser au moment du choc. Suivant la conception de Freud, nous devons donc considérer que les petits traumatismes à répétition, le sursaut au moindre bruit ou éclair de lumière, sont une tendance à la guérison, une tendance de l’organisme à rétablir l’équilibre perturbé de la répartition de la tension.

Freud explique de la même façon les cauchemars des névrosés traumatiques qui revivent constamment en rêve l’accident qu’ils ont vécu autrefois. Ici le psychisme ne compte sur aucune excitation externe pour y réagir de façon excessive, mais se crée lui-même la représentation propre à lui faire peur. Donc même ce symptôme pénible sert la tendance à la guérison.

Comme exemple frappant de l’hyperesthésie « traumatophile », voici le cas de cet homme commotionné par l’explosion d’un obus et dont toute la musculature — comme nous le voyons — est dans un état d’agitation permanente, incapable d’effectuer aucun mouvement volontaire. Ses yeux sont tellement sensibles qu’il les garde constamment levés pour éviter la lumière du jour ; à de courts intervalles, une ou deux fois par seconde, il tourne son regard vers le côté pour apercevoir rapidement l’image de ce qui l’entoure ; sinon ses pupilles se dissimulent sous ses paupières supérieures qui battent d’un mouvement rapide. Son hyperacousie est plus marquée encore, si possible, et rappelle l’hypersensibilité auditive des personnes atteintes de la rage. Les bruits de la journée l’empêchent de rester dans la salle commune et nous avons dû l’installer dans la chambre de l’infirmier pour qu’il puisse dormir. À notre surprise le patient a réclamé aussitôt de passer la nuit dans la salle commune. Interrogé sur les raisons de sa demande, il a répondu textuellement : « C’est vrai que dans la salle commune je suis très souvent réveillé en sursaut la nuit, mais dormir seul est encore pire ; dans ce grand silence je ne peux pas m’endormir, car je dois faire un constant effort d'attention pour écouter si vraiment il n’y a aucun bruit. » Ce cas vient confirmer ce que nous avons exposé plus haut : la répétition de l’affect de peur et l’hyperesthésie des organes des sens sont des phénomènes que les névrosés traumatiques recherchent ou maintiennent involontairement eux-mêmes car ils favorisent leur effort de guérison.

Ce comportement des névrosés traumatiques, malgré son caractère tragique, rappelle celui de ce pensionnaire d’hôtel tiré de son plus profond sommeil par le bruit d’une chaussure que son voisin de chambre lance contre la porte en se déshabillant, et qui, après avoir tenté en vain de se rendormir supplie le voisin agité de bien vouloir lancer aussi sa deuxième chaussure contre la porte pour qu’il puisse enfin trouver le sommeil. C’est également le comportement de certaines personnes, décrit en premier par Abraham, qui ont subi une agression sexuelle dans leur enfance et qui plus tard ont la compulsion de s’exposer à nouveau à des aventures du même genre ; je pense qu’ils cherchent à maîtriser par cette expérience consciente ultérieure l’expérience primitive, à l’origine inconsciente et incompréhensible.

Il n’est pas impossible que l’on puisse expliquer certains résultats que des neurologues ont obtenus dans le traitement des névrosés de guerre avec des courants électriques douloureux, entre autres par le fait que ces douleurs satisfont la traumatophilie inconsciente des patients.

La théorie de Freud selon laquelle il s’agit dans les névroses non d’un déséquilibre des énergies dans le sens banal mais d’un trouble spécifique des énergies libidinales, est rejetée par un grand nombre de contradicteurs, qui lui opposent que même un traumatisme ordinaire « qui indiscutablement ne provoque pas de troubles sexuels », peut entraîner des névroses. Cependant nous voyons qu’une déflagration, qui n’est certainement pas un choc sexuel par lui-même, provoque souvent la perte de la libido sexuelle et l’impuissance sexuelle. Il n’est donc nullement exclu que les chocs ordinaires puissent également conduire à la névrose par la voie d’un trouble sexuel. L’impuissance, ce symptôme apparemment très secondaire de la névrose traumatique, peut prendre de l’importance si l’on étudie de plus près la pathologie de cet état. Nous, psychanalystes, nous pouvons considérer comme une explication préliminaire l’hypothèse que dans ces traumatismes il s’agit d’une lésion du Moi, d’une blessure de l'amour-propre, du narcissisme, dont la conséquence naturelle est le retrait des « investissements objectaux de la libido », autrement dit la disparition de la capacité d’aimer un autre que soi-même5.

Je ne crois pas avoir suscité en vous l’espoir d’obtenir de moi une explication complète des processus psycho-pathologiques des névroses traumatiques ou des névroses de guerre. J’ai atteint mon but si j’ai réussi à vous montrer que les tableaux cliniques que je vous ai présentés appartiennent effectivement aux deux groupes morbides que la psychanalyse désigne par les noms d’hystérie d’angoisse et d’hystérie de conversion. Je ne suis pas non plus en mesure de vous expliquer en détail pourquoi dans un cas il se développe de l'angoisse, dans un autre une conversion, dans un troisième une combinaison des deux. Mais j’ai peut-être pu montrer que pour ces névroses également la recherche psychanalytique indique une fois encore au moins la voie qui pourrait mener à une explication, tandis que le reste de la neurologie s’épuise à décrire les maladies et à créer une nomenclature vide de sens.


1 Rédigé d’après une conférence tenue à la réunion scientifique des médecins de l’hôpital militaire Maria-Valéria.

2 J’ai volontairement éliminé les cas dont le tableau clinique était compliqué par des symptômes organiques centraux.

3 L’hyperesthésie cutanée est souvent si intense que la recherche du réflexe rotulien déclenche de violents mouvements de défense.

4 En français dans le texte.

5 Voir à ce sujet mon article : « La psychanalyse des névroses de guerre ». O. C., tome III.