2009-04-16T11:32:02.64PT4H17M35S15LibreOffice/5.0.5.2$Linux_X86_64 LibreOffice_project/00m0$Build-22015-08-16T18:13:01Sandor Ferenczi Psychanalyse III Œuvres complètes Tome III : 1919-1926
Traduction de J. Dupont et M. Viliker
1974, Editions Payot pour l'édition en langue française.
1924PsychanalyseThalassa, essai sur la théorie de la génitalité
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C. Appendice
58
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Sándor Ferenczi
Thalassa
essai sur la théorie de la génitalité1
Précédemment paru dans la « Petite Bibliothèque Payot » sous le titre : Thalassa, psychanalyse des origines de la vie sexuelle, avec une préface de Nicolas Abraham (N. d. T.).
Table des matières
Table des matières
Introduction3
A. Partie ontogénétique8
1. L'amphimixie des érotismes dans le processus d’éjaculation.8
2. Le coït, comme processus amphimictique19
3. Le développement du sens de réalité érotique et ses stades24
4. Interprétation des divers processus de l'acte sexuel32
5. La fonction génitale individuelle41
B. Partie phylogénétique50
6. Le parallèle phylogénétique50
7. Données relatives à la « régression thalassale »57
C. Appendice79
9. Coït et sommeil79
10. Conclusions bioanalytiques88
Introduction
À l’automne 1914, le service militaire obligea l’auteur de cet article à abandonner son activité de psychanalyste et à s’exiler dans une petite ville de garnison où sa tâche de médecin-chef d’un escadron de hussards n’était guère de nature à satisfaire sa soif de travail, devenu une véritable habitude. Ainsi en vint-il à consacrer ses heures de liberté à traduire en hongrois les Trois essais sur la théorie de la sexualité, ce qui l’amena presque inévitablement à élaborer plus avant certaines idées surgies au cours de ce travail, puis à les jeter brièvement sur le papier. Toutes ces idées tournaient autour d’une explication plus poussée de la fonction d’accouplement qui, dans les Trois essais, est présentée par Freud comme étant la phase terminale de toute l’évolution sexuelle mais sans que le processus d’évolution lui-même soit étudié dans les détails. Ces idées se sont peu à peu cristallisées en une théorie ontogénétique et phylogénétique que j’eus l’occasion d’exposer au Professeur Freud en 1915, lors d’une visite qu’il me fit à mon cantonnement militaire (à Pàpa). Plus tard, en 1919, je répétai cet exposé devant lui et quelques amis, et les deux fois je fus vivement encouragé à publier ce travail. Si j’ai mis si longtemps à m’y décider, cela s’explique, outre la résistance intérieure suscitée par la nature même du sujet, par un certain nombre de raisons objectives. Mes connaissances en sciences naturelles ne dépassaient guère celles d’un médecin qui, même s’il avait autrefois étudié la biologie avec prédilection et application, ne s’en était plus occupé sérieusement depuis près de vingt ans. Cependant ma théorie mettait en cause des faits biologiques essentiels et très controversés. Je n’avais à ma disposition que le remarquable ouvrage de zoologie de Hesse et Dolflein, ainsi que des livres de Lamarck, Darwin, Haeckel, Bölsche, Lloyd Morgan, Godlewsky, H. Hertwig, Piéron et Trömner, un seul ouvrage de chacun de ces auteurs ; tandis que la plupart des recherches biologiques modernes, en particulier celles traitant des mécanismes de l’évolution, m'étaient inaccessibles2
Pour des raisons analogues je dus limiter mon étude des fonctions sexuelles aux vertébrés, en écartant l’examen pourtant passionnant de l’accouplement chez les insectes. Il m’a également été impossible d’inclure dans ce travail la sexualité des plantes..
Au cours de mes spéculations relatives à la théorie de la génitalité, j’ai hardiment pris le parti d'appliquer aux animaux, organes, parties d’organes, éléments tissulaires, certains processus dont j’ai pu prendre connaissance par la psychanalyse. Cette transposition m’a permis de voir les choses sous un angle nouveau, mais je me suis ainsi rendu coupable du crime de psychomorphisme, abus méthodologique qui gênait ma conscience scientifique. Par ailleurs cette démarche m'a amené à faire usage d’observations faites sur des animaux, de données embryologiques, etc., pour arriver à expliquer certains états psychiques tels que ceux qui accompagnent le coït, le sommeil, etc. Selon mes convictions d’alors, ce procédé était lui aussi inadmissible ; j’avais appris dès l’école à considérer comme un principe fondamental de tout travail scientifique la séparation rigoureuse entre les points de vue propres aux sciences naturelles et ceux appartenant aux sciences de l’esprit. L’inobservance de ces règles au cours de mes spéculations était une des raisons qui me retenaient de publier ma théorie de la génitalité.
Pendant que j’étais plongé dans l’étude des Trois essais de Freud, un fait m’impressionna vivement : Freud parvenait à tirer parti d’expériences rassemblées au cours de traitements de psychonévrosés, donc provenant du domaine psychique, pour bâtir sur des bases entièrement nouvelles un chapitre important de la biologie, la théorie du développement sexuel. Dans ma préface à l’édition hongroise j’ai déjà rendu hommage à cette méthode que je considère comme un progrès important dans le domaine de la méthodologie scientifique : c’est un retour à l’animisme, mais un animisme qui ne serait plus anthropomorphe3
Psychanalyse II, p. 177, Payot..
Peu à peu j’acquis la conviction que l’introduction en psychologie de notions prises dans le domaine de la biologie et de notions de psychologie dans les sciences naturelles est inévitable et peut être extrêmement féconde. Tant qu’on s’en tient à des descriptions, on peut se contenter de reconstituer avec exactitude les différentes phases d’un processus et il est donc très facile de rester dans les limites de son domaine scientifique particulier. Mais dès qu’il ne s’agit plus simplement de décrire mais de dégager la signification d’un processus, on recherche involontairement des analogies dans des domaines scientifiques étrangers. Le physicien, pour nous faire comprendre les phénomènes relevant de sa science, est obligé de les comparer à des « forces », des « attractions », des « pulsions », des « résistances », de l'« inertie », etc... toutes choses dont nous avons connaissance seulement par le côté psychique. Toutefois Freud s’est trouvé lui aussi dans l’obligation de ramener le fonctionnement psychique à des processus topiques, dynamiques, économiques, donc à des processus purement physiques, sinon il n’aurait pas été en mesure de les expliquer entièrement. J’ai fini par admettre qu’il n’y avait pas de honte à ces analogies réciproques et que nous pouvions délibérément mettre en œuvre une application intensive de cette méthode, en la considérant comme une démarche inéluctable et extrêmement bénéfique. Aussi, dans mes travaux ultérieurs, je n’ai plus hésité à préconiser ce mode de travail que j’ai qualifié d’« utraquistique » ; et j’ai exprimé l’espoir que ce moyen permettrait à la science d’apporter les réponses à certaines questions qui, jusqu’à présent, l’avaient laissée impuissante.
Cependant une fois admis le droit de faire usage de ces analogies tant méprisées jusqu’ici, il est bien évident qu’il conviendra d’aller les chercher dans des domaines aussi éloignés que possible. Des analogies prises dans des domaines voisins apparaîtraient comme de simples tautologies et, comme telles, n’auraient aucune force de conviction. Dans les énoncés scientifiques, qui se proposent d’être des vérités synthétiques plutôt qu’analytiques, le sujet ne doit pas se répéter dans le prédicat ; c’est la loi fondamentale bien connue de toute définition. Autrement dit, pour prendre une comparaison, on mesure généralement les substances avec des substances de nature différente. Ainsi nous sommes involontairement amenés à mesurer la matière par l’immatériel, et réciproquement.
La formulation la plus concise de ce que nous venons d’établir consisterait à dire que tout phénomène physique et physiologique requiert aussi finalement une explication métaphysique (ou psychologique) et que tout phénomène psychologique demande une explication métapsychologique (donc physique).
La connaissance de ces faits m’a donné du courage et comme les résultats obtenus grâce à cette méthode ont trouvé une confirmation inattendue dans les travaux que d’autres chercheurs4
Dans l’édition allemande, Ferenczi mentionne nommément Rank. (N. d. T.). ont effectués dans de tout autres directions, j’ai décidé de les porter à la connaissance du public.
Kiobenstein am Ritten, août 1923.
Ce qui précède, constituait la préface de l’édition allemande, parue en 1924, tome XV de la Internationale Psychoanalytische Bibliothek. Je dois la traduction hongroise de ce texte à mon excellente élève Vilma Kovàcs. Ma gratitude va également à un autre de mes élèves, Michael Balint, qui a revu ce livre avec l’optique d’un biologiste moderne et a attiré mon attention sur quelques erreurs qui s’étaient glissées dans le texte original.
Budapest, 19285
Cette note figure dans la traduction hongroise, revue et corrigée par l’auteur, qui peut donc être considérée comme la version définitive de ce travail. C’est donc la version hongroise qui est traduite ici (N. d. T.)..
A. Partie ontogénétique
1. L'amphimixie des érotismes dans le processus d’éjaculation6
Un extrait des deux premiers chapitres a fait l’objet d’une communication au VIIème Congrès International de Psychanalyse de Berlin, en septembre 1922..
C’est à la psychanalyse qu’est revenue la tâche d’exhumer les problèmes de la sexualité qui moisissaient depuis des siècles dans l’armoire à poisons de la science. L’ordre même dans lequel les problèmes ont été sélectionnés paraît répondre à une certaine nécessité. Même les personnes professant la plus grande liberté de pensée, lorsqu’elles donnent des explications à un enfant, achoppent sur la question : comment le fœtus arrive-t-il à l’intérieur de la mère ? De même les préoccupations analytiques ont porté davantage et plus profondément, d’une part sur la grossesse et l’accouchement, d’autre part sur les actes préparatoires au coït et les perversions, plutôt que sur l’explication et la signification des processus du coït lui-même. Je dois avouer ici que les idées que je m’apprête à publier gisent, du moins dans leurs grandes lignes, depuis plus de neuf ans au fond d’un tiroir. Je soupçonne que mes hésitations à les publier (ou, si on veut, à en accoucher) ne proviennent pas seulement de raisons extérieures objectives, mais également de mes propres résistances.
Ce sont des observations faites au cours de l’analyse de cas d’impuissance masculine qui ont servi de base à mes réflexions. Ce fait même paraissait d’emblée prometteur ; nous savons à quel point il est fréquent qu’une déformation pathologique, en exagérant tel ou tel élément souvent présent à l’état latent dans le processus physiologique ou psychologique normal, nous permette de comprendre ce processus normal. Abraham, cet explorateur zélé des organisations dites « prégénitales », a ramené l’éjaculation précoce à un lien trop étroit entre la génitalité et l’érotisme urétral. Les individus atteints de cette affection traitent leur sperme avec autant de légèreté que s’il s’agissait d’urine, c’est-à-dire d’un déchet de l’organisme dépourvu de valeur. Je peux compléter ces observations par d’autres cas où, au contraire, les malades se montraient exagérément économes de leur sperme et ne souffraient par conséquent que d’une sorte d’impuissance à éjaculer. Autrement dit, seule l'expulsion du sperme leur était impossible, ils conservaient intacte leur capacité d’érection et d’intromission. Dans les fantasmes inconscients et parfois même conscients de ces malades, l’identification du processus du coït à la défécation joue un rôle primordial (identification du vagin aux cabinets, du sperme au contenu intestinal, etc.). Souvent ces malades ont déplacé sur l’acte sexuel l’entêtement et l’obstination que dans leur enfance ils avaient manifestés à l’encontre de certaines règles imposées par la civilisation à leur activité excrétoire ; ils sont impuissants quand c’est la femme qui désire le rapport ; l’érection ne se produit que dans les cas où l’acte, pour une raison quelconque, est défendu ou malaisé (comme par exemple pendant la période menstruelle). Si au cours du coït la femme les trouble par quoi que ce soit, ils se livrent à des explosions de haine et de rage, ou bien ils cessent brusquement d’éprouver du désir. On peut donc aisément supposer que l’organisation anale de ces patients présente avec l’acte sexuel le même rapport étroit que l’urétralité, selon Abraham, chez les sujets souffrant d’éjaculation précoce. Autrement dit, nous avons été amené à supposer que l’impuissance masculine présentait également une technique anale particulière.
J’avais déjà remarqué qu’il n’était pas rare de constater l’existence de troubles mineurs de l’acte sexuel associés de cette même façon au fonctionnement anal. Beaucoup d’hommes éprouvent le besoin de déféquer avant le coït ; de graves troubles digestifs d’origine nerveuse peuvent disparaître lorsque les inhibitions psychiques de la sexualité sont levées par l’analyse. On connaît bien également la constipation opiniâtre qui résulte souvent d’une masturbation excessive avec gaspillage de sperme. Parmi les « régressions caractérielles » que j’ai décrites ailleurs, il y a lieu de mentionner ici le cas de ces hommes qui, par ailleurs généreux, se montrent mesquins et même véritablement avares précisément quand il s’agit de donner de l’argent à leur épouse.
Pour éviter tout malentendu, je tiens à signaler que le traitement psychanalytique des impuissances aussi bien de type anal que de type urétral n’a pas rendu nécessaire de pousser aussi loin les recherches dans le domaine biologique pour trouver les causes psychiques de la maladie, mais comme pour toutes les névroses de transfert, il convenait de les chercher dans le complexe d’Œdipe et le complexe de castration qui s’y rattache. La distinction des impuissances en type anal et type urétral n’est apparue que comme un produit secondaire de la spéculation, qui devait nous montrer les voies suivant lesquelles un mobile psychique sous-jacent contraint le symptôme à se manifester sur un mode régressif. Notons encore que les deux modes d’impuissance ne s'observent pratiquement jamais isolément. Dans la pratique on constate plus souvent qu’un individu souffrant d’éjaculation précoce, c’est-à-dire d’impuissance de caractère urétral, acquiert en cours d’analyse la faculté d’érection et d’intromission, mais perd en même temps provisoirement sa capacité d’éjaculation, c’est-à-dire devient aspermatique. Chez ces patients l’urétralité du début se transforme en analité au cours de la cure. Il en résulte un apparent accroissement de la puissance, mais dont seule la femme profite. Pour équilibrer en quelque sorte ces deux modes opposés d’innervation et amener le rétablissement total de la puissance, il convient de poursuivre l’analyse jusqu'à son terme.
Ces observations me conduisent à envisager l’hypothèse que la coopération efficace des innervations anale et urétrale est indispensable à l'instauration d'un processus d'éjaculation normal. S'il est impossible en règle générale d'isoler ces deux types d'innervation, c'est parce qu'ils se recouvrent ou se masquent mutuellement, alors que dans l’éjaculation précoce se manifeste seule la composante urétrale, et dans l'éjaculation retardée, seule la composante anale.
Une simple réflexion sur le déroulement de l’acte sexuel depuis l’intromission du pénis jusqu’à l’éjaculation semble étayer cette hypothèse. La phase finale du coït, l’éjaculation du sperme, est indiscutablement un processus urétral ; non seulement le canal d’écoulement est commun avec l’urine, mais dans les deux cas c’est une forte pression qui provoque l’expulsion du liquide. Par contre, pendant la friction, il semble que ce soient des influences inhibitrices, très probablement d’origine sphinctérienne, qui se manifestent, et leur accroissement excessif et malencontreux peut entraîner l’absence totale d’éjaculation. Mais tout porte à penser que la tendance urétrale (ou éjaculatrice) est présente dès le début, pendant toute la période de friction, et qu’il y a donc une lutte permanente entre la tendance à l’évacuation et la tendance à la rétention, lutte où la tendance urétrale finit par l’emporter. Cette double direction de l’innervation se manifeste peut-être également dans le mouvement de va-et-vient de la friction, où la pénétration correspondrait à la tendance éjaculatrice et le retrait à l’inhibition chaque fois répétée. Naturellement il faut également prendre en considération l’accroissement d’excitation au cours de la friction prolongée et supposer que c’est le dépassement d’un certain seuil d’excitation qui permet finalement de surmonter le spasme sphinctérien.
Cette hypothèse suppose l’existence d’une collaboration complexe et finement harmonisée ; sa perturbation pourrait être à l’origine de ces troubles ataxiques et dyspraxiques que nous désignons par les termes d’éjaculation précoce et d’éjaculation retardée.
Il existe une ressemblance frappante entre les anomalies de l’éjaculation que nous venons de décrire et le trouble de la parole appelé bégaiement. Là aussi, le flux verbal normal est assuré par la coordination adéquate des innervations nécessaires à l’articulation des voyelles et des consonnes. Lorsqu’une répétition incoercible des voyelles ou l’apparition d’un spasme au moment de prononcer une consonne vient par moments gêner la parole, il se produit le genre de bégaiement que les spécialistes des troubles de la parole appellent, selon le cas, bégaiement clonique ou bégaiement tonique. On devinera sans peine que je voudrais comparer l’innervation nécessaire à la production des voyelles à l’urétralité, et les coupures entre voyelles et consonnes (évoquant à bien des égards l’action sphinctérienne), à l’inhibition anale. Peut-être n’est-ce pas une simple comparaison, mais une analogie plus fondamentale et plus profonde entre ces deux états pathologiques, comme en témoigne le fait remarquable que les troubles de l’innervation qui caractérisent le bégaiement ont effectivement pu être ramenés, au moyen de la psychanalyse, à une source érotique-anale ou érotique-urétrale. En somme, j’estime que nous pourrions concevoir le mécanisme physio-pathologique des troubles de l’éjaculation comme une sorte de bégaiement génital.
Rappelons à ce propos une donnée fournie par l’embryologie, à savoir que le pénis, instrument de la phase terminale du coït, l’éjaculation, est de par son origine parfaitement apte à réunir des tendances anales et urétrales. Car il ne faut pas oublier que le pénis — acquisition relativement tardive dans l’histoire du développement individuel — se développe à partir de l’intestin et, chez les mammifères inférieurs, à partir du cloaque uro-génital.
Après cette digression physiologique, revenons à nos connaissances psychanalytiques solidement fondées et efforçons-nous d’établir la relation entre la situation que nous venons d’exposer et la théorie de la sexualité proposée par Freud.
Selon les Trois essais sur la théorie de la sexualité de Freud, le développement sexuel de l’individu atteint son apogée au moment où la primauté de la zone génitale vient remplacer les autoérotismes antérieurs (excitations des zones dites érogènes) et les organisations provisoires de la sexualité. Les érotismes et les stades d’organisation dépassés persistent dans l’organisation génitale définitive en tant que mécanismes du « plaisir préliminaire ». Cependant on peut se demander ici : la décomposition analytique du processus d’éjaculation que nous avons tenté de faire dans les paragraphes précédents ne fournit-elle pas les moyens d’élucider, du moins partiellement, les processus plus délicats qui participent à l’établissement de la primauté génitale ? Car ce que j’ai appelé, en termes de physiologie, la collaboration des innervations anale et urétrale, pourrait se traduire en termes de théorie de la sexualité par la synthèse ou la fusion des érotismes anal et urétral dans un érotisme génital. J’aimerais désigner ce nouveau concept par un terme particulier ; appelons donc amphimixie des érotismes ou des pulsions partielles la fusion de deux ou plusieurs érotismes en une unité supérieure.
Dès ces tout premiers pas vers une théorie psychanalytique de la génitalité nous rencontrons deux objections propres à la mettre en cause. La première découle du fait que la physiologie ne permet pas de nous représenter comment pourrait apparaître une telle amphimixie. S’agit-il de modes d’innervation empruntés à un organe, voire à deux, par un troisième ? Ou bien s’agit-il de processus chimiques semblables à l’accumulation des produits endocriniens qui se stimulent ou s’inhibent mutuellement ? Sur ces points nous devons reconnaître notre parfaite ignorance. Mais cette difficulté particulière ne devrait pas nous détourner de notre essai d’explication. En effet, l’interprétation d'un processus donné peut être exacte et parfaitement claire du point de vue analytique, sans que l’aspect physiologique du processus ait été entièrement élucidé. Toute la théorie de la sexualité de Freud est une théorie purement psychanalytique dont les biologistes auront à fournir ultérieurement la confirmation physiologique.
La deuxième objection à la théorie de l’amphimixie — d’ordre métapsychologique — paraît beaucoup plus sérieuse, car elle émane du domaine propre de la psychanalyse. Jusqu’à présent la métapsychologie a travaillé avec l’hypothèse de mécanismes chargés d'énergie ou privés d'énergie. Les différences entre les modes de décharge étaient attribuées aux différences des mécanismes, tandis que la quantité d’énergie seule était prise en considération, à l’exclusion de la qualité ou des caractéristiques de cette énergie. Jusqu’à présent, nous avons toujours considéré le psychisme comme un ensemble de mécanismes variés qui fonctionne avec une seule et même énergie, et cette énergie peut être déplacée d’un système à l’autre ; mais il n’a jamais été question d’un déplacement de qualités, et encore moins de différences qualitatives des énergies elles-mêmes, tel que l’exigerait la théorie de l’amphimixie.
Mais un examen plus attentif permet de constater qu’une telle conception était tacitement contenue dans certaines propositions psychanalytiques. Je pense en particulier à la conception psychanalytique des phénomènes de conversion et de matérialisation hystériques7
Ferenczi, S. : « Phénomènes de matérialisation hystérique » (1919), Psychanalyse III.. Nous avons été amené à les considérer comme une « fonction génitale hétérotope », une génitalisation régressive d’autoérotismes anciens ; autrement dit, comme des processus où des érotismes typiquement génitaux — érectilité, tendance à la friction et à l'éjaculation — donc un syndrome qualitativement bien connu, sont déplacés de la zone génitale à d’autres parties, plus anodines, du corps. Or ce déplacement « du bas vers le haut » n’est probablement rien d’autre que l’inversion de la descente amphimictique des érotismes vers les organes génitaux qui établit, selon la théorie que nous exposons ici, la primauté de la zone génitale. Ne nous laissons donc pas décourager par l’objection métapsychologique opposée à la théorie de l’amphimixie. Il convient même de se demander si l’hypothèse, certes séduisante par sa simplicité, d’une seule espèce d’énergie et d’une multiplicité de mécanismes, ne devrait pas être remplacée par celle d’une multiplicité des formes d’énergie. Au demeurant, nous l’avons déjà supposé involontairement lorsque nous avons imaginé les mécanismes psychiques investis tantôt par des tendances du Moi, tantôt par des tendances sexuelles.
On ne peut donc nous accuser d’inconséquence si nous adoptons l’hypothèse d’érotismes qui peuvent se déplacer et s’associer tout en conservant leur caractère propre.
La question se pose à présent de savoir si l’amphimixie urétro-anale que nous venons de décrire ne peut pas être corroborée par des mélanges différents d’érotismes ; si d’autres caractères du coït ne laissent pas supposer des mélanges analogues ; enfin, si tous ces faits peuvent s’accorder avec la théorie de la sexualité.
Il semble exister une certaine réciprocité entre les autoérotismes urétral et anal avant même l’instauration de la primauté génitale. L’enfant tend à utiliser l’évacuation de sa vessie ou la rétention des matières comme un moyen de se procurer une prime de plaisir. Puis il renonce à une partie de ce plaisir afin de s’assurer l’amour des personnes qui s’occupent de lui. Mais, où prend-il la force de se conformer aux injonctions de la mère ou de la nourrice et de surmonter sa tendance au gaspillage des urines et à la rétention des matières fécales ? Je pense que la sphère anale exerce ici une influence décisive sur les organes participant à la fonction urétrale, et la sphère urétrale sur les organes au service de la fonction anale ; le rectum enseigne à la vessie une certaine capacité de rétention et la vessie inculque une certaine générosité au rectum ; en termes scientifiques, l’érotisme urétral se teinte d’analité et l’érotisme anal d’urétralité, par une amphimixie des deux érotismes. S’il en est bien ainsi, il nous faut accorder une importance capitale aux proportions du mélange et à la répartition plus ou moins fine ou massive des éléments constituants qui entrent dans ce mélange des érotismes ; et ceci non seulement en ce qui concerne l’établissement d’une génitalité normale ou particulière, mais aussi en ce qui concerne la formation du caractère, que Freud nous a appris à considérer pour une grande part comme la superstructure et le remaniement psychiques de ces érotismes.
Même si on fait abstraction de ces considérations, cette amphimixie prégénitale permet d’accepter beaucoup plus facilement l’idée d’une amphimixie urétro-anale dans l’acte du coït. Ainsi l’organe génital ne serait plus cette baguette magique, unique et incomparable, vers laquelle affluent les érotismes inhérents aux diverses parties du corps, et l’amphimixie génitale ne serait qu’un cas particulier parmi les nombreuses combinaisons possibles. Mais du point de vue de l’adaptation individuelle, ce cas particulier est très significatif. Il nous montre par quelles méthodes la contrainte exercée par l’éducation amène l’individu à renoncer à un plaisir et à accepter une activité ressentie comme un déplaisir : seulement par une habile combinaison de mécanismes de plaisir, semble-t-il. La vessie ne renonce à laisser s’écouler librement l’urine que si elle peut recourir à une autre source de plaisir, la rétention ; et l’intestin ne renonce au plaisir de la constipation qu’à condition de pouvoir emprunter une part du plaisir urétral d’évacuation. Peut-être réussirait-on par une analyse suffisamment poussée à décomposer la sublimation la plus réussie, ou même une renonciation apparemment totale, en de tels éléments latents de satisfaction hédonistiques sans lesquels, semble-t-il, aucun être vivant n’est disposé à modifier en quoi que ce soit ses modes de fonctionnement8
C’est cette interdépendance de la tendance urétrale au gaspillage et de la tendance anale à la rétention qui se répète à mon avis dans la lutte contre la masturbation. Nous sommes en droit de considérer le gaspillage de sperme dans l’onanisme comme une répétition de la phase énurétique, tandis que les fantasmes hypocondriaques angoissants qui incitent à mettre fin à l’onanisme trahissent des caractéristiques anales évidentes..
À la question de savoir s’il existe encore d’autres combinaisons et déplacements des érotismes, nous pouvons répondre résolument par l’affirmative9
Dans certaines circonstances, vessie et rectum se comportent comme s’ils avaient échangé leurs rôles et ceci peut s’expliquer par une influence trop forte de la tendance opposée : dans la diarrhée nerveuse l’urétralité envahit l’intestin, tandis que dans la rétention d’urine nerveuse c’est la vessie qui exagère l’avarice enseignée par l’intestin. Les cas qui m’ont permis d’éclairer les raisons de ce comportement présentaient tous des manifestations d’opposition camouflée. L’enfant, tout comme l’adulte névrosé, réussit à pousser à l’absurde les démarches éducatives en les exagérant.. L’observation des enfants, à elle seule, en apporte de nombreuses confirmations. En effet, les enfants condensent volontiers en un seul acte les activités voluptueuses les plus diverses ; ils prennent un plaisir particulier à jouir simultanément de l’ingestion de nourriture et de l’évacuation des intestins. Selon Lindner, le premier à avoir observé ces phénomènes, même le nourrisson associe déjà volontiers la succion du pouce au frottement ou au tiraillement de diverses parties cutanées : lobes des oreilles, doigts et même organes génitaux. Dans ces cas, on est en droit de parler d’un mélange d’érotismes oral et anal, ou oral et cutané. De même, les pervers aussi s’efforcent de cumuler les érotismes. Particulièrement remarquable est le cas de ces voyeurs qui, pour trouver leur satisfaction, ont besoin simultanément de regarder la défécation et de flairer, voire goûter, les matières. L’exemple le plus caractéristique d’une telle activité amphimictique m’a été fourni par le jeu d’un petit garçon de deux ans et demi qui, assis sur le pot, lâchait alternativement quelques gouttes d’urine puis un peu de matières ou de vents, tout en ne cessant de s’exclamer : « un pschourr, un plouf... un pschourr... un plouf ! »
Quelques malades m’ont même permis d’appréhender certains mobiles psychiques de ces fusions d’érotismes. Ainsi, par exemple, un patient atteint d’impuissance de type anal était déprimé après chaque défécation, en proie à des fantasmes d’appauvrissement et d’infériorité ; par contre l’ingestion de nourriture le jetait dans un délire mégalomaniaque extraordinaire. Ce cas montre comment la coprophagie, combinaison manifeste d’érotisme oral et d’érotisme anal, s’efforce de compenser la perte anale par le plaisir d’incorporation orale.
Pour illustrer le déplacement de qualités érotiques, je citerai encore le déplacement de l’érotisme clitoridien de la femme sur le vagin, décrit par Freud ; le déplacement de la tendance érectile sur les mamelons et les narines, ainsi que la tendance à rougir (érection de toute la tête) chez la vierge refoulant l’excitation génitale.
On pourrait encore, sur la base des observations psychanalytiques de Pfister et de Hugh-Helmuth, citer en faveur de l’existence des mélanges pulsionnels érotiques les cas de synesthésie, où l’excitation d’un organe sensoriel provoque l’excitation hallucinatoire d’un autre organe récepteur : audition colorée, vision acoustique, audition odorée10
Les exemples de synesthésies sont donnés en français dans le texte original et nous les reproduisons tels quels. (N. d. T.), etc.
Toutes ces observations, présentées ici sans ordre précis, ont renforcé ma conviction initiale, à savoir que l’acte éjaculatoire est le fait d’une amphimixie urétro-anale. Je voudrais maintenant essayer de reconsidérer sous cet angle tout le déroulement du coït, y compris les phases de l’activité préparatoire et du plaisir préliminaire.
2. Le coït, comme processus amphimictique
Nous avons appris dans les Trois essais sur la théorie de la sexualité que les activités érotiques infantiles réapparaissent dans l’acte sexuel de l’adulte sous la forme des activités du plaisir préliminaire mais que chez l’adulte la décharge effective de l’excitation ne se produit qu’au moment de l’éjaculation. Donc, alors que chez l’enfant, sucer son pouce, battre et être battu, regarder et être regardé peut conduire à une satisfaction complète, pour l’adulte, regarder, embrasser, enlacer ne servent qu’à déclencher le mécanisme génital proprement dit. Tout se passe comme si aucune de ces excitations ne pouvait aboutir mais, parvenue à un certain seuil d’intensité, se trouvait transposée sur un autre érotisme. Lorsque l’excitation engendrée par la contemplation, l’audition, l’olfaction érotiques atteint une intensité suffisante, elle incite aux étreintes et aux échanges de baisers et c’est seulement lorsque ces caresses à leur tour auront atteint une certaine intensité que se manifestera le désir d’érection, de pénétration et de friction qui culmine dans le processus amphimictique d’éjaculation déjà décrit. Nous pourrions presque dire que chaque acte sexuel répète brièvement toute l’évolution sexuelle. C’est comme si les différentes zones érogènes étaient autant de foyers d’incendie reliés entre eux par une mèche, qui déclenche finalement l’explosion des énergies pulsionnelles accumulées dans l’appareil génital.
Mais l’hypothèse la plus vraisemblable est que ce déplacement amphimictique des pulsions vers le bas n’a pas seulement lieu pendant le coït, mais aussi tout au long de la vie. Cette hypothèse heuristique a le mérite de nous faire mieux comprendre la manière dont s’établit la primauté génitale, son sens et sa raison d’être biologique. Nous savons que les principales phases dans le développement de la libido sont celles qui mènent de l’autoérotisme à l’amour d’objet génital, en passant par le narcissisme. Au stade autoérotique de cette évolution, la sexualité de chaque organe, ou pulsion partielle, se satisfait anarchiquement, sans considération pour le bien-être du reste de l’organisme. Du point de vue de la capacité et de l’efficacité fonctionnelles de chaque organe on peut considérer comme un net progrès la capacité de dériver les excitations sexuelles au-dehors et de les accumuler dans une sorte de réservoir spécial dont elles sont périodiquement évacuées. Si les activités voluptueuses n’étaient pas ainsi isolées, l’œil s’épuiserait en contemplation érotique, la bouche se comporterait exclusivement en organe érotique oral au lieu de se mettre au service de la conservation de l’individu ; la peau elle-même ne serait pas cette enveloppe protectrice dont la sensibilité avertit du danger mais seulement un lieu de sensations érotiques ; la musculature ne serait pas l’instrument perfectionné de l’activité volontaire mais servirait uniquement à écouler des décharges sadiques et autres décharges motrices voluptueuses, etc. Le fait que l’organisme se soit débarrassé des tendances sexuelles à la décharge en les concentrant dans l’appareil génital a considérablement accru son niveau d’efficacité et lui permet de s’adapter plus facilement aux situations difficiles, voire aux catastrophes. Il faut concevoir la constitution du centre génital sur un mode pangénétique au sens de Darwin ; cela signifie que toutes les parties de l’organisme sont d’une façon ou d’une autre représentées dans l’appareil génital, lequel gère, à la manière d’un administrateur, l’entreprise de décharge érotique pour l’organisme tout entier.
Le passage de l’autoérotisme au narcissisme serait alors le résultat, visible même de l’extérieur, du déplacement amphimictique des érotismes vers le bas. Si nous voulons prendre au sérieux l’hypothèse d’une pangenèse de la fonction génitale, nous devons considérer le membre viril comme un double en miniature du Moi entier, l’incarnation du Moi-plaisir, et dans ce dédoublement du Moi nous voyons la condition fondamentale de l’amour narcissique pour le Moi. Pour ce petit Moi réduit qui dans les rêves et les fantasmes symbolise si souvent la personne tout entière, il faut créer au moment du coït des conditions qui lui assurent une satisfaction simple et infaillible. Nous allons maintenant parler brièvement de ces conditions.
L’expérience psychanalytique a établi que les actes préparatoires au coït — caresses tendres et étreintes — ont entre autres pour fonction de favoriser l'identification mutuelle des partenaires. Embrasser, caresser, mordre, étreindre servent entre autres à effacer la limite entre les Moi des deux partenaires ; ainsi par exemple l’homme au cours du coït, après avoir en quelque sorte introjecté sur le plan psychique les organes de la femme, n’est plus obligé d’éprouver le sentiment d’avoir confié le plus précieux de ses organes, le représentant de son Moi-plaisir, à un milieu étranger, donc dangereux ; de sorte qu’il peut sans crainte se permettre l’érection, l’organe bien protégé ne risque pas d’être perdu puisqu’il se trouve confié à un être auquel son Moi s’est identifié. Ainsi dans l’acte sexuel le désir de donner et le désir de conserver, les tendances égoïstes et les tendances libidinales, s’équilibrent avec succès. C’est un phénomène que nous avons déjà rencontré dans la double orientation propre à tout symptôme de conversion hystérique. D’ailleurs cette analogie elle-même n’est pas fortuite puisque le symptôme hystérique — comme le montrent d’innombrables observations psychanalytiques — reproduit toujours d’une façon ou d’une autre la fonction génitale.
Lorsque l’union la plus intime entre deux êtres de sexe différent s’est réalisée par la formation du triple pont du baiser, de l'enlacement et de la pénétration du pénis, alors se produit le combat final, décisif, entre le désir de donner et celui de conserver la sécrétion génitale elle-même, combat que nous avons tenté de décrire au début de nos réflexions comme une lutte entre les tendances anale et urétrale. Donc, en définitive, tout le combat génital se déclenche autour d’un produit de sécrétion ; lors de l’éjaculation qui termine le combat, la sécrétion se sépare du corps de l’homme, le libérant ainsi de la tension sexuelle, mais de telle sorte que cette sécrétion se trouve mise à l’abri dans un lieu sûr et approprié, à l’intérieur du corps de la femme. Cependant, cette sollicitude nous incite à supposer aussi l’existence d’un processus d'identification entre la sécrétion et le Moi ; ainsi le coït impliquerait dès à présent un triple processus d’identification : identification de l’organisme tout entier à l’organe génital, identification au partenaire et identification à la sécrétion génitale11
Pour répondre à une objection qui se présente immédiatement à l’esprit, je veux souligner que ces réflexions concernent exclusivement le déroulement plus simple des événements tels qu’on les observe chez le partenaire masculin. J’essayerai de montrer plus loin que cette conception peut également s’appliquer aux processus beaucoup plus complexes que l’on constate chez la femme..
Si nous considérons maintenant toute l’évolution de la sexualité, de la succion du pouce chez le nourrisson jusqu’au coït hétérosexuel en passant par le narcissisme de la masturbation génitale, et si nous gardons à l’esprit les processus complexes d’identification du Moi avec le pénis et avec la sécrétion génitale, nous en arrivons à la conclusion que toute cette évolution, y compris par conséquent le coït lui-même, ne peut avoir pour but qu’une tentative du Moi, d’abord tâtonnante et maladroite, puis de plus en plus décidée et enfin partiellement réussie, de retourner dans le corps maternel, situation où la rupture si douloureuse entre le Moi et l’environnement n’existait pas encore. Le coït réalise cette régression temporaire de trois manières ; en ce qui concerne l’organisme tout entier, sur un mode hallucinatoire seulement, comme dans le sommeil ; quant au pénis, auquel s’identifie l’organisme entier, il y réussit déjà partiellement, à savoir sous une forme symbolique ; seul le sperme a le privilège, en tant que représentant du Moi et de son double narcissique, l’organe génital, de parvenir réellement à l’intérieur du corps maternel.
En adoptant la terminologie des sciences naturelles, nous pourrions dire en résumé que l’acte sexuel vise et réalise la satisfaction simultanée du soma et du germen. Pour le soma, l’éjaculation équivaut à se débarrasser de produits de sécrétion encombrants ; pour les cellules germinales, c’est pénétrer dans le milieu qui leur est le plus favorable. Cependant la conception psychanalytique nous apprend que le soma, par suite de son identification au sperme, ne satisfait pas seulement des tendances égoïstes visant à soulager des tensions, mais participe en même temps à la satisfaction réelle obtenue par les cellules germinales sous la forme d’un retour hallucinatoire et symbolique (partiel) dans le sein maternel, abandonné bien à contre-cœur au moment de la naissance, et c’est ce que nous appelons, du point de vue de l’individu, la partie libidinale du coït.
Si nous considérons le processus génital sous cet angle que je qualifierais de « bioanalytique », nous sommes enfin en mesure de comprendre pourquoi le désir œdipien, le désir de coït avec la mère, se retrouve avec cette régularité presque fastidieuse par sa monotonie comme tendance nucléaire dans l’analyse des hommes névrosés. Le désir œdipien est l’expression psychique d’une tendance biologique beaucoup plus générale qui pousse les êtres vivants à retourner dans l’état de repos dont ils jouissaient avant la naissance.
Une des plus belles tâches de la physiologie serait d’explorer les processus organiques qui permettent la fusion des érotismes isolés en érotisme génital. Selon l’hypothèse développée plus haut, chaque fois qu’un organe renonce à s’abandonner directement à ses tendances érotiques au bénéfice de l’organisme entier, il y a soit production d’une sécrétion au niveau de cet organe, soit déplacement de quantités ou de qualités d’innervation vers d’autres organes et finalement vers l’organe génital ; c’est à ce dernier qu’incombera ensuite la tâche d’aplanir les tensions érotiques librement flottantes de tous les organes dans le coït.
Il s’ensuit pour la biologie une autre tâche non moins ardue : découvrir de quelle façon les tendances à la satisfaction du germen d’une part et du soma d’autre part, indépendantes à l’origine, se combinent ou s’influencent mutuellement dans l’acte sexuel. Elle devrait également mettre en évidence les causes onto- et phylo-génétiques qui incitent tant d’êtres vivants à rechercher la satisfaction suprême précisément dans l’acte d’accouplement qui, selon les considérations qui précèdent, est en réalité l’expression du désir de retourner dans le sein maternel.
3. Le développement du sens de réalité érotique et ses stades
Dans un précédent travail sur les stades de développement du sens de réalité au cours de la croissance de l’enfant12
« Le développement du sens de réalité et ses stades » (1913), Psychanalyse II, p. 51, Payot., j’ai été amené à émettre l’hypothèse que dès sa naissance l’homme est dominé par une tendance régressive permanente visant au rétablissement de la situation intra-utérine, et qu’il s’y cramponne obstinément, sur un mode magique-hallucinatoire, à l’aide d’hallucinations positives et négatives. Suivant cette conception, pour que le sens de réalité puisse atteindre son plein développement, il faut que l’homme ait renoncé une fois pour toutes à cette régression et y trouve un substitut dans le monde de la réalité. Mais seule une partie de notre personnalité participe à cette évolution ; le sommeil et les rêves, notre vie sexuelle et nos fantasmes, restent suspendus à la tendance visant à réaliser ce désir primordial.
Dans ce qui va suivre je vais essayer, en manière de complément à ces idées, de décrire les phases de développement de la sexualité telles que nous les connaissons par les travaux de Freud, c’est-à-dire comme une série de tentatives, d’abord tâtonnantes et maladroites puis de plus en plus explicites, à retourner dans le sein maternel, tandis que la phase terminale de toute cette évolution, le développement de la fonction génitale, représente le parallèle érotique de la « fonction de réalité », c’est-à-dire l’accès au « sens de réalité érotique ». Car, ainsi que je l’ai signalé au chapitre précédent, l’acte sexuel permet le retour réel, encore que partiel, dans l’utérus maternel.
Au premier stade de l’organisation sexuelle infantile, la phase érotique orale, il incombe encore aux personnes qui prennent soin de l’enfant de veiller à entretenir l’illusion de la situation intra-utérine ; elles se chargent de maintenir les conditions de chaleur, d’obscurité et de calme dont l’enfant a besoin pour la conserver. Pendant un certain temps, aucun contrôle ne s’exerce sur les fonctions d’élimination et la seule activité proprement dite du nourrisson consiste à téter le sein maternel. Mais même ce premier objet d’amour est à l’origine imposé à l’enfant par sa mère, de sorte que nous pouvons dire que l’amour primaire de l’enfant est un « amour d’objet passif ». Quoi qu’il en soit, le rythme de la succion reste pour toujours un élément essentiel de toute activité érotique ultérieure et s’intégrera, selon notre conception, amphimictiquement à l’acte masturbatoire et au coït. La succion du pouce ou Wonnesaugen (Lindner) constitue l’activité purement libidinale propre à cette période et en même temps le premier problème d’ordre érotique qui se présente à nous. Qu’est-ce qui incite l’enfant à prolonger la tétée même une fois rassasié ? Quel plaisir trouve-t-il à cette activité ? Mais résistons à la tentation de vouloir résoudre dès maintenant cette énigme et, à travers celle-ci, la question fondamentale de la psychologie de l’érotisme ; attendons d’avoir étudié en détail les autres érotismes.
L’enfant au sein est en somme un ectoparasite de la mère, tout comme il en avait été l’endoparasite à la période fœtale. Et tout comme il avait pris ses aises dans le corps maternel sans le moindre égard et contraint finalement la mère, son hôtesse nourricière, à expulser son pensionnaire impudent, il se comporte par la suite avec une agressivité croissante à l’égard de la mère qui l’allaite. La paisible phase orale érotique de la tétée débouche sur une phase cannibalistique. L’enfant développe des instruments de mastication et tout se passe comme si, à l’aide de ceux-ci, il voulait proprement dévorer la mère bien-aimée qui, finalement, se trouve dans l’obligation de le sevrer. Je pense que ce cannibalisme ne sert pas seulement l’instinct d’auto-conservation, mais que les dents sont en même temps des armes au service d’une tendance libidinale, des instruments à l'aide desquels l'enfant cherche à pénétrer dans le corps de la mère.
L’unique argument en faveur de cette hypothèse hardie, mais qui pèse lourd aux yeux d’un psychanalyste, est la constance et la régularité avec laquelle, dans les rêves et dans les symptômes névrotiques, on retrouve l’identité symbolique entre le pénis et les dents. Selon notre conception, la dent est à proprement parler un pénis archaïque ( Urpenis), au rôle libidinal duquel l’enfant doit renoncer au moment du sevrage13
Un enfant de deux ans assistant à la tétée de son jeune frère déclare : « Dany mange de la viande. » L’interdiction stricte pour les Juifs de manger simultanément des plats contenant de la viande et des plats contenant du lait ne sert peut-être qu’à assurer le sevrage.. Par conséquent, ce n’est pas la dent qui est le symbole du pénis, mais c’est le pénis, plus tardivement développé, qui est le symbole de l’instrument de pénétration plus ancien, la dent. Le caractère paradoxal de cette hypothèse sera peut-être atténué si nous considérons que tout rapport symbolique est précédé par un stade de l’équation où deux choses peuvent se remplacer mutuellement.
Le « cannibalisme » contient déjà en partie tous les éléments agressifs qui se manifestent si nettement dans l’organisation sadique-anale suivante. Le rapport remarquablement étroit qui existe entre la libido anale et les manifestations du sadisme correspondrait, selon la conception développée plus haut, au déplacement de l’agressivité, primitivement « cannibalistique », sur la fonction intestinale. Le motif de ce déplacement est la réaction de déplaisir suscitée chez l’enfant lorsque les parents ou leurs substituts exigent de lui le respect de certaines règles de propreté. Même à ce stade, il ne renonce pas davantage à la « régression maternelle » orale-érotique tentée précédemment ; celle-ci réapparaît ici sous forme d'identification des fèces à l’enfant, c’est-à-dire au sujet lui-même. Tout se passe comme si l’enfant, après ce refus assez bouleversant de l’agression libidinale orale-érotique de la part de la mère, avait retourné sa libido vers lui-même. Étant lui-même à la fois la mère et l’enfant (contenu intestinal), il peut se rendre indépendant, sur le plan libidinal, de la personne qui prend soin de lui (la mère). C’est peut-être là la raison ultime de ces traits de caractère oppositionnels qui sont généralement les produits de transformation de la libido sadique-anale.
La période de la masturbation doit être considérée comme un stade à part du développement de la libido : la première phase qui amorce la primauté de la zone génitale14
Récemment, Freud a décrit une phase distincte d’organisation phallique, Int. Ztchr. f. Psa., IX, 1933.. Toutes nos analyses montrent que la masturbation est associée à de grandes quantités de libido sadique-anale, de sorte que nous pouvons suivre à présent le déplacement des composantes agressives depuis la phase orale jusqu’à la phase génitale en passant par la phase anale. Dans la masturbation cependant, l’équation symbolique « enfant = fèces » est remplacée par le symbole « enfant = pénis » ; pour le garçon c’est donc le creux de sa propre main qui symbolise l’organe génital féminin. Il est frappant de constater que dans les deux dernières phases l’enfant joue subjectivement un rôle double, ce qui est sans doute en rapport avec la bisexualité infantile. En tout cas, pour comprendre les manifestations de la libido génitale pleinement mature, il est extrêmement important de savoir que tout être humain, homme ou femme, peut jouer avec son propre corps le double rôle de la mère et de l’enfant.
Vers la fin du développement de la libido infantile, l’enfant, après les phases de l’amour d’objet passif, après l’agression cannibalistique et l’introversion, revient à son objet premier, la mère, mais muni cette fois d’une arme offensive plus adéquate. La verge érectile serait parfaitement capable de trouver le chemin du vagin maternel et parfaitement en mesure d’atteindre ce but si les interdits éducatifs, peut-être aussi déjà un mécanisme de défense particulier ou l’angoisse, ne mettaient pas rapidement un terme à ce précoce amour œdipien.
Nous renonçons à décrire les périodes sexuelles suivantes — période de latence et puberté — puisque notre propos était seulement de démontrer que l’ontogenèse de la sexualité continue invariablement à être dominée par la tendance au retour dans le sein maternel et que l’organisation génitale, qui réalise en quelque sorte cette tendance, correspond au maximum de développement du sens de réalité érotique. Après l’échec de la première tentative orale de retourner dans le corps de la mère, suivent les périodes anale et masturbatoire, périodes qu’on pourrait qualifier d'autoplastiques, où le sujet cherche dans son propre corps un substitut fantasmatique à l’objet perdu ; mais seul l’instrument constitué par l’organe de copulation mâle permet une première tentative sérieuse de réaliser cette tendance sur un mode à nouveau alloplastique, d’abord sur la mère elle-même, puis sur les autres femmes de l’entourage.
Nous ne pourrons guère qu’esquisser dans ses grandes lignes la représentation de l’acte sexuel final en tant que somme amphimictique des érotismes plus précoces. Les impulsions agressives se traduisent dans l’acte sexuel par la violence manifestée lors de la conquête de l’objet et de la pénétration. Nous tenterons maintenant d’expliquer comment les érotismes anal et urétral sont utilisés dans la formation de l'érotisme parental (ou érotisme de parturition) étroitement associé à la génitalité, en étudiant le développement de la sexualité féminine, problème qu’il n’est plus possible de remettre à plus tard.
Le développement de la sexualité génitale, dont nous venons d’exposer schématiquement le déroulement chez l’homme, subit chez la femme une interruption assez soudaine. Cette interruption se caractérise essentiellement par le déplacement de l’érogénéité du clitoris (le pénis féminin) à la cavité vaginale. Cependant l’expérience psychanalytique nous amène à supposer que non seulement le vagin, mais aussi d’autres parties du corps de la femme peuvent se génitaliser — comme l’hystérie en témoigne également —, en particulier le mamelon et la région qui l’entoure. Il est probable que l’allaitement constitue dans une certaine mesure une compensation pour le plaisir perdu de l’intromission et de l’éjaculation ; en fait, le mamelon manifeste clairement son aptitude érectile. Il semble toutefois qu’une quantité appréciable d’érotisme anal et oral se trouve également déplacée sur le vagin, dont la musculature lisse paraît imiter par ses contractions comme par son péristaltisme le plaisir oral d’ingestion et le plaisir anal de rétention. En ce qui concerne la zone génitale principale, chez l’homme elle est essentiellement imprégnée d’urétralité, tandis que chez la femme il se produit une régression surtout dans le sens de l’analité, dans la mesure où chez elle l’accent dans le coït porte sur la conservation du pénis, du sperme et du fœtus qui se développe à partir du sperme (érotisme parental). Cependant le désir viril, partiellement abandonné, de retour dans le sein maternel se manifeste aussi chez la femme, mais seulement au niveau du fantasme : par exemple sous la forme d’une identification imaginaire pendant le coït avec l’homme, détenteur du pénis, sous la forme d’une sensation vaginale suggérant la possession d’un pénis (« pénis creux ») ou d’une identification à l’enfant qu’elle porte dans son corps. L’agressivité masculine se transforme chez la femme en plaisir passif de subir l’acte sexuel (masochisme) qui peut s’expliquer d’une part par la présence de pulsions très archaïques (pulsion de mort de Freud), d’autre part par un mécanisme d’identification avec l’homme victorieux. Tous ces réinvestissements secondaires de mécanismes de plaisir éloignés dans l’espace et génétiquement dépassés semblent plus ou moins servir à la femme de consolation pour la perte du pénis.
D’une façon générale, voici comment nous pouvons concevoir chez la femme le passage d’une activité de type viril à la passivité : la génitalité du pénis féminin (clitoris) reflue régressivement vers l’ensemble du corps et vers l’ensemble du Moi, d’où elle était venue — pensons-nous — par amphimixie, de sorte que la femme retombe sous la domination du narcissisme secondaire ; sur le plan érotique, elle devient semblable à un enfant, à un être qui s’accroche encore volontiers au fantasme d'être encore tout entier à l’intérieur de la mère. Ainsi peut-elle facilement s’identifier au fœtus qui vit en elle (ou au pénis qui en est le symbole), et passer du transitif à l’intransitif, de la pénétration active à la passivité. La génitalisation secondaire du corps féminin explique aussi la tendance plus grande des femmes à l'hystérie de conversion15
« Phénomènes de matérialisation hystérique », Psychanalyse III..
L’observation attentive du développement génital de la femme fait penser qu’au moment du premier coït la génitalité féminine est encore souvent tout à fait immature. Les premières tentatives de coït ne sont à vrai dire que des viols sanglants. C’est seulement plus tard que la femme apprend à subir l’acte sexuel de façon passive et encore plus tard à y trouver du plaisir, voire à y prendre une part active. Certes, dans chaque acte sexuel l’opposition primitive se répète sous forme d’une résistance musculaire opposée par le vagin contracté ; ensuite seulement se produit une lubrification du vagin qui devient aisément pénétrable et c’est tout à la fin que surviennent les contractions qui semblent avoir pour but l’aspiration du sperme et l’incorporation du pénis (la tendance castratrice y joue probablement aussi un rôle). Ces observations, jointes à certaines considérations phylogénétiques que nous examinerons plus en détail par la suite, donnent à penser que le coït est également une répétition, au niveau individuel, de la lutte des sexes. La partie perdante est la femme : elle abandonne à l’homme le privilège de pénétrer effectivement dans le corps de la mère, se contentant pour sa part de compensations fantasmatiques, et surtout en accueillant l’enfant dont elle partage le bonheur16
Ceci constitue très brièvement la construction que j’ai tenté d’élaborer et à laquelle Freud se réfère dans son article : « Le tabou de la virginité » (dans La vie sexuelle, P.U.F., page 66, traduction de Denise Berger).. Par contre, à en croire les observations psychanalytiques de Groddeck, il existe, dissimulés derrière les souffrances de l’accouchement, des plaisirs dont le sexe masculin est privé.
Ces réflexions jettent un jour nouveau sur les modes de satisfaction des pervers et les symptômes des psychonévrosés. Leur fixation à une étape antérieure du développement sexuel représente donc un accomplissement très imparfait du but final de la fonction de réalité érotique, à savoir la reproduction génitale de la situation intra-utérine. Et même les archétypes des névroses actuelles : la neurasthénie qui s’associe à l’éjaculation précoce et la névrose d’angoisse qui s’accompagne d’une tendance excessive à la rétention, peuvent maintenant s’expliquer par une génitalité où surabondent soit les éléments anaux soit les éléments urétraux ; l’impuissance qui en résulte peut être ramenée par l’analyse à l’angoisse de la situation intra-utérine. Je voudrais ici faire appel aux travaux de Rank, qui d’ailleurs vont trop loin à certains égards (Le traumatisme de la naissance, 1924), pour donner une plus grande extension à la présente théorie de la génitalité.
Je suis convaincu que l’observation de la vie sexuelle des animaux viendra confirmer cette conception, et je ne regrette que l’insuffisance de mes connaissances dans ce domaine de la science. Le peu que je sais va dans le sens de ma conception relative à l’universalité de la pulsion de régression maternelle et de sa réalisation par le coït. Je me réfère par exemple au fait que certains animaux prolongent l’acte sexuel quasi indéfiniment17
Le coït de l'araignée peut durer sept heures, celui de la grenouille jusqu’à quatre semaines. On connaît depuis longtemps l'accouplement permanent de certains parasites ; il arrive même que le mâle passe sa vie entière dans l’utérus ou le larynx de la femelle. Un développement supérieur du sens de réalité érotique est également le fait de ces parasites qui transfèrent presque tout le souci de leur entretien à leur hôte et dont l'organisation est à peu près entièrement vouée au service de la fonction sexuelle..
4. Interprétation des divers processus de l'acte sexuel
Après ces considérations, il nous parait intéressant de soumettre à une analyse, à la manière des symptômes névrotiques, les divers processus de l’acte sexuel, dont jusqu’à présent nous n’avons vraiment étudié que l’éjaculation.
Tout d’abord il y a l'érection qui, selon notre théorie de la génitalité et le désir de retour à la situation intra-utérine qu’elle implique, appelle une interprétation au premier abord surprenante. Supposons que l'enveloppement permanent du gland dans une membrane muqueuse (prépuce) constitue en fait une réplique en réduction de la situation intra-utérine. Lorsque au moment de l’érection l'accroissement de la tension accumulée dans l’organe génital projette le gland, c’est-à-dire la partie la plus sensible du pénis (et, selon notre conception, le représentant narcissique du Moi tout entier), hors de sa position de repos bien protégée, on peut dire en quelque sorte qu’il l’accouche ; l’intensification soudaine de la sensation de déplaisir permet de comprendre le désir, lui aussi soudain, de rétablir la situation perdue par le pénis en pénétrant dans une autre enveloppe, autrement dit de rechercher dans le monde extérieur réel, cette fois effectivement à l’intérieur du corps de la femme, la quiétude dont il jouissait auparavant sur un mode auto-érotique.
Dans l’acte sexuel humain, l’éjaculation est précédée par une friction prolongée. Pour comprendre ce fait, il nous faut remonter un peu plus en arrière.
Les zoologistes ont observé l’existence chez certains animaux d’un mode de réaction singulier, l'autotomie, qui consiste en ceci : l’animal détache de son corps, c’est-à-dire littéralement « laisse tomber » au moyen de mouvements musculaires spécifiques, ceux de ses organes qui sont soumis à une irritation trop intense ou le font souffrir de quelque autre façon. Certains vers, par exemple, placés dans ces conditions, sont capables de rejeter la totalité de leur intestin ; d’autres se brisent en petits morceaux. Tout le monde sait avec quelle facilité le lézard poursuivi abandonne sa queue aux mains de l’adversaire, pour la régénérer ensuite rapidement. Cette réaction correspond assurément à un trait fondamental de tout être vivant, et nous pouvons supposer qu’elle représente le modèle biologique du refoulement, c’est-à-dire essentiellement la fuite psychique devant les sentiments de déplaisir trop intense.
Nous avons déjà dit que toutes les quantités et qualités d’excitation que l’organisme, dans l’intérêt au bon fonctionnement de ses organes, a déplacés sans les satisfaire, s’accumulent dans l’appareil génital pour être déchargées par son intermédiaire. Cette décharge, au sens de la tendance à l’autotomie, ne peut que correspondre à la tendance à rejeter l’organe en état de tension. Du point de vue du Moi nous avons décrit l’éjaculation comme un rejet analogue de sécrétions produisant une sensation de déplaisir ; nous pouvons reconnaître la manifestation d’une tendance semblable dans l’érection et la friction. L’érection elle-même n’est peut-être que l’aboutissement incomplet d’une tendance à détacher du corps l’organe génital chargé de qualités de déplaisir. Comme dans l’acte d’éjaculation, nous pouvons considérer qu’il s’agit ici d’une lutte entre la tendance à rejeter et celle à conserver ; lutte qui, dans ce cas, ne se termine pas par la victoire de la tendance à la séparation18
La tendance à l’autotomie fournit l’explication dernière du symbole de l’extraction dentaire employé à la place des représentations de spermatorrhée et de naissance.. Nous pourrions encore supposer que tout d’abord l’acte sexuel tend à détacher entièrement l’organe sexuel du corps — une sorte d’auto-castration — mais qu’il se contente ensuite de se débarrasser de la sécrétion. Les multiples comportements sexuels des animaux nous permettent d’observer, sur des exemples extrêmes, les différentes issues de cette lutte. Le tatou (dasypus), mammifère à ceinture d’écailles, enfonce dans l’organe de la femelle un pénis gigantesque si on le compare à sa taille ; à l’opposé, le pénis de la girafe s’amincit lors de la pénétration à la manière d’un télescope pour finir en un appendice filiforme et le sperme éjaculé s’écoule directement dans l’utérus à travers cette sorte de filament.
Le désir de friction génitale laisse supposer que le déplaisir provenant de l’organisme tout entier s’accumule dans l’organe génital sous la forme de prurit ; celui-ci est ensuite soulagé par une manière de grattage. Mais nous pouvons supposer que le réflexe de grattage lui-même est un résidu archaïque de la tendance à l’autotomie, une tentative d’arracher simplement avec les ongles la partie du corps irritée. En effet, ce prurit ne cesse en général qu’une fois la partie irritée grattée jusqu’au sang, donc par l’arrachement effectif de morceaux de tissu. Très probablement, friction, érection et éjaculation constituent un processus autotomique, intensif au début, s’atténuant par la suite, qui commence avec l’intention de « laisser tomber » l’organe tout entier, puis se contente du grattage (frottement) et finalement se limite à l’émission spermatique. Naturellement, tout ceci ne caractérise qu’un aspect du processus (le Moi, le soma) ; en ce qui concerne le tissu germinal, autrement dit la libido, il s’agit d’une tendance d’intensité décroissante à retourner dans le corps maternel.
Je reviendrai plus loin sur les mobiles plus profonds de la tendance génitale à l'auto-castration ; je me contenterai de noter ici que le règne animal fournit d’innombrables exemples d’auto-castration effective où l’on observe, au cours de l’acte, non seulement l’expulsion de la sécrétion, mais l’arrachement véritable du pénis. Peut-être pouvons-nous évoquer ici, comme une sorte d’auto-castration avortée, la turgescence en forme d’anneau du pénis des canidés qui fait que le mâle reste « suspendu » à la femelle, éveillant chez l’observateur l’idée d’un arrachement possible.
Chez l’homme, le travail de conquête qui précède l’accouplement s’est affadi au cours de l’évolution culturelle jusqu’à devenir méconnaissable ; pour en retrouver la signification primitive nous devons en revenir une fois de plus à l’observation des animaux. Nous avons déjà signalé que la tendance nucléaire à retourner dans l’utérus maternel est également partagée par les deux sexes. Donc le travail de conquête ne peut avoir pour but que de permettre à l’homme d’amener la femme à subir l’acte sexuel en renonçant à sa propre tendance à la satisfaction réelle ou en limitant celle-ci. À l'appui de cette affirmation je peux citer deux remarques de Darwin qui fait autorité en la matière : « Ces phénomènes nous incitent à penser », dit-il à un moment, « que la femelle ne choisit pas le mâle le plus attrayant pour elle, mais celui qui lui répugne le moins ». Cette conception exprime bien ce qui nous paraît être la situation privilégiée du mâle dans l’acte sexuel. Ailleurs Darwin constate que la différenciation sexuelle, au sens du « dimorphisme sexuel », commence toujours chez le mâle, même si peut-être plus tard elle est aussi reprise en partie par la femelle. Tout ceci s’accorde parfaitement avec la remarque de Freud selon laquelle toute libido est en fait virile, même lorsqu’elle vise une satisfaction passive (comme chez la femme, par exemple).
Selon notre hypothèse, les caractères sexuels secondaires qui sont donc à l'origine le privilège du mâle, sont les armes d’un combat où il s’agit de décider qui des deux adversaires parviendra — en compensation de l’utérus maternel perdu — à forcer l’accès du corps de l’autre. Si nous examinons ces armes du point de vue de leur efficacité, nous constatons qu’elles visent toutes à réduire la femelle à l’obéissance par la violence directe, ou à la paralyser par fascination hypnotique. À la première catégorie de ces armes de combat appartiennent par exemple les durillons qui apparaissent sur le pouce de la grenouille mâle en période de frai et qui lui servent à étreindre la femelle par le creux des aisselles ; la plus grande force physique du mâle va dans le même sens ; ou encore le comportement du mâle chez certains reptiles qui, pendant l’accouplement, tambourine sur la tête de la femelle avec ses membres antérieurs pour l’amener à composition. L’intimidation de la femelle est un procédé encore plus souvent employé ; il s’agit pour le mâle d’effrayer celle-ci en gonflant son corps ou certaines parties de son corps (crapaud, caméléon), en étalant d’énormes lambeaux cutanés ou des replis charnus, en déployant des jabots (oiseaux), en allongeant et en redressant brusquement le museau (observations faites par Darwin sur l'éléphant de mer). Une espèce de phoques (christophora cristata) développe en période d’accouplement une sorte de bonnet dont la dimension est supérieure à celle de la tête qui le porte. Des méthodes bien connues pour apprivoiser la femelle (chats) consistent à rugir et à lui crier dessus. Un procédé analogue est employé par une espèce de lézards de Malaisie, dont le mâle, en période d’accouplement, approche de la femelle le buste dressé tandis qu’une tache noire sur fond jaune rougeâtre apparaît sur sa gorge fortement gonflée. Outre l'intimidation, ce mode de conquête semble également comporter des éléments de fascination en stimulant le sens esthétique ; parmi les plus impressionnants, citons la richesse des couleurs, l’emploi de toutes sortes d’organes sonores, la production de lumière (lucioles), la danse, l’étalement de la queue en éventail et, chez beaucoup d’oiseaux, le chant, le vol, le caquetage séducteur.
La première analogie qui se présente à l’esprit quand on observe ces phénomènes, c’est la ressemblance avec l’hypnose. Mes observations psychanalytiques m’ont amené à distinguer deux manières différentes d’induire l’obéissance hypnotique : l’hypnose maternelle et l’hypnose paternelle19
« Transfert et introjection », Psychanalyse I.. La première agit en paralysant la victime par intimidation ; la seconde par insinuation séductrice. Dans les deux cas, l’hypnotisé régresse au stade de l’enfant impuissant. Le comportement spécifique, d’allure cataleptique, des hypnotisés incite à supposer que cette régression remonte encore plus loin : elle reproduit la situation intra-utérine (Bjerre). La présence si fréquente, parmi les caractères sexuels secondaires du mâle, de la beauté — qui selon moi est une marque de féminité — et le fait que le mâle assume si souvent la fonction féminine de bercer et d’endormir, n’ont pas de quoi surprendre, compte tenu de la bisexualité générale des individus qui se reproduisent par voie sexuée. Nous supposons donc que c’est la régression hypnotique à la situation intra-utérine qui étourdit la femelle au moment de la conquête et que la reproduction fantasmatique de cette situation bienheureuse lui fournit une compensation pour avoir à subir l’acte sexuel qui en soi est pénible. Si, en accord avec les zoologistes, nous classons parmi les caractères sexuels secondaires toutes les parties du corps qui présentent un caractère sexuel mais ne participent pas à la fonction de sécrétion des glandes génitales, nous devons, en tout état de cause, classer parmi ceux-ci les organes d’accouplement, c’est-à-dire le pénis et le vagin. En effet, il nous semble que l’exhibition des organes sexuels, pénis en érection ou vagin ouvert, produisent par eux-mêmes un effet de fascination, éveillent chez le partenaire spectateur le fantasme de la situation intra-utérine.
Parmi les armes de la séduction, certaines odeurs présentent une importance particulière. Nous connaissons le rôle que joue l’odeur de valériane chez les chats au moment de l’accouplement ; nous connaissons l’odeur du bouc et du musc ; ou la force attractive du papillon femelle qui lui permet d’attirer jusque dans la ville les mâles se trouvant à plusieurs kilomètres de distance dans les champs. Mais indubitablement, même sur les animaux supérieurs l’odeur spécifique de l’organe sexuel femelle produit un effet excitant, peut-être parce qu’elle éveille l’aspiration à la situation intra-utérine. Le lapin domestique, par exemple, devient impuissant si l’on sectionne ses nerfs olfactifs. Nous ne pouvons négliger le fait que les toutes premières impressions sensibles, et qui sont pour cette raison importantes pour toute la vie, atteignent l’enfant au cours de la naissance, c’est-à-dire dans les voies génitales et à leur voisinage (Groddeck).
Jusqu’à présent on a fort peu observé le comportement psychique des partenaires au cours des émotions vécues pendant l’acte sexuel. Comme si l’homme détenait ses plus grands secrets dans ces affects : un sentiment de honte quasi insurmontable l’empêche d’en communiquer quoi que ce soit. Même au cours de l’exploration psychanalytique où le patient est invité à exprimer tous ses sentiments, c’est tout à la fin seulement qu’il apprend à décrire également le processus subjectif d’excitation vécu dans l’acte sexuel, alors que depuis longtemps il s’était habitué à parler sans réticences du processus objectif. Ce que j’ai pu, occasionnellement, apprendre à ce sujet est que d’un bout à l’autre l’individu est dominé par une sorte d’attraction contraignante qui le jette vers le partenaire ; il s’efforce de diminuer par tous les moyens la distance entre son partenaire et lui-même (voir la tendance soulignée au début à « jeter un pont » par le baiser, l’étreinte). Nous sommes amené à affirmer que cette attirance mutuelle ne fait qu’exprimer le fantasme de se souder véritablement au corps du partenaire, ou peut-être d’y pénétrer tout entier (en tant que substitut de l’utérus maternel) ; l’union sexuelle n’est qu’une réalisation partielle de cette intention. La tension éprouvée par les partenaires pendant la durée de l’acte est en soi pénible, et seul l’espoir du dénouement proche finit par la rendre voluptueuse. Cette tension pénible ressemble à bien des égards à l'angoisse ; nous savons d’ailleurs, depuis Freud, que l’angoisse répète toujours la sensation de déplaisir éprouvée lors du choc de la naissance.
Il semble que nous ayons à nous habituer à l’idée de la surdétermination d’un seul et même processus comme la psychanalyse nous l’apprend en ce qui concerne les processus psychiques. À mesure que nous approfondissons l’étude du déroulement du coït, il devient évident qu’il ne s’agit pas seulement d’un processus chargé de plaisir (la représentation de la bienheureuse situation intra-utérine) mais aussi de la répétition d'expériences pénibles (probablement la première expérience d'angoisse, celle de la naissance). Il est plus probable encore que ces affects ne se manifestent pas sans ordre, mais selon une succession historiquement déterminée. Il s’ensuit que l’accroissement de la tension pénible et son point culminant dans la satisfaction orgastique, représentent simultanément deux tendances de sens opposé : la répétition de l’expérience pénible de la naissance et de son heureux dénouement, et le rétablissement de la situation intra-utérine encore parfaitement paisible en pénétrant à nouveau dans le sein maternel.
Les phénomènes physiques les plus frappants parmi ceux qui accompagnent ces émotions concernent la respiration et la circulation sanguine des deux partenaires. Il existe une dyspnée manifeste et le pouls est accéléré ; c’est seulement après l’orgasme que s’établit une respiration plus profonde, satisfaisante, et que s’apaise l’activité cardiaque. Ces troubles semblent représenter l’équivalent de la remarquable performance d’adaptation qu’exige le passage du mode d’oxygénation fœtal à la respiration extra-utérine. Peut-on pousser la comparaison entre le coït et le processus de la naissance jusqu’à voir dans le rythme de l’accouplement la répétition abrégée de la périodicité des douleurs de l’accouchement ? Je ne saurais pour le moment en décider20
La proche parenté entre angoisse et libido constitue une des thèses fondamentales de Freud. Dès ses premières communications psychanalytiques Freud souligne que les symptômes de la névrose d’angoisse et des émois du coït sont de même nature..
Notons encore que le coït s’accompagne aussi d’impulsions agressives manifestes. Cette composante, dont nous avons suivi le cheminement jusqu’à la génitalité dans le chapitre consacré au développement du sens de réalité érotique, s’exprime au cours de l’acte sexuel par des manifestations musculaires d’intensité croissante qui n’ont pas seulement pour but de retenir l’objet d’amour, mais possèdent aussi quelques traits sadiques évidents (mordre, griffer). Les premières manifestations vitales du nouveau-né font aussi apparaître que le choc traumatique vécu au cours de la naissance et en particulier la compression subie dans le canal obstétrical éveille non seulement de l’angoisse mais aussi de la colère, et celle-ci se répète dans le coït21
Il se peut que le sentiment de rage impuissante soit partie intégrante de l’angoisse. (Rapprocher cette conception du sadisme et le chapitre relatif à la satisfaction sexuelle dans le livre de Rank : Le traumatisme de la naissance, Petite Bibliothèque Payot.).
L’état des partenaires est caractérisé pendant l'orgasme et après par un rétrécissement considérable ou même une abolition complète de la conscience (normalement, même dans la période précédant l’orgasme, l’activité psychique consciente se bornait à la volonté d’atteindre le but sexuel). Les exemples pris dans le règne animal mettent encore plus nettement en évidence la concentration sur la sensation de satisfaction ; là en effet il arrive même que la sensibilité douloureuse soit entièrement abolie. Certaines espèces de lézards se laissent mettre en pièces plutôt que d’interrompre l’acte sexuel ; il y a des salamandres que même la mutilation ne dérange pas dans leur accouplement. Le lapin domestique, pendant l’orgasme, tombe dans un état proche de la catalepsie puis, inconscient, il s’effondre et, le pénis maintenu dans le vagin de la femelle, il reste étendu pendant un long moment, immobile, auprès d’elle. Nous ne faisons qu’être conséquents en considérant cet état, ainsi que le sentiment de satisfaction parfaite et l’absence totale de désirs qui l’accompagnent, comme étant le but du coït qui, pour l’individu tout entier, signifie qu’il a réalisé l’existence intra-utérine inconsciemment, sur le mode hallucinatoire ; mais en même temps, pour l’organe génital et pour les cellules germinales, cela signifie la réalisation à la fois symbolique et réelle de ce but. Probablement l’heureuse victoire sur le traumatisme de la naissance s’exprime également par la même occasion. — Nous allons bientôt parler un peu plus en détail des variations d’investissement supposées se produire au cours de l’orgasme, mais contentons-nous, provisoirement, de cette description.
Pour terminer, je tiens encore à signaler le rapport étroit qui existe entre l’accouplement et le sommeil, tant chez l’homme que dans de nombreuses espèces animales. C’est en parfait accord avec nos prévisions théoriques, puisque nous considérons aussi bien le sommeil que l’acte sexuel comme des régressions à la vie intra-utérine. Nous reprendrons en détail ces analogies et les différences qui existent entre les deux phénomènes ; constatons seulement ici que beaucoup d’animaux, mais également l’homme, succombent volontiers au sommeil après le coït. Nos expériences psychanalytiques nous apprennent que la plupart des cas d’insomnie d’origine psychique peuvent être ramenés à des troubles de la fonction génitale et ne guérissent que si ces troubles peuvent être supprimés.
5. La fonction génitale individuelle
On peut se demander à présent si cette étude du déroulement et de l’évolution ontogénétique du coït permet aussi d’aborder le sens de ce processus qui se répète avec une uniformité si remarquable dans une grande partie du monde animal.
Du point de vue purement biologique, nous considérons le coït comme un acte de décharge périodique dont le but est de réduire la tension libidinale qui s’accumule tout au long de la vie de l’individu, tension libidinale qui accompagne toute activité non érotique des organes et se déplace « amphimictiquement » des divers organes sur l’appareil génital. Tous les organes interviennent donc dans les processus de l’accouplement, mais plus particulièrement toutes les quantités et toutes les formes de la libido insatisfaite des zones érogènes et stades d’organisation dépassés à l’âge adulte. Sans se prononcer sur la nature du processus physiologique en question, rappelons la similitude entre l’aboutissement final des fonctions d’accouplement et de sécrétion et supposons que se trouvent condensées dans les processus d’érection et d’éjaculation (ébauchés également dans l’acte génital féminin) toutes les tendances à l’autotomie dont la réalisation a été abandonnée au profit de la « fonction d’utilité ». Un être vivant disposant d’une fonction génitale évoluée est capable d’une meilleure adaptation aux tâches de l’existence, même dans ses activités non érotiques ; il peut différer ses satisfactions érotiques pendant assez longtemps pour que celles-ci ne troublent pas la fonction de conservation. Nous pouvons donc dire que l’appareil génital est en même temps un organe « utile » qui favorise les visées de la fonction de réalité.
Nous n’avons que des idées fort imprécises quant aux modifications d’investissement qui suivent la satisfaction génitale et nous ne pouvons émettre une opinion un peu plus concrète que sur l’aspect psychologique du processus orgastique. Tout se passe comme si, dans les conditions du coït, une tension parvenue à un très haut degré d’intensité s’apaisait soudainement et avec une extrême facilité, de sorte que la mobilisation intense des énergies d’investissement devient brusquement inutile. C’est la source de ce puissant sentiment de bonheur, qui peut donc être ramené, tout comme le plaisir que procure le mot d’esprit, à l’économie en énergie d’investissement (Freud)22
La jouissance que procure le chatouillement résulte de cette même économie. Nous pouvons d’ailleurs supposer que la plupart des zones chatouilleuses sont « génitalisées », en particulier le creux de l’aisselle.. Parallèlement à ce sentiment, on peut imaginer un reflux « génitofuge » de la libido vers les divers organes, pendant de ce flux « génitopète » qui, dans la phase de tension, a entraîné les excitations des divers organes vers l’appareil génital. C’est au moment où la libido se déverse de l’organe génital vers l’organisme psycho-physique tout entier que naît la « sensation de bonheur » qui récompense les organes de leur bon fonctionnement et les incite en même temps à de nouvelles performances23
Cette idée d’un flux génitopète de la libido, et l’inversion de celui-ci pendant l’orgasme, a déjà été mentionnée par l’auteur au cours de la « Discussion sur l’onanisme » à Vienne, en 1912..
La satisfaction orgastique correspond en quelque sorte à la génitalisation explosive de l'organisme tout entier, à l’identification totale de tout l’organisme avec l’organe d’exécution sous l’effet de la friction.
Si séduisante que soit cette conception du processus d’accouplement du point de vue de l’économie psycho-physique, elle ne suffit toujours pas à expliquer pourquoi, dans une si grande partie du monde animal, l’accumulation et la décharge de l’énergie sexuelle ont pris justement cette forme. Tant que cette question restera sans réponse, nous ne pourrons pas avoir le sentiment de disposer d’une explication suffisante. La psychanalyse nous a appris que nous pouvons pallier cette insuffisance, du moins en ce qui concerne les processus psychiques, en complétant l’aspect purement ontologique (descriptif-économique) par l’aspect historico-génétique. Ainsi nous avons essayé — comme déjà précédemment pour les divers modes de manifestation du sens de réalité — de ramener les manifestations pulsionnelles de la sexualité à la tendance à rétablir la situation pré-natale, sorte de compromis entre cette tendance, en apparence complètement abandonnée dans la vie réelle, mais en fait seulement mise à l’écart, et les obstacles qu’elle rencontre dans la réalité. Ainsi les phases du développement sexuel telles que Freud les a décrites apparaissent comme des tentatives constamment répétées en vue d’atteindre ce but, tandis que l’organisation génitale elle-même correspond à un aboutissement final, quoique partiel, de l’exigence pulsionnelle. Or il semble que cette satisfaction pulsionnelle ne puisse atteindre son but directement, mais qu’elle soit constamment appelée à reproduire l’histoire de son propre développement, y compris la lutte adaptative, en elle-même pénible, qui est imposée à l’individu par la perturbation d’une situation antérieure agréable. La première et la plus intense lutte adaptative dans la vie d’un individu est constituée par l’expérience traumatique de la naissance et le travail d’adaptation imposé par la nouvelle situation. Nous supposons donc que le coït ne représente pas seulement un retour — mi-fantasmé, mi-réel — dans le sein maternel, mais traduit aussi par ses symptômes l’angoisse de la naissance et la victoire remportée sur celle-ci, c’est-à-dire l’heureuse issue de la naissance. Il est vrai qu’au cours du coït des dispositifs appropriés veillent à ce que l’angoisse ne dépasse pas un certain degré ; et encore plus de sollicitude se trouve déployée pour que l’atteinte soudaine et quasi complète du but de la satisfaction (l’utérus de la femme) transforme cette angoisse en plaisir intense.
Nous pouvons rapprocher cette hypothèse des exemples que Freud utilise pour illustrer la compulsion de répétition dans son ouvrage « Au delà du principe de plaisir » (1921). Cette analogie prend peut-être encore plus de valeur du fait qu’elle aboutit à un résultat identique à partir d’hypothèses entièrement différentes.
Freud explique certains symptômes de la névrose traumatique et aussi certaines particularités du jeu de l'enfant par la compulsion à décharger progressivement, par petites doses multipliées, les quantités d’excitation non liquidées et que leur intensité ne permet pas de liquider « en bloc ». Nous aussi, nous considérons que le coït représente la décharge partielle de l’« effet de choc » du traumatisme de la naissance qui n’a pas encore été liquidé ; mais en même temps nous y voyons aussi un jeu ou, plus exactement, une fête commémorative célébrant l’heureuse délivrance d’une situation difficile, et enfin, le déni du traumatisme par une hallucination négative.
Nous sommes incapables de donner une réponse cohérente à la question soulevée par Freud, à savoir si cette répétition constitue une contrainte ou bien un plaisir, si elle se situe en deçà ou au-delà du principe de plaisir, du moins en ce qui concerne la pulsion d’accouplement. Nous pensons que dans la mesure où elle correspond à la liquidation progressive de l’effet de choc, c’est une contrainte, c’est-à-dire une réaction d’adaptation imposée par une perturbation exogène. Mais dans la mesure où elle représente le déni hallucinatoire-négatif de la perturbation en question, ou une fête commémorant cette victoire, nous avons affaire à des purs mécanismes de plaisir.
De nombreux indices portent à croire que les forces pulsionnelles sont inégalement reparties entre le soma et le germen, comme si la majeure partie des pulsions non résolues s’était accumulée dans le germen ; la compulsion de répétition traumatique émanerait donc essentiellement de celui-ci, débarrassant ainsi l’individu à chaque répétition (ou chaque coït) d’une fraction du déplaisir. Nous sommes fortement tentés de ramener la tendance auto-castratrice qui se manifeste dans l’acte génital à la tentative d’expulser du corps, en totalité ou par fractions, la sécrétion génitale qui est cause de la sensation de déplaisir. Mais en même temps le coït prend également à son compte la satisfaction individuelle du soma, c’est-à-dire la liquidation des traumatismes mineurs subis au cours de l’existence, en les surmontant avec une aisance enjouée.
C’est dans ce caractère ludique que nous voyons l’élément de jouissance pure de la satisfaction génitale ; cela nous permet finalement de formuler une opinion d’une portée un peu plus générale quant à la psychologie de l'érotisme.
On sait que la plupart des activités pulsionnelles sont déclenchées par des perturbations qui atteignent l’organisme de l’extérieur, ou bien qui naissent de modifications internes, également perturbantes. Par contre en ce qui concerne les pulsions ludiques, parmi lesquelles nous pouvons aussi classer, dans un certain sens, les pulsions érotiques, c’est la pulsion elle-même qui suscite un déplaisir, dans le seul but de jouir ensuite de son interruption.
Ce qui caractérise donc la tendance ludique et l’érotisme, c’est qu’à l’opposé des autres cas où la situation de déplaisir survient à l’improviste, premièrement le déplaisir n’est autorisé que selon un dosage connu et mesuré, deuxièmement les modalités défensives sont prévues d’avance et souvent même à un degré excessif. Dans ce sens, je serais tenté de considérer la faim, par exemple, comme un instinct simple qui vise à faire cesser la sensation de déplaisir provoquée par la privation physique, et l’appétit comme son parallèle érotique ; car, dans le cas de l’appétit, cette petite privation jointe à l’assurance d’une satisfaction correspondante doit plutôt compter pour un plaisir préliminaire. Nous supposons donc que les organisations sexuelles, en particulier les fonctions d’accouplement, se sont elles aussi constituées si ingénieusement que l’on puisse à coup sûr compter sur la satisfaction. Donc la sexualité aussi ne fait que jouer avec le danger. Selon notre description, dans la sexualité génitale toute la tension sexuelle de l’organisme est convertie en sensation de prurit des organes génitaux24
Le processus inverse serait la conversion hystérique, le déplacement de l’excitation génitale à l’innervation afférente à d’autres parties du corps. dont il est extrêmement facile de se débarrasser ; mais en même temps la tendance de l’organisme tout entier à régresser vers l’utérus maternel est également déplacée sur une partie du corps, l’organe génital, par l’intermédiaire duquel elle peut se réaliser sans difficulté.
Le coït rappelle donc ces mélodrames où les nuages menaçants s’accumulent comme dans une véritable tragédie, mais où l’on a toujours l’impression « que tout finira bien malgré tout »25
J’ai eu le plaisir de retrouver cette même conception de l’érotisme dans le bel ouvrage d’Ossipow : Tolstoï's Kinderheitserinnerungen (1923) (Souvenirs d’enfance de Tolstoï). Il compare lui aussi l’angoisse du plaisir sexuel à l’appétit, en les opposant aux véritables privations comme par exemple la faim..
Le seul motif qui peut justifier à notre avis cette répétition ludique est le souvenir d’avoir été heureusement délivré d’un déplaisir, que Freud évoque également comme étant un des motifs du jeu de l’enfant. Le fait pour l’être humain d’avoir réussi à survivre au danger impliqué par la naissance et la joie d’avoir trouvé la possibilité d’exister même à l’extérieur du corps de la mère, restent mémorables à tout jamais. C’est ce qui l’incite à reproduire périodiquement des situations dangereuses similaires mais atténuées, pour le seul plaisir de jouir encore de les avoir écartées. Il se peut que le retour temporaire dans le sein maternel tel qu’il est vécu dans le coït et, simultanément, la répétition et la domination ludiques de tous les dangers inhérents à la naissance et à la lutte d’adaptation à la vie, aient un effet vivifiant au même sens que la régression quotidienne du sommeil. Le règne périodiquement autorisé du principe de plaisir apporte consolation à l’être vivant engagé dans une lutte difficile et lui donne la force de poursuivre son effort.
C’est à une expérience psychanalytique que je dois essentiellement, je le reconnais, mon obstination à maintenir la régression à l’utérus maternel au centre de la théorie, malgré toutes les difficultés de conceptualisation qu’elle implique. Il est frappant de constater avec quelle constance les formations psychiques les plus diverses (rêve, névrose, mythe, folklore, etc.) représentent par un même symbole le coït et la naissance : être sauvé d'un danger, surtout de l’eau (liquide amniotique) ; de même, avec quelle régularité elles expriment les sensations éprouvées pendant le coït et dans l’existence intra-utérine par les sensations de nager, de flotter, de voler ; et enfin, l’identité symbolique qu’on y trouve entre l'organe génital et l'enfant26
Si un jour notre hypothèse se confirmait, elle apporterait aussi quelque lumière sur la genèse des symboles. Un vrai symbole aurait valeur de monument historique, serait un précurseur historique de modes d'agir appartenant à une époque révolue, donc des restes mnésiques auxquels nous sommes enclins à revenu, tant sur le plan psychique que physique..
Nous pensons avoir livré ainsi le sens complet de l’acte génital dont l’orgasme constitue le point final. Lorsque la tension libidinale, généralement restreinte au seul organe génital, rayonne brusquement dans tout l’organisme, celui-ci, pour un instant, non seulement partage le plaisir des organes sexuels mais encore jouit à nouveau du bonheur intra-utérin.
Donc, selon notre conception, l’accouplement résume en un seul acte toute une série de séquences chargées de plaisir et d’angoisse. D’une part, le plaisir d’être libéré d’excitations pulsionnelles gênantes, le plaisir de retourner dans le ventre maternel, le plaisir d’un heureux dénouement de la naissance ; d’autre part, l’angoisse qu’on a éprouvée au cours de la naissance et celle qu’il faudra revivre pendant le retour (fantasmé). Comme le retour se limite en réalité à l’organe génital et au sperme, tandis que le reste du corps peut préserver son intégrité (et ne participe à la régression que sur le mode « hallucinatoire »), il devient possible d’éliminer de l’orgasme tout élément d’angoisse et de terminer le coït avec un sentiment de pleine satisfaction.
Le point obscur dans notre raisonnement reste incontestablement la curieuse combinaison entre le plaisir de la satisfaction et la fonction de conservation de l’espèce que présente l’acte d’accouplement. Il faut admettre que l’ontogenèse de l’individu n’en fournit pas d’explication satisfaisante. Voyons à présent si le parallèle phylogénétique, prudemment évité jusqu’ici, ne pourrait pas nous faire avancer quelque peu.
B. Partie phylogénétique
6. Le parallèle phylogénétique
D’avance je vous prie d’excuser l’audace de cette irruption dans un domaine scientifique qui m’est étranger et je soulignerai d’emblée que ce ne sont pas des faits d’ordre biologique qui m’ont amené à formuler l’idée d’une catastrophe individuelle de la naissance et de sa répétition dans le coït, mais encore une fois, uniquement l’expérience psychanalytique, plus particulièrement celle qui a trait au domaine du symbolisme. Si on accepte le présupposé, confirmé par d’innombrables observations, que des fragments entiers d’histoire perdue ou inaccessible autrement sont conservés à la manière des hiéroglyphes dans les formes d’expression symboliques ou indirectes du psychisme et du corps, on peut comprendre et pardonner que nous osions appliquer aux grands mystères de la genèse de l’espèce cette méthode de déchiffrage qui a fait ses preuves dans le domaine de l’histoire individuelle. Notre maître Freud, lorsqu’il se livrait à des tentatives de cet ordre, avait l’habitude de répéter qu’il n’y avait nulle honte à se fourvoyer au cours de telles excursions dans l’inconnu. Au pire, on dressera ensuite des poteaux indicateurs le long des voies que nous avons empruntées pour épargner à d’autres des erreurs semblables.
Disons d’emblée que le point de départ de toutes les spéculations qui vont suivre a été la fréquence extraordinaire avec laquelle dans les manifestations des organisations psychiques normales et pathologiques les plus variées, dans les productions du psychisme individuel et collectif, le symbole du poisson ou, plus exactement, l’image d’un poisson flottant ou nageant dans l’eau, exprime à la fois l’acte sexuel et la situation intra-utérine. À propos d’une observation de ce genre particulièrement impressionnante, une idée fantastique a germé dans mon esprit : se pourrait-il qu’en plus de la ressemblance purement extérieure entre les situations du pénis dans le vagin, de l’enfant dans le ventre maternel, du poisson dans l’eau, ce symbolisme exprime également une part de connaissance phylogénétique inconsciente du fait que nous descendons des vertébrés aquatiques ? Car, ainsi que nous l’avons appris à l’université, l’homme descend effectivement du poisson et l’on honore le fameux « amphioxus lanceolatus » comme l’ancêtre de tous les vertébrés, donc également de l’homme.
Dès que cette idée eut pris naissance, des arguments — certes encore extrêmement hasardeux — n’ont cessé d’affluer de toutes parts. Qu’en serait-il, avons-nous pensé, si toute l'existence intra-utérine des mammifères supérieurs n'était qu'une répétition de la forme d'existence aquatique d'autrefois et si la naissance elle-même représentait simplement la récapitulation individuelle de la grande catastrophe qui, lors de l’assèchement des océans, a contraint tant d’espèces animales et certainement nos propres ancêtres animaux, à s’adapter à la vie terrestre et, tout d'abord, à renoncer à la respiration branchiale pour développer des organes propres à respirer de l'air. Et si le grand maître Haeckel a eu le courage de formuler la loi biogénétique fondamentale selon laquelle le développement embryonnaire (« palingenèse ») reproduit en raccourci toute l’évolution de l’espèce, pourquoi ne pas faire un pas de plus et supposer que le développement des annexes protectrices de l’embryon (qu'on a toujours considéré comme l’exemple classique de la « cœnogenèse ») recèle également une part d'histoire de l’espèce : l'histoire des modifications de ces milieux où ont vécu les ancêtres esquissés par l’embryogenèse. Lorsque je me suis mis par la suite à feuilleter les ouvrages sur l’histoire de l’évolution, j’ai constaté que des idées similaires avaient déjà été exprimées par Oken, philosophe naturaliste contemporain de Gœthe, mais que ses successeurs plus éclairés, notamment Haeckel lui-même, les avaient énergiquement rejetées. Selon Haeckel, seules les phases évolutives de l’embryon lui-même possèdent la valeur de documents historiques, mais non ceux des dispositifs de protection embryonnaire dont les modifications traduisent une évolution continue. Notre conception est à l’opposé de cette thèse ; nous estimons que le dispositif de protection embryonnaire ne constitue pas une formation entièrement nouvelle, « cœnogénétique », mais qu’il s’agit ici encore d’une répétition : la récapitulation de tous les changements qui se sont produits dans l’environnement au cours de l’évolution de l’espèce. Nous pensons donc qu’il existe un parallèle entre la phylogenèse et non seulement l’ontogenèse, mais aussi l’évolution de la protection embryonnaire ou « périgenèse ». (Parallèle onto-, phylo- et périgénétique.)
Des idées semblables à celles que nous venons d’exprimer, nous en retrouvons — sous forme de comparaisons et d’images poétiques — dans les écrits pleins d’imagination et d’esprit de Bölsche, auteur populaire bien connu qui n’est pourtant pas encore apprécié à sa juste valeur comme penseur original. Cependant, dans un petit essai psychanalytique publié il y a quelque temps, nous soutenions que ce type de comparaisons jaillissait des profondeurs de la connaissance inconsciente27
« Analyse des comparaisons », Psychanalyse II.. Aussi sommes-nous amenés à supposer que Bölsche, par ailleurs disciple et apôtre fidèle de Haeckel, ne partage pas en ce domaine les opinions de son maître. Parlant de l’organe génital masculin, il écrit : « Il y a aussi du passé dans cet organe. C’est un organe-Mélusine. Par cet organe, l’être humain entretient encore sa parenté avec le poisson, son lointain ancêtre à l’aurore des temps. » Il ne s’attarde d’ailleurs pas à cette comparaison ; il considère que l’origine de cet accessoire n’est qu’une question accessoire (Anhängselsache), opinion que nous ne partageons pas. Mais ailleurs, en parlant de la salamandre, un des premiers animaux qui passent leur période embryonnaire dans le corps maternel, il dit : « Le corps maternel devint la mare de la salamandre ; c’est dans le corps de la mère qu’elle vit toute sa phase branchiale. » Mais, en fait, ceci revient à admettre la conception que nous avons formulée comme étant le complément périgénétique de la loi biogénétique, c’est-à-dire à considérer les organisations protectrices intra-utérines de l’embryon comme l’équivalent du mode de vie aquatique du poisson.
Certains détails du symbolisme des rêves et des névroses suggèrent l’existence d’une analogie symbolique profonde entre le corps maternel et l’océan d’une part, la terre-mère « nourricière » d’autre part. Il est possible que ce symbolisme exprime d’abord le fait que l’homme, en tant qu’individu, est avant sa naissance un endoparasite aquatique et après sa naissance, pendant un bon moment, un ectoparasite aérien de la mère, mais aussi que, dans l’évolution des espèces, la terre et l’océan jouaient réellement le rôle de précurseurs de la maternité et tenaient eux-mêmes lieu d’organisations protectrices en enveloppant et en nourrissant ces ancêtres animaux. Dans ce sens, le symbolisme marin de la mère a un caractère plus archaïque, plus primitif, tandis que le symbolisme de la terre reproduit cette période plus tardive où le poisson, rejeté à terre par suite de l’assèchement des océans, devait se contenter de l’eau filtrant des profondeurs de la terre (dont en même temps il se nourrissait) ; dans ce milieu favorable, il a pu végéter, pour ainsi dire en parasite, le temps nécessaire pour accomplir sa métamorphose en amphibien. Il s’agit ici d’un « changement de signification » du symbolisme, qui recèle, tout comme les changements de signification verbale en linguistique, une part d’histoire, en l’occurrence, un chapitre important de l’histoire de l’espèce. Le symbolisme de la charrue, par exemple, où la psychanalyse voit le dépôt d’expériences anciennes appartenant à l’histoire de la civilisation, ou le symbolisme de branches qu’on casse ou de fruits qu’on arrache (comme dans la Genèse par exemple), recouvrent une identification entre la terre labourée et féconde et la mère. Beaucoup de mythes primitifs portant sur la création du monde qui représentent la terre émergeant des océans comportent des traits qui permettent d’interpréter cette cosmogonie comme une figuration symbolique de la naissance. Mais le matériel psychanalytique quotidien apporte aussi des exemples convaincants du symbolisme maternel de la terre et de l’eau. Dans la biographie de beaucoup d’enfants on retrouve le fait du transfert à la terre de l’amour pour la mère interdit par suite du complexe d’Œdipe ; l’enfant effectue des tentatives de coït sur des trous creusés dans la terre ou essaye de parvenir à une régression complète en se cachant dans des trous. Je n’oublierai jamais le cas d’un jeune homosexuel indissolublement fixé à sa mère qui, jusque dans l’adolescence, restait pendant des heures allongé au fond d’une baignoire remplie d’eau et, pour pouvoir se maintenir dans cette situation rappelant l’existence archaïque aquatique, respirait par un tuyau émergeant de l’eau, qu’il tenait dans sa bouche.
Dans un chapitre précédent nous avons déjà interprété le fait d’être sauvé de l’eau ou de flotter dans l’eau comme une représentation de la naissance ou du coït — interprétation d'ailleurs courante en psychanalyse ; mais une interprétation phylogénétique nous paraît également nécessaire. Tomber à l’eau est encore une fois le symbole le plus archaïque, celui du retour dans l'utérus maternel ; tandis qu’être sauvé de l’eau met l’accent sur l'épisode de la naissance, c’est-à-dire de la sortie à terre. Nous sommes très tentés d’interpréter les légendes de déluge comme un renversement de l’état de fait réel, phénomène fréquemment observé en psychanalyse. La première grande menace qui s’est abattue sur les animaux, tous aquatiques à l’origine, n’était pas le déluge, mais la menace d’assèchement. Donc l’émergence des eaux du Mont Ararat, contrairement à ce qui est raconté dans la Bible, ne serait pas seulement le sauvetage, mais également la catastrophe originelle ; c’est sans doute plus tard que le mode de penser des terriens a déformé ce fait. Naturellement le psychanalyste n’a aucune peine à reconnaître dans l’Ararat, la terre, un double de l'Arche de Noé selon une couche plus profonde du symbolisme, l’une comme l’autre constituant une représentation du corps maternel dont tout animal supérieur tire son origine. Ajoutons seulement que ce matériel mythique demande lui-même une interprétation supplémentaire d’un point de vue phylogénétique28
Évoquons ici également le sauvetage des Juifs qui ont traversé la mer Rouge sans se mouiller les pieds..
Une telle interprétation supplémentaire paraît s’imposer à présent en ce qui concerne les explications proposées dans les chapitres précédents. En effet, celles-ci présentent les divers processus du coït comme des actions symboliques, par lesquelles l’individu revit le plaisir de l’existence intra-utérine, l’angoisse de la naissance et enfin la joie renouvelée d’échapper heureusement à ce danger. En s’identifiant à la verge pénétrant dans le vagin et aux spermatozoïdes se répandant dans le corps de la femme, l’individu reproduit aussi symboliquement le danger mortel que ses ancêtres animaux ont victorieusement surmonté, grâce à un environnement favorable, lors de la catastrophe géologique de l’assèchement des océans.
Pour le moment, cette hypothèse s’appuie sur une simple déduction de symboles. Si nous admettons que le poisson dans l’eau représente, comme dans tant de rites magiques de fécondation, l’enfant dans le sein de la mère, et si dans les rêves nous sommes si souvent amenés à interpréter l’enfant comme un symbole pénien, alors la signification du poisson figurant le pénis, mais aussi celle du pénis figurant le poisson devient plus facile à comprendre, c’est-à-dire l’idée que, dans le coït, le pénis ne représente pas seulement le mode d’existence natale et pré-natale de l’homme, mais aussi les luttes de l'ancêtre animal qui a vécu la grande catastrophe de l'assèchement.
L’embryologie et la zoologie comparée fournissent deux arguments solides en faveur de cette hypothèse qui, à première vue, paraissait très audacieuse. L’embryologie nous apprend que seuls les animaux terrestres développent des membranes amniotiques renfermant du liquide amniotique pour protéger l’embryon ; quant à la zoologie comparée, elle permet de constater que les espèces animales dont les embryons se développent sans membranes amniotiques (anamnie) ne présentent pas d’accouplement proprement dit, la fécondation et le développement de l’œuf fécondé se faisant en dehors du corps maternel, la plupart du temps librement, dans l’eau. Ainsi chez les poissons nous ne trouvons que quelques tentatives sporadiques de fécondation interne ; l’évolution continue et ininterrompue de l’organe d’accouplement ne commence que chez les amphibiens et celui-ci n’atteint l’érectilité caractéristique des mammifères que chez quelques reptiles. La possession de véritables organes génitaux, le développement à l’intérieur du corps maternel et la survie à la grande catastrophe d’assèchement constituent donc une entité biologique inséparable ; on pourrait y voir la cause dernière de l’identité symbolique qui existe entre le ventre maternel, l’océan et la terre d’une part et par ailleurs entre la verge, l’enfant et le poisson.
Les darwiniens objecteront sans doute que la survivance des seules espèces qui ont su s’adapter organiquement à la vie terrestre va de soi et que l’apparition de la protection embryonnaire peut être attribuée à la survie de la meilleure variété selon le principe de la sélection naturelle ; nous leur répondrons que le psychanalyste se sent plus attiré par le mode de penser de Lamarck, plus centré sur la psychologie dans la mesure où il reconnaît également un rôle aux tendances et aux motions pulsionnelles dans la phylogenèse, alors que le grand naturaliste britannique ramène tout à la mutation, donc finalement au hasard. La conception darwinienne n’explique pas non plus cette répétition des formes et des modes de fonctionnement anciens dans les nouveaux produits de l’évolution, répétition que l’on retrouve partout dans la nature. Selon toute probabilité, cette conception rejetterait la notion de régression, dont la psychanalyse ne peut se passer. Maintenons donc, sans nous laisser troubler par cette conception, notre hypothèse, à savoir que dans la génitalité s’expriment non seulement les souvenirs de la catastrophe ontogénétique, mais aussi ceux des catastrophes phylogénétiques, qui parviennent même peut-être ainsi à une abréaction après coup.
7. Données relatives à la « régression thalassale »
Ne nous facilitons pas la tâche à l’excès ; énumérons, même si c’est dans un ordre peu rigoureux, les arguments qui nous paraissent plaider en faveur de l’attrait de la régression thalassale, c’est-à-dire la notion d’un désir de retourner à l’océan abandonné aux temps primitifs ; et surtout, les arguments qui paraissent renforcer la thèse selon laquelle cette force pulsionnelle, ou plus exactement cette attraction29
Le mot « pulsion » accentue l’aspect adaptatif, le caractère d’adéquation du fonctionnement organique, alors que le terme « attraction » souligne plutôt le caractère de régression. Naturellement, je partage l’opinion de Freud, à savoir que même les pulsions dirigées vers « l’avant » puisent leur énergie dans la force d'attraction du passé. resurgit et se continue dans la génitalité.
Prenons pour point de départ le parallèle qui existe entre le mode d’accouplement et le développement des organes génitaux d’une part et d’autre part la vie dans la mer puis sur la terre et dans l’air. « Les animaux inférieurs qui déversent simplement leur sperme et leurs ovules dans l’eau où se produira la fécondation » — écrivent Hesse et Doflein dans leur beau livre — « ne présentent, selon nos connaissances, aucun comportement spécifique avant cette décharge. » Mais plus le niveau d’évolution est élevé, ou encore, selon notre conception, plus le passé historique de l’espèce est complexe, plus efficaces seront les mesures prises pour assurer la survie des cellules germinales par un milieu favorable. Le fait est que l’évolution des organes génitaux externes commence très brusquement, en même temps que se produit la catastrophe dans l’évolution des Amphibiens. Certes, même ceux-ci ne présentent pas encore d’organe d’accouplement véritable, lequel n’apparaît que chez les Reptiles (lézard, serpent, crocodile, tortue) ; mais dès les grenouilles on rencontre une sorte de coït per cloacam : le cloaque du mâle étant appliqué contre ou introduit dans celui de la femelle. Ces animaux, conformément à leur double mode d’existence aquatique et terrestre, ont encore le choix entre fécondation interne et fécondation externe, ce qui signifie que la fécondation des ovules peut avoir lieu soit dans l’eau, soit dans le corps de la femelle. C’est également ici qu’apparaissent pour la première fois des caractères sexuels secondaires plus apparents, tels ces durillons sur les membres antérieurs de la grenouille mâle qui lui permettent d’étreindre la femelle. C’est chez le lézard que nous observons le premier prolongement pénien, encore dépourvu de canal, outil perforateur qui émerge du cloaque, et chez le crocodile, comme nous l’avons dit, les premières traces d’érectilité.
Chez le triton mâle il se crée déjà un rapport interne entre l’élimination urétrale et l’éjaculation ; et c’est chez un vertébré primitif, le kangourou, que ce rapport atteint son niveau supérieur pour la première fois : le cloaque se divise enfin en rectum et urètre, le canal d’évacuation commun au sperme et à l’urine traversant, comme chez l’homme, un prolongement pénien érectile.
Cette série évolutive présente une certaine analogie avec les phases de développement du sens de réalité érotique chez l’individu, selon la description que nous en avons donnée au début. Les tentatives, d’abord maladroites, du mâle pour introduire dans les voies génitales de la femelle une partie de son corps ainsi que sa sécrétion génitale, rappellent les tentatives de l’enfant, d’abord maladroites puis de plus en plus déterminées pour obtenir de force, à l’aide de son organisation pulsionnelle érotique, le retour dans l’utérus maternel et revivre, du moins sur un mode partiel et symbolique, la naissance et du même coup « l’annuler » en quelque sorte. Ce point de vue concorde également avec celui de Freud ; en effet, il estime que les divers modes d’accouplement qu’on peut observer dans le règne animal sont comme les modèles biologiques des diverses formes d’expression de la sexualité infantile et des pratiques perverses.
Arrivés à ce point, il nous faut de nouveau laisser libre cours à notre imagination si nous voulons trouver une réponse, fût-elle provisoire, au problème encore sans solution de ce qui a pu inciter les Amphibiens et les Reptiles à se créer un pénis ? (Car, selon notre conception lamarckienne, il n’y a pas d’évolution sans motivation intérieure, pas de changement qui ne corresponde à une adaptation à une perturbation extérieure.) Cette motivation pourrait bien résider dans la tendance à rétablir le mode de vie perdu dans un milieu humide qui contienne également des substances nutritives, autrement dit rétablir l’existence aquatique dans l’utérus maternel humide et riche en nourriture. La mère, selon le « symbolisme inversé » dont l’utilité s’est déjà imposée à nous plusieurs fois, est donc en réalité un symbole et un substitut partiel de l’océan et non l’inverse. Nous l’avons déjà dit, voici comment nous nous représentons les choses : comme les cellules germinales des animaux supérieurs qui périraient sans protection fœtale, comme les rejetons déjà mis au monde qui périraient sans soins maternels, toutes les espèces animales auraient elles aussi péri au moment de la catastrophe d’assèchement si leur survie n’avait pas été assurée au cours de l’adaptation à la vie terrestre, par des circonstances favorables fortuites et les tentatives de régression à la vie ecto- et endo-parasitaire. Enfin, les vertébrés supérieurs ont réussi à organiser la fécondation interne et le développement intra-utérin, combinant ainsi avec succès la forme d’existence parasitaire et le désir de régression thalassale.
On trouve une autre analogie entre le fœtus dans l’utérus et l’animal en milieu aquatique, dans le mode d’approvisionnement en oxygène et en nourriture. Pour couvrir ses besoins en oxygène, le fœtus possède des villosités choriales qui flottent librement dans les lacs sanguins du placenta maternel et effectue ses échanges gazeux par osmose. Ce sont ces villosités choriales (et non les branchies embryonnaires qui ne sont jamais fonctionnelles) qu'on peut assimiler aux organes branchiaux des animaux aquatiques, pour qui l’oxygène provient, également par osmose, d’un milieu liquide et non de l’air comme pour les espèces terrestres. Le placenta embryonnaire constitue donc un organe d’aspiration de nature parasitaire, imitant la respiration branchiale et chargé de pourvoir l’embryon en oxygène (et en nourriture) en attendant que les organes de celui-ci lui permettent de mener une vie terrestre autonome, à l’extérieur du corps maternel. Si nous voulons prendre au sérieux la thèse du « parallèle périgénétique », nous devons supposer l’existence, pendant la période de transition entre la vie océanique et la vie terrestre, d’ancêtres animaux qui ont conservé leur faculté de respirer avec des branchies en attendant que se développent des poumons aptes à fonctionner. De telles espèces ont subsisté jusqu’à nos jours. Ainsi Haeckel écrit : « Entre les Poissons véritables et les Amphibiens s’insère l’étrange classe des poissons pulmonés (Dipnoi, Protopteri). Il n’en reste plus beaucoup de nos jours : le poisson pulmoné d’Amérique en Amazonie (Lepidosiren paradoxa) et le poisson pulmoné d’Afrique (Protopterus annectens) qu'on retrouve dans diverses régions de ce continent. En été, pendant la saison sèche, ces étranges animaux s’enfouissent sous la vase dans un nid de feuilles et respirent alors avec des poumons, comme les Amphibiens. Pendant la saison humide d’hiver, ils vivent dans les rivières et les marais et respirent avec des branchies comme des Poissons. » Haeckel nous apprend aussi que les zoologistes continuent à discuter à perte de vue pour savoir si les poissons pulmonés sont en réalité des Poissons ou des Amphibiens. Lui-même est d’avis qu’ils constituent une classe à part, qui forme transition entre les deux.
On connaît bien l’évolution que va suivre le mode d’adaptation des Amphibiens à la vie terrestre. Les jeunes grenouilles respirent à l’aide de branchies et, à l’état de têtards, nagent dans l’eau comme des poissons ; mais l'individu adulte est déjà un habitant de la terre et respire avec des poumons.
Il suffit de supposer que chez les Mammifères supérieurs la respiration branchiale placentaire est limitée à la période embryonnaire, et nous avons une série évolutive continue qui va du Poisson jusqu’à l’Homme, en passant par l’Amphibien, où la tendance à retourner à l’existence aquatique n’a jamais été complètement abandonnée, même si dans le cas de l’Homme cela se limite à la phase du développement intra-utérin. Ajoutons encore que la tendance régressive thalassale reste active même après la naissance et s’exprime à travers les manifestations de l’érotisme (en particulier l’accouplement), ainsi que dans les états de sommeil, mentionnés à titre complémentaire et étudiés plus à fond dans la suite de ce travail.
Nous ne pouvons guère considérer comme une mutation accidentelle le fait que le développement d’un sac amniotique rempli de liquide en guise d’organe protecteur du fragile embryon, se produise uniquement chez les espèces qui n’ont jamais, dans la vie extra-utérine, respiré avec des branchies (Reptiles, Oiseaux, Mammifères). La psychanalyse, portée à chercher la détermination et la motivation de tout processus biologique et psychique, s’accommode mieux de l’hypothèse selon laquelle le liquide amniotique figure l'océan « introjecté » dans le corps maternel, où, comme dit l’embryologiste R. Hertwig, « le faible et fragile embryon nage et remue et se déplace comme le poisson dans l’eau »30
Rappelons que pendant le coït la décharge émotionnelle passe par des variations très manifestes de la respiration, fait que nous avons mis en rapport avec la dyspnée qui se produit au moment de la naissance ; nous pourrions maintenant étendre également tout cela à la lutte primitive pour l’oxygène..
Je peux compléter ces idées par quelques faits dignes de retenir l’attention, tout en laissant au lecteur le soin de décider s’il faut y voir des bizarreries insignifiantes ou bien les classer parmi les arguments en faveur de notre conception. Hertwig dit, parlant du développement du sac amniotique de la poule : « Au début du développement, le sac amniotique est petit, mais peu à peu il grandit, sa croissance restant proportionnelle à celle de l'embryon, et il contient une grande quantité de liquide. En même temps, sa paroi devient contractile. Certaines cellules de sa membrane cutanée se transforment en fibres contractiles qui, à partir du cinquième jour du couvage, provoquent des mouvements rythmiques. Nous pouvons observer ces mouvements même à travers la coquille intacte, en plaçant les œufs, dans l’ooscope de Preyer, devant une source lumineuse intense. Nous pouvons constater que l’amnion effectue à peu près dix contractions à la minute : celles-ci débutent à l’un des pôles et progressent vers l’autre par des mouvements vermiculaires. Ainsi le liquide amniotique se trouve agité et berce régulièrement l’embryon d’un pôle à l’autre. » Ajoutons encore que ces mouvements s’intensifient jusqu’au huitième jour du couvage puis diminuent, ainsi que la quantité de liquide amniotique qui, chez tous les amniotes, augmente rapidement au début pour diminuer ensuite lentement. Je serais surpris qu’aucun naturaliste n’ait encore tenté une comparaison poétique avec la mer ondoyante ; pourtant il y a peut-être là plus qu’une simple comparaison31
Citons encore un fait remarquable : chez les Mammifères supérieurs, donc également chez l’Homme, la sécrétion vaginale de la femelle, dont nous avons attribué l’effet érotique excitant à des réminiscences infantiles, possède selon la description de tous les physiologistes une très nette odeur de poisson (Heringslacke). Cette odeur provient de la même substance (Triméthylamine) que celle du poisson qui pourrit.
Ceux qui attribuent la périodicité menstruelle de 28 jours à l’influence du changement de lune (donc, indirectement, à l’influence exercée sur les ancêtres aquatiques par la marée haute et basse) pourraient bien finalement avoir raison.
Rappelons encore l’étrange comportement pendant le coït de ces mammifères qui, après avoir réalisé leur adaptation à la vie terrestre, sont redevenus des animaux aquatiques (phoques, éléphants de mer, baleines). Nous savons que ces animaux (à l’exception des baleines) gagnent la terre ferme à la période de reproduction ; autrement dit ils sont dominés par un désir de régression « géotrope » qui les incite à rétablir une situation déjà dépassée par leurs descendants. On connaît d’ailleurs aussi le comportement de certains poissons de mer qui, en période de frai, remontent au prix d’énormes difficultés les lits rocailleux des torrents de montagne où ils sont nés..
Même au risque de surcharger d’hypothèses ce court essai, je ne peux passer sous silence la conception que j’ai élaborée en guise de parallèle phylogénétique au développement des caractères et des organes sexuels du mâle dans leurs rapports réciproques. Dans la partie ontogénétique nous avons parlé de cette tendance générale qui incite le mâle comme la femelle à pénétrer dans le corps du partenaire. Il s’agit donc d’une lutte des sexes qui se termine par la victoire du mâle et par la création de systèmes de compensation pour la femelle.
Ajoutons à présent que cette lutte a probablement aussi un modèle dans la phylogenèse. Nous savons que déjà chez les Amphibiens, le mâle qui n’a encore que des organes d’accouplement très rudimentaires, possède déjà des organes d’étreinte. Chez les mâles des Vertébrés supérieurs, les instruments destinés à fasciner et à subjuguer afin d’amener la femelle à reddition, se développent en se diversifiant de plus en plus. Si nous prenons en considération le développement de plus en plus perfectionné de l’instrument de pénétration du mâle chez les animaux supérieurs (alors que ces organes sont tout à fait exceptionnels chez les ancêtres aquatiques), nous sommes amenés à faire la supposition suivante : c’est après la catastrophe d’assèchement, lorsque pour la première fois l’animal a dû chercher un substitut à la vie aquatique perdue, que s’est manifestée également pour la première fois la tendance à pénétrer dans le corps d’un autre animal, c’est-à-dire à s’accoupler avec lui. Primitivement, il s’agissait probablement de la « lutte de tous contre tous » : mais finalement le mâle, plus fort (prédisposé à ce rôle, comme je tenterai de l’expliquer plus loin), a réussi à pénétrer dans le cloaque de l’adversaire, et même finalement à se creuser un canal pour l’accouplement ; la femelle a ensuite adapté son propre organisme à cette situation.
Ce renforcement particulier du bimorphisme sexuel précisément chez les espèces terrestres, c’est-à-dire après la catastrophe de l’assèchement, indique peut-être que la lutte au cours des premières tentatives de coït était en fait une lutte pour l’humidité remplaçant l’océan et que les manifestations sadiques du coït constituent la répétition de cette phase de lutte par le lointain descendant des animaux archi-primitifs, l’Homme, même si ce n’est que sur un mode symbolique et ludique. C’est probablement cette période de lutte qui est à l’origine du caractère terrifiant et dangereux du phallus paternel, qui primitivement représentait simplement l’enfant dans l’utérus maternel32
Le coït per cloacam imposé par le mâle serait donc la cause originelle du fait que l’érotisme de la femelle, également phallique à l’origine, ait été remplacé par l'érotisme cavitaire cloacal (Jekels, Fedem), le râle du pénis passant à l’enfant et au contenu intestinal. L’impossibilité d’évacuer les excréments lorsque le pénis remplit le cloaque, puis la libération après l’achèvement du coït, donc une sorte de « tension anale » et la brusque résolution de celle-ci, devaient provoquer des sensations voluptueuses propres à offrir à la femelle consolation et compensation..
8. Accouplement et fécondation
Selon notre hypothèse, le coït n’est rien d’autre que la libération d’une tension pénible et, simultanément, la satisfaction de la pulsion de retour au corps maternel et à l’océan, ancêtre de toutes les mères. Cependant, rien ne nous permet pour le moment de comprendre pourquoi et comment la génitalité des animaux supérieurs réalise la fusion en une seule entité de cette tendance à la satisfaction avec l’instinct de conservation de l’espèce et de fécondation, dont pourtant elle était apparemment tout à fait indépendante à l’origine. La seule explication que nous ayons pu proposer jusqu’à présent est l’identification de l’individu tout entier à la sécrétion génitale. Par conséquent, le soin que prend l’individu de son sperme ne mériterait guère plus d’attention que d’autres mesures de protection prises par de nombreux animaux à l’égard de leurs excrétions diverses. Ces sécrétions, l’individu les ressent comme faisant partie de lui-même ; leur évacuation s’accompagne donc d’un sentiment de perte. Il semble que la perte de substances plus denses (matières fécales) soit plus douloureusement ressentie que celle des liquides.
Cependant, cette explication apparaît d’emblée pauvre et insatisfaisante, surtout si nous considérons que dans l’acte sexuel il ne s’agit pas seulement de déposer la sécrétion en lieu sûr, mais aussi de l’instauration d’un rapport étroit entre cet acte et la fécondation, c’est-à-dire de l’union des gamètes des deux sexes, suivie immédiatement par le déclenchement de l’embryogenèse. Il faut admettre que l’acte de fécondation pose des problèmes d’une tout autre nature que ceux rencontrés à propos de l’acte d’accouplement. En effet, la fécondation est un processus bien plus archaïque que l’union temporaire du mâle et de la femelle dans l’acte sexuel. Nous avons vu que le développement de la génitalité et de ses organes d’exécution n’apparaissait qu’avec les Amphibiens, alors que les unicellulaires, les plus inférieurs des êtres vivants, se reproduisent déjà par fécondation. Cela nous suggère l’idée d’inverser le raisonnement suivi jusqu’ici et de voir si la vérité n’est pas du côté de ces zoologistes qui affirment que l’acte d’accouplement tout entier n’est rien d’autre qu’une contrainte induite par les gamètes qui incite les individus à réunir ces gamètes en un lieu autant que possible protégé. Les multiples mesures de précaution qui ont été instituées dans ce but au sein du règne animal dès avant l’apparition de la fonction d’accouplement, sont résolument en faveur de cette conception et l’on peut se demander si ce fait n’est pas de taille à provoquer l’écroulement de toute notre hypothèse quant au désir de régression au corps maternel et à l’océan.
Une seule issue s’offre à nous : continuer à élaborer systématiquement l’idée du « parallèle périgénétique ». S’il est vrai que les conditions d’existence sont réellement pour les êtres vivants, au cours de l’ontogenèse, la répétition de formes d’existence archaïques, ce que nous avons supposé être le cas pour l’embryon vivant dans le liquide amniotique maternel, il faut alors que dans la phylogenèse quelque chose corresponde au processus de fécondation, et même à la maturation des gamètes (spermatogenèse et oogenèse). Ce quelque chose ne peut être que la forme d’existence unicellulaire des temps primitifs et sa perturbation par une catastrophe primitive qui a contraint ces êtres unicellulaires à se fondre en une unité. C’est cette même hypothèse que Freud a élaborée dans son essai « Au-delà du principe de plaisir » en se fondant sur la fantaisie poétique du « Banquet » de Platon. Selon Freud, une grande catastrophe a partagé la matière en deux parties, suscitant dans chacun des fragments le désir de réunification, ce qui pourrait représenter le début de la vie organique. Il n’y a pas grand chose à changer à cette conception si nous supposons que, dans la chronologie de la gamétogenèse et de la fécondation, c’est le déroulement de l’histoire primitive qui se répète, par conséquent que les êtres vivants se sont d’abord développés isolément à partir de la matière inorganique et n’ont été contraints à s’unir que par une nouvelle catastrophe. Le groupe des Unicellulaires comprend également des formes intermédiaires qui se situent, comme les Amphibiens, entre les espèces aquatiques et terrestres, entre les êtres copulants et non copulants. Les sciences naturelles nous apprennent que chez certains de ces êtres primitifs l’apparition de conditions défavorables, une menace de sécheresse par exemple, provoque une épidémie de copulations et que ces petits animaux se mettent à s’unir sexuellement33
On sait que ces épidémies de copulation sont parfois également provoquées par la suralimentation.. Quant à Bölsche, plein d’imagination, il dit que cette union en fait n’est qu’une façon raffinée de se dévorer. Il se peut donc que la première copulation cellulaire ait la même origine que celle que nous avons attribuée au premier accouplement. Après l’assèchement, les premières tentatives d’accouplement entre poissons avaient pour but de retrouver dans un corps animal l’ancien milieu familier, humide et riche en nourriture, la mer. Une catastrophe similaire, mais plus archaïque encore, a pu inciter les unicellulaires à s’entre-dévorer, mais aucun des adversaires n’est parvenu à anéantir l’autre. Ainsi a pu se réaliser une union fondée sur un compromis, une sorte de symbiose qui, après une période de coexistence, revient toujours à la forme archaïque, la cellule fécondée produisant et libérant à nouveau des « cellules primitives » (les premières cellules germinales). C’était le début de l’alternance éternelle de l’union des gamètes (fécondation) et de leur sécrétion (spermato- et oogenèse). La seule différence qui sépare ce point de vue de l’hypothèse retenue par Freud, c’est la distance dans le temps qui existe, selon notre conception, entre l’apparition de la vie à partir de la matière inorganique et l’apparition du processus de fécondation, alors que Freud considère que les deux ont pris naissance en même temps, à la suite de cette même catastrophe primitive.
Si nous admettions que la fécondation constitue elle aussi la répétition d’une catastrophe primitive semblable à celle qui est à l’origine de la fonction d’accouplement dans le monde animal, nous n’aurions peut-être pas à abandonner notre théorie de la génitalité et nous pourrions tenter de l’accorder avec les données indiscutables de la biologie « pré-génitale ». Pour cela il nous suffit de supposer que l’acte du coït et l’acte de la fécondation, étroitement lié au premier, représentent la fusion en une unité non seulement de la catastrophe individuelle (naissance) et de la dernière catastrophe subie par l'espèce (l’assèchement), mais aussi de toutes les catastrophes survenues depuis l’apparition de la vie ; donc l’orgasme n’est pas seulement l’expression de la quiétude intra-utérine et d’une existence paisible dans un milieu plus accueillant, mais aussi de cette quiétude qui précédait l’apparition de la vie, la quiétude morte de l'existence inorganique. La fécondation, c’est-à-dire la solution adoptée lors d’une catastrophe précédente, a peut-être servi de modèle à la fusion en une seule entité des instincts de fécondation et d’accouplement, à l’origine indépendants. La valeur exemplaire de la fécondation pour la manière dont l'individu réagit aux perturbations actuelles n’exclut pas l’hypothèse selon laquelle les résidus des tensions produites par les catastrophes tant actuelles qu’ontogénétiques et phylogénétiques ne sont pour l’individu que des productions pénibles et de déplaisir, et comme telles, suivant les lois de l’autotomie, doivent être éliminées34
Freud, sans s’étendre davantage sur le rapport génétique que nous avons tenté d’établir ici, exprime cette même idée dans son récent essai, « Le Moi et le Ça » (1933), de la façon suivante : « L’expulsion des produits sexuels dans l’acte génital correspond à peu près à la séparation du soma et du germen ; c’est pour cela que la pleine satisfaction sexuelle ressemble à la mort, c’est pour cela que chez les animaux inférieurs l’acte géniteur coïncide avec la mort »..
Ainsi donc se trouve levé le mystère de la coïncidence de la fonction génitrice et de la fonction de copulation dans un seul acte, dès lors que nous concevons l’apparition de la fonction de copulation chez les Amphibiens comme une régression au même mode de solution (union avec un autre organisme vivant) que celle qui s'est avérée avantageuse lors d'une catastrophe antérieure. Compte tenu de la tendance à l'unification qui règne de façon générale dans le psychisme et manifestement aussi dans le monde organique, tendance à réunir en un seul acte les processus de même sens, il n’y a rien d’étonnant à ce que s’opère finalement (après quelques tentatives imparfaites des vertébrés inférieurs) l’union entre l’élimination des produits actuellement nuisibles (urine, fèces), celle de la tension érotique accumulée dans les organes génitaux, et aussi celle de ce produit séculaire générateur de déplaisir que nous supposons emmagasiné dans le tissu germinal.
Naturellement, cette dernière substance est traitée avec beaucoup plus d’égards que tout autre produit d’excrétion. Mais il se peut également que les dispositifs aménagés pour la protection fœtale ne soient pas uniquement un effet de la sollicitude de l’organisme maternel, mais aussi, du moins partiellement, des produits de la vitalité des cellules germinales elles-mêmes, comme cela se passe lorsque certains parasites, parvenus dans le corps de leur hôte, utilisent certaines réactions de celui-ci, purement défensives à l’origine (isolement inflammatoire accompagné d’exsudation séreuse) pour se construire un abri sûr, le plus souvent un kyste rempli de liquide. D’un autre côté, nous ne pouvons nier l’existence de l’autre éventualité : une sollicitude toute particulière manifestée effectivement par l’individu à l’égard de ces produits, mais cette sollicitude ne résulte pas nécessairement d’un sentiment d’amour. Si nos suppositions sont exactes, le tissu germinal renfermerait les énergies instinctuelles les plus dangereuses à une concentration maximale. Tant que celles-ci demeurent dans l’organisme lui-même, elles sont probablement isolées du reste de l’organisme, c’est-à-dire du soma, par des dispositifs adéquats, enkystées en quelque sorte pour empêcher les énergies dangereuses de s’attaquer au corps de l’hôte. Donc le soin avec lequel se fait la protection est peut-être plutôt une sollicitude résultant de la peur. On ne verrait rien d’étonnant à ce qu’une personne qui vient de transporter avec de multiples précautions un dangereux explosif dans sa poche continue à le manipuler avec prudence même lorsqu’il s’agit de le déposer quelque part ; de même sa peur des troubles que peut occasionner le plasma germinal intervient peut-être pour l’obliger à se préoccuper des produits germinaux même après leur évacuation de l’organisme. Naturellement, il ne faut pas non plus écarter l’explication qui seule a retenu l’attention jusqu’à présent, celle qui justifie la protection embryonnaire par l’amour, donc par un mécanisme d’identification ; nous n’avons certes pas méconnu la valeur de cette thèse. Il est pénible de se séparer d’un produit, quel qu’il soit, dont la perte met en cause l’unité du corps et l’exemple fourni par l’acte d’éjaculation nous a permis de montrer que la tension pénible doit atteindre un niveau considérable pour décider l’organisme à abandonner un de ses produits.
Si l’on garde à l’esprit la manière dont mâle et femelle s’accouplent et comment le spermatozoïde féconde simultanément (ou après un intervalle bref et négligeable) l’ovule, on a l’impression que tout se passe comme si le soma des copulants imitait jusque dans les moindres détails le fonctionnement des cellules germinales. Le spermatozoïde pénètre dans le micropyle de l’ovule comme la verge dans le vagin ; on serait tenté d’appeler, tout au moins pendant l’instant de l’accouplement, le corps du mâle un méga-sperme et celui de la femelle, mégaloon35
La rupture du follicule de Graaf pourrait se comparer au processus de la naissance ; en ce qui concerne le plasma germinal, elle pourrait constituer le prototype de la naissance. On sait par ailleurs qu’entre le corps jaune et l’utérus un rapport étroit (hormonal ?) peut être mis en évidence tout au long de la vie.. Par ailleurs, cela nous permet aussi de comprendre la conception tant décriée des « animalculistes » qui considéraient les spermatozoïdes et les ovules comme des êtres séparés, des animalcules. Nous aussi, nous croyons que dans un certain sens ils le sont : ce sont les revenants des premières cellules primitives en copulation.
Il semble donc que le soma, dont la seule tâche à l’origine consistait à protéger les cellules germinales, après avoir accompli cette première tâche et satisfait ainsi aux exigences du principe de réalité, ait revendiqué sa part du plaisir produit par l’union des cellules germinales, et développé des organes de copulation. Dans l'appendice biologique de ce travail nous indiquerons que cette voie est de toute façon celle suivie par toute évolution : tout d'abord adaptation à une tâche actuelle, puis rétablissement aussi complet que possible de la situation de départ, abandonnée sous la contrainte.
Peut-être faut-il se familiariser avec l’idée que les traces mnésiques de toutes les catastrophes phylogénétiques sont accumulées dans le plasma germinal tout comme les expériences traumatiques non liquidées qui troublent la vie individuelle sont accumulées dans l'organe génital et s’y déchargent. De là elles agissent de la même façon que, selon Freud, les excitations perturbatrices non liquidées, génératrices des névroses traumatiques : elles contraignent à répéter sans cesse la situation de déplaisir, mais avec prudence et sous une forme quantitativement et qualitativement très atténuée, chaque répétition permettant d’obtenir la liquidation d’une petite fraction de la tension pénible. Ce que nous appelons hérédité n’est peut-être que le transfert à la descendance de la plus grande partie de la tâche pénible de liquider les traumatismes ; par contre le plasma germinal, en tant qu’héritage, représente la somme des impressions traumatiques léguées par nos ancêtres et retransmises par les individus ; ce serait donc le sens des « engrammes » dont les biologistes ont émis l’hypothèse. Si nous retenons l’idée développée par Freud d’une tendance dominant tout être vivant qui s’efforce de réaliser un état libre de toute excitation et finalement la quiétude inorganique (instinct de mort), nous pouvons ajouter que, tout au long de cette transmission d’une génération à l’autre du matériel traumatique d’excitations pénibles, chaque existence individuelle abréagit une partie de ces excitations par le fait même de les vivre. En l’absence de nouvelles perturbations ou de catastrophes, peu à peu ce matériel traumatique s’épuise, ce qui équivaudrait à l’extinction de l’espèce en question36
J’ai été amené à communiquer (1919) ces réflexions au Professeur Steinach de Vienne, dont je connaissais les expériences de modification sexuelle sur les animaux et je lui ai remis un court mémoire où j’indiquais les raisons qui pourraient inciter les chercheurs à entreprendre des expériences de rajeunissement. J’y suggérais que si la destruction du plasma germinal hâte, comme je le pense, la mort du soma, l’implantation de glande fraîche pourrait stimuler les forces vitales du soma, donc prolonger la vie. Le Pr Steinach m’apprit alors qu’il avait mis en pratique l’idée de rajeunissement par implantation de tissu testiculaire et ovarien et il m’a même montré des photographies de rats rajeunis. Mais à la lecture des communications ultérieures de Steinach il apparaît nettement que ce n’est pas dans les cellules germinales elles-mêmes, mais dans le tissu interstitiel qu’il recherche la substance propre à stimuler la vie..
Comme nous l’avons dit, nous estimons que la cause ultime de l’unification de l’organe génital et des organes d’excrétion est constituée par le caractère pénible de cette tension qui se décharge au moment de la fécondation ; rappelons ici également le fait que la tendance universelle à la castration, qui se manifeste avec une violence toute particulière chez les psychotiques par exemple, se fonde en dernière analyse sur le caractère intolérable de ce déplaisir. Sur le plan phylogénétique, cette conception est confirmée par la descente testiculaire et la descente ovarienne qu’on observe chez les mammifères supérieurs. Les glandes génitales sont dissimulées dans les profondeurs des tissus rétro-péritonéaux, tout au long de la vie chez les animaux inférieurs, et jusqu’à la fin de la période fœtale chez les animaux supérieurs ; c’est ensuite seulement que, chez ces derniers, elles descendent en poussant le péritoine devant elles jusque dans le bassin et, en ce qui concerne les testicules, jusque vers la surface, sous la peau des bourses. Chez certaines espèces (talpidés) cette descente ne se produit qu’au moment de la reproduction, puis elle est suivie d’involution ; il existe aussi, paraît-il, des espèces dont les glandes génitales ne descendent que pour la durée de la copulation. Outre la progression dans l’espace vers des organes d’excrétion, cette descente exprime aussi une autre tendance : comme si l’organisme s’efforçait d’abord de se débarrasser des glandes germinales « en bloc », mais se contentait finalement de n’éliminer que la sécrétion glandulaire ; de la même façon, en analysant le coït, nous avons interprété l’érection comme le vestige de la tendance à éliminer totalement l’organe mais qui se borne finalement à l’éjaculation.
Parmi les mobiles qui incitent à l’accouplement, nous avons retenu, par analogie avec les mobiles de la fécondation, seulement ceux qui étaient également accessibles du point de vue psychologique ; aussi nous ignorons à peu près totalement si, à côté des épisodes pénibles qui poussent à la fécondation, interviennent également des tendances « voluptueuses » à la répétition comme celles que nous avons isolées sous le nom de pulsions érotiques, autrement dit des pulsions qui accumulent des tensions pour jouir de leur décharge. Il n’y a aucune raison de négliger cette possibilité. Une fois admise l’hypothèse hardie que le processus biologique de l’accouplement représente un compromis entre contrainte traumatique et tendance érotique, et même celle qui suppose l’existence d’une tendance à la fusion (motivée par le « déplaisir ») dans le plasma germinal et dans ses éléments cellulaires, on peut tout aussi hardiment imaginer que des motifs de recherche hédonique interviennent dans cette union comme ils interviennent dans le processus d’accouplement qui, selon la conception exposée ici, ne contribue pas seulement à compenser des traumatismes non liquidés mais célèbre en même temps l’heureuse délivrance du grand péril.
Nous avons déjà parlé de l’influence réciproque du soma et du germen, mais nous n’avons pas encore exposé comment nous imaginons l’influence que pourrait exercer le soma sur le plasma germinal. Personne ne s’attend à nous voir aborder ici la question tant débattue de la transmission des caractères acquis. Ce que la psychanalyse peut en dire, Freud l’a déjà communiqué dans sa synthèse biologique. Aux arguments qu’il oppose à Weismann (qui soutient que les expériences des ancêtres n’influencent en rien les descendants), ajoutons cette observation psychanalytique mise en relief précisément dans la théorie de la sexualité de Freud, à savoir que tout ce qui se passe dans l’organisme s’accompagne d’une résonance sexuelle. Donc si cette excitation sexuelle agissait également chaque fois sur le plasma germinal, et si nous considérions celui-ci comme apte à en conserver les traces, cela nous permettrait de nous représenter la manière dont une telle influence peut et a pu se constituer. Contrairement à ce que nous a enseigné Darwin concernant l’origine pangénétique de la substance germinale, je tends à penser que les cellules germinales ne se résument pas à de simples copies du soma qui seraient constituées de fragments arrachés à celui-ci, mais que leur arbre généalogique remonte bien plus loin dans le temps que le soma lui-même. Cependant le sort ultérieur du soma exerce une influence décisive sur les cellules germinales, et cela sur un mode réellement pangénétique ou, pour employer la nouvelle expression, amphimictique ; inversement, non seulement les excitations du monde extérieur et les propres tendances du soma, mais aussi les tendances des cellules germinales fournissent au soma des excitations pulsionnelles. Rappelons que toutes ces notions complexes sur les rapports mutuels du soma et du germen ne nous ont été nécessaires que pour rendre plus compréhensible l’analogie (voire l’homologie) entre les processus ou les organes de la fécondation et de la copulation. J’y suis peut-être parvenu dans une certaine mesure.
Pour faciliter une vue d’ensemble de tout ce qui a été dit, résumons dans un tableau synoptique les parallèles onto-, phylo- et péri-génétiques dont nous avons fait l’hypothèse :
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Deux rubriques de ce tableau appellent des explications. En introduisant une séparation entre l’apparition de la vie organique et l’apparition des organismes unicellulaires individualisés, nous dédoublons en quelque sorte la catastrophe cosmique que Freud suppose être à l’origine de l’animation de la matière. La conséquence de la première serait l’apparition de la matière organique, soit une matière organisée selon un plan déterminé ; la seconde aboutirait au développement, à partir de cette matière, d'individus isolés, doués d’autonomie et d’autarcie. Selon le double sens du mot « matière » (materia) qui au sens propre du terme veut dire substance maternelle, nous pouvons considérer ce deuxième processus comme la toute première naissance, le prototype de toutes les naissances ultérieures. Dans ce sens, nous devrions donc revenir à la conception de Freud qui voit l’origine de la vie (ou du moins de la vie individuelle) dans un clivage de la matière. Peut-être était-ce là le premier exemple d’autotomie ; des changements extérieurs ont pu rendre insupportable aux éléments de matière la combinaison en grande unité et les contraindre à former des unités plus petites. Des forces similaires ont sans doute joué quand s’est constitué le premier individu cristallin dans la matière cristalline ou dans la « solution mère », et ici encore, par suite d’un assèchement37
Le mode de penser naïvement animiste de cette conception sera justifié plus loin..
L’autre rubrique qui demande une explication, c’est l’hypothèse qui présente l’ère glaciaire comme la dernière des catastrophes qui se soit abattue sur nos ancêtres humains. Dans mon article sur le développement du sens de réalité et ses stades (1910)38
« Le développement du sens de réalité et ses stades », publié en 1913, paru dans Psychanalyse II, Payot, p. 51., j’interprétais le développement de la civilisation comme une réaction à cette catastrophe. Ajoutons à présent que l’ère glaciaire a limité après coup même le degré d’évolution génital du sens de réalité érotique qui était déjà atteint, les pulsions génitales inutilisées venant contribuer à l’accroissement des réalisations intellectuelles et morales « d’ordre supérieur ».
Nous avons déjà montré à maintes reprises que la formation de l’appareil génital lui-même ainsi que sa capacité de débarrasser l’organisme des pulsions sexuelles, représente un progrès essentiel sur le plan de la division du travail et un puissant facteur de développement du sens de réalité. Ajoutons encore qu’à l’appui de cette thèse il existe également des parallèles phylogénétiques. Les amniotes vertébrés qui sont les premiers, comme nous l’avons appris, à avoir développé des organes de copulation sont aussi les premiers chez lesquels le cerveau, droit jusque-là, commence à se courber. On a également écrit que c’est chez les animaux placentaires qu’on observe pour la première fois l’apparition du corps calleux, qui représente une liaison entre les deux hémisphères cérébraux, et un progrès important du point de vue de la capacité intellectuelle. L’évolution de la civilisation humaine pendant la période de latence ne serait ainsi qu’une des manifestations — considérablement modifiée à vrai dire — du rapport primitif et intime entre pulsion génitale et intellectualité.
Mais puisque nous parlons du développement cérébral, nous pouvons mentionner ici une autre idée susceptible d’éclairer un peu les rapports qui existent entre génitalité et intellectualité et, par la même occasion, nous apprendre quelque chose sur le prototype organique du mode de fonctionnement de l'organe d’idéation. Nous avons déjà évoqué le rôle important que joue l'odorat dans la sexualité. Nous savons par ailleurs qu’à mesure que le cerveau se développe, l’importance du lobe olfactif et, conjointement, le rôle de l’olfaction dans la sexualité, passe de plus en plus à l’arrière-plan, tandis que le développement anatomique et fonctionnel des hémisphères cérébraux vient au premier plan. Enfin chez les êtres qui se déplacent verticalement, l’élément dominant ne sera plus le nez, mais l’œil, même au sens érotique ; selon le zoologiste Th. Zell, le singe anthropoïde et l’homme sont des « animaux oculaires ». Nous estimons qu’il existe une analogie si poussée entre le fonctionnement olfactif et l’idéation qu’on peut véritablement considérer l'olfaction comme le prototype biologique de l'idéation. L’animal qui flaire « goûte » des traces infimes de la nourriture avant de se décider à l’absorber ; de même le chien renifle l’organe sexuel de la femelle avant de lui confier son pénis. Et quelle est donc, selon Freud, la fonction de l’organe d’idéation ? Une tentative d’action avec une dépense minimale d’énergie. Et l'attention ? Une exploration volontaire et périodique du monde extérieur au moyen des organes des sens, où l’organe de perception ne transmet à la conscience que des petits échantillons de l’excitation externe. Organe d’idéation et sens olfactif sont tous deux au service de la fonction de réalité, qu’il s’agisse de la fonction égoïste ou de la fonction érotique.
Nous nous sommes un peu écartés de notre thème, les rapports entre accouplement et fécondation ; mais en étudiant le problème biologique central de la conservation de l’espèce, il n’est pas facile de résister à la tentation de suivre ici et là les perspectives qui s’ouvrent à nous au cours de cette étude. Nous ne prétendons pas avoir établi une théorie complète de l’accouplement, mais en tout cas celle que nous proposons pourra faire l’affaire en attendant d’en trouver une meilleure. Goethe a dit qu’une théorie inexacte valait mieux que pas de théorie du tout, et nous pouvons aussi invoquer Haeckel qui dit dans sa Natürliche Schöpfungsgeschichte39
Histoire naturelle de la création. : « Pour expliquer les phénomènes, nous devons accepter et retenir toute théorie compatible avec les faits réels, même faiblement étayée, en attendant de pouvoir la remplacer par une meilleure. »
C. Appendice
9. Coït et sommeil
« Schlaf ist Schale, wirf sie fort »40
« Le sommeil est une enveloppe, rejette-la. » Goethe, Faust, t. II..
Nous avons trop souvent insisté sur l’analogie profonde entre les tendances qui s’expriment dans le coït et par le sommeil, pour nous épargner la tâche d’examiner d’un peu plus près les ressemblances et les différences entre ces deux phénomènes biologiquement si importants. Dans « Le développement du sens de réalité et ses stades », j’ai décrit le premier sommeil du nouveau-né comme une reproduction de l’existence intra-utérine, favorisée encore par l’isolement, l’enveloppement, la chaleur dont l’entourent soigneusement les personnes qui prennent soin de lui. L’enfant qui crie d’angoisse, bouleversé par le traumatisme de la naissance, s’apaise rapidement dans cette situation qui lui procure le sentiment, mi-réel, mi-hallucinatoire, c’est-à-dire fantasmatique, le sentiment que ce grand traumatisme n’a jamais eu lieu. D’ailleurs Freud écrit41
Introduction à la psychanalyse, « Petite Bibliothèque Payot ». que l’homme en réalité ne naît jamais complètement, mais passe la moitié de sa vie dans le sein maternel en se livrant au repos nocturne.
Mais puisque nous avons été amenés à comparer d’une part le sommeil, d’autre part l’accouplement à la situation intra-utérine, la logique exige que nous les considérions aussi comme fondamentalement identiques entre eux. Nous pensons en effet que les deux processus réalisent le même but régressif, quoique par des moyens très différents et à des degrés divers. Le dormeur nie en bloc le monde extérieur perturbant sur le mode négatif hallucinatoire et concentre tout son intérêt et toute son attention psychique et physiologique sur le repos : le but régressif est donc atteint d’une manière presque exclusivement irréelle et fantasmatique. Par contre nous avons soutenu que si ce but est accompli par l’accouplement sur un mode en partie purement fantasmatique, il l’est aussi en partie dans la réalité : l’organe sexuel et le sperme pénètrent effectivement dans le milieu féminin (maternel). Sommeil et coït sont donc comme le commencement et la fin de l’évolution déjà effectuée vers la réalité érotique. Le dormeur peut être qualifié d’autoérotique. Il devient tout entier un enfant, jouissant de la paix qui règne à l’intérieur du corps maternel, indifférent dans son isolement narcissique à tout souci du monde extérieur. Celui qui veut faire l’amour doit se livrer à des préparatifs beaucoup plus complexes ; il doit d’abord s’emparer d’un objet approprié, donc faire preuve d’un degré de développement beaucoup plus élevé du sens de réalité avant de pouvoir s’abandonner dans l’orgasme à l’illusion d’un bonheur semblable à celui du sommeil ; il est donc confronté à des conditions beaucoup plus difficiles, mais qui sont absolument nécessaires pour que la représentation de désir puisse entraîner « l’identité de perception » (Freud). Nous pourrions dire que le sommeil utilise des moyens autoplastiques et le coït des moyens alloplastiques ; le sommeil travaille avec des mécanismes projectifs, le coït avec des mécanismes introjectifs. Mais même dans le coït toutes les précautions sont prises pour que la régression érotique ne dépasse pas la limite qui mettrait en danger l’intégrité de l’individu ; une partie seulement du corps (l’organe sexuel) est appelée à servir la satisfaction réelle, tandis que les autres parties du corps ne participent qu’en tant qu’organes auxiliaires, sans pour autant interrompre complètement leurs autres activités actuellement nécessaires à l’adaptation (respiration, etc.).
Les deux processus sont caractérisés par l’exclusion des excitations externes, l’abandon de la « vie de relation » selon Liébault : réduction de la sensibilité aux excitations, renoncement à tout acte volontaire à l’exception de ceux qui servent à l’accomplissement du désir. Sur ce point, les deux processus imitent donc bien et avec une grande précision la forme d’existence intra-utérine. Puisque nous avons déjà exposé ces faits en détail à propos du coït, nous nous limiterons ici à donner les caractéristiques de l’état de sommeil selon la description qu’en fait Piéron. Parmi les « caractères du sommeil » il énumère : « inactivité, immobilité, relâchement du tonus musculaire, position compatible avec le relâchement, absence générale de réactivité induite, persistance de réactions réflexes, manque de réactions volontaires » et, en général, « disparition de la plupart des rapports sensitivo-moteurs avec le milieu »42
En français dans le texte..
Le sommeil comme le coït, mais surtout le premier, sont caractérisés par une position que même les observateurs non prévenus décrivent comme une « position fœtale ». Les membres inférieurs sont serrés contre le corps, de sorte que le corps prend la forme d’une boule, comme les conditions spatiales dans l’utérus l’imposent. Nous pouvons également constater une analogie profonde entre l’état de sommeil et l’état embryonnaire en ce qui concerne la fonction de nutrition. Le jour, les animaux s’occupent à se procurer la nourriture et à la digérer ; mais la véritable absorption de la nourriture, c’est-à-dire son assimilation par les tissus, se fait, s’il faut en croire les physiologistes, plutôt pendant la nuit. [« Qui dort, dîne »43
En français dans le texte.]. Ainsi le sommeil donnerait l’illusion d’une absorption de nourriture sans effort, ce qui ressemble au mode de nutrition intra-utérin. On dit souvent que la croissance et la régénération se font surtout pendant le sommeil ; la croissance est, pour ainsi dire, la seule activité du fœtus dans le corps maternel.
La respiration, dont nous avons déjà évoqué les modifications pendant le coït, devient beaucoup plus profonde pendant le sommeil. Il se peut qu’à la faveur des pauses respiratoires plus prolongées, l’approvisionnement en oxygène du dormeur se rapproche de l’état apnéique du fœtus. Les mammifères aquatiques, les phoques par exemple, gonflent leurs poumons pendant le sommeil et restent immergés dans l’eau ; ils ne reviennent respirer à la surface qu’au bout d’un intervalle assez long. On sait que le caméléon gonfle lui aussi énormément ses poumons pendant son sommeil.
On dit que le réflexe plantaire du dormeur présente ce qu’on appelle le signe de Babinski ; ceux qui ont examiné des nouveau-nés immédiatement après leur naissance affirment l’avoir également constaté chez eux. Ce signe est un symptôme d’immaturité des instances inhibitrices du cerveau et en particulier de l’inhibition insuffisante des réflexes médullaires. Mais le dormeur aussi, selon un physiologiste célèbre, ne possède qu’un « psychisme médullaire ». Cette formule concorde bien avec ce que nous avons dit de la régression phylogénétique ; dans l’état de sommeil aussi nous pouvons supposer la participation d’une tendance régressive archaïque (Il n’y a d’analogie entre ce stade très profond de la régression et le coït que dans la dernière phase de ce dernier, l’orgasme.)
L’innervation des muscles oculaires mérite d’être notée : pendant le sommeil, les globes oculaires sont tournés vers l’extérieur et vers le haut ; les physiologistes assurent qu’il s’agit d’une régression à une position oculaire caractéristique des animaux sans vision binoculaire (poissons, par exemple). Les paupières sont fermées pendant le sommeil : ce n’est pas une ptôse, mais une contraction volontaire de la musculature palpébrale.
Mentionnons encore les variations de la régulation thermique qu’on peut observer chez le dormeur. Nous savons à quel point notre sensibilité au froid augmente facilement pendant le sommeil et avec quel surcroît d’attention il faut veiller à la protection du dormeur contre le froid. Là encore il s’agit d’un retour à l’état embryonnaire où le soin de maintenir la température incombait au milieu maternel. Mais ici il s’agit peut-être d’une régression encore plus profonde à la poïkilothermie des poissons et des amphibiens.
Pour accentuer l’analogie avec le coït, nous pouvons encore citer les habitudes de « sommeil collectif » : deux (ou plusieurs) animaux se pressent l’un contre l’autre au moment de s’endormir pour ménager mutuellement leur chaleur. Dolflein décrit ce mode de sommeil chez les écureuils volants, les perdrix, ces dernières formant un cercle, la tête tournée vers l’extérieur. Certaines espèces d’oiseaux, au moment de s’endormir, s’agglomèrent en masses compactes en s’accrochant, perchés les uns sur les autres ; certaines espèces de singes d’Amérique du Sud organisent des assemblées de sommeil.
On constate aussi une certaine réciprocité entre génitalité et sommeil dans un autre sens : le temps consacré au sommeil diminue au cours du développement, tandis que celui consacré à l’activité sexuelle augmente. « C'est par le sommeil que commence notre existence ; le fœtus dort presque continuellement »44
En français dans le texte., dit Buffon. Le nouveau-né dort plus de vingt heures par jour, par contre son érotisme est primitif, « autistique ». Nous savons que le sommeil des adultes est très perturbé par le désir sexuel insatisfait ; l’insomnie résulte le plus souvent d’une vie sexuelle insuffisante, dit la psychanalyse. Dans la vieillesse, le sommeil comme la pulsion génitale disparaissent progressivement, probablement pour laisser la place à des pulsions de destruction plus profondes.
Comme argument en faveur du rapport génétique entre le sommeil et la génitalité, on peut citer l’apparition fréquente des actes de masturbation et de pollution autoérotiques pendant le sommeil ; c’est aussi, probablement, une des causes de l’incontinence d’urine nocturne. Par contre certaines tribus du Nord, comme les Samoïèdes, passent les sombres mois d’hiver dans une sorte d’état d’hibernation, pendant lequel la menstruation est interrompue chez les femmes.
On connaît les rapports étroits entre le sommeil et l’hypnose ; par ailleurs, la psychanalyse a démontré l’identité entre relation sexuelle et relation hypnotique45
S Ferenczi : « Transfert et introjection », dans Psychanalyse I, p. 93, Payot.. Les psychothérapeutes profitent souvent d’un état de somnolence spontané de leurs patients pour les sensibiliser au traitement ; d’ailleurs l’ordre donné par les parents : « Va dormir ! » exerce manifestement une influence hypnotique sur l’enfant. Beaucoup de sectes religieuses brisent la volonté individuelle des nouveaux adeptes en troublant délibérément et systématiquement leur sommeil ; de même le chasseur amène à l’obéissance le faucon dont il veut faire son esclave docile en l’empêchant de dormir. Manifestement le désir de dormir, de fuir sur le mode hallucinatoire la fatigante réalité en se réfugiant dans le corps maternel ou dans une quiétude plus archaïque encore, est si intense que l'attrait de cette situation peut décupler toutes les forces psychiques et physiques (voir l’exemple des exploits supranormaux accomplis en état d’hypnose). Cependant cela ne diffère guère de la soumission hypnotique en général que nous avons également dû ramener aux sentiments d’amour et de crainte envers les parents (hypnose paternelle et maternelle). Nous avons vu par ailleurs que des facteurs semblables, d’allure hypnotique, jouent également un rôle dans la génitalité quand il s’agit de s’emparer des objets d’amour (caractères sexuels secondaires). La raideur cataleptique de l’hypnotisé, que Bjerre a fait remarquer le premier, rappelle vivement la position fœtale46
Je ne puis souscrire à l’autre affirmation de Bjerre selon laquelle la suggestion aussi est un retour à la période prénatale ; j’ai été amené à rattacher ce mode de réaction psychique à l'influence des parents au cours de l’existence extra-utérine.. La question fréquemment soulevée de savoir si l’amour est de l’hypnose, et notre thèse selon laquelle l’hypnose est en fin de compte de l’amour, trouvent à présent une solution cohérente dans la mesure où toutes les deux peuvent être ramenées à la relation mère-enfant ; et nous pouvons encore élargir notre conception en nous référant aux antécédents phylogénétiquement beaucoup plus anciens (mort simulée par les animaux, mimétisme).
L’état psychique dans le sommeil, que nous avons assimilé à celui de l’orgasme, correspond donc à un sentiment de satisfaction parfait et dépourvu de désirs, qu’un organisme supérieur ne peut reproduire qu’en rétablissant la quiétude intra-utérine. Mais si des stimuli perturbants (résidus de la veille) empêchent cette quiétude, une réinterprétation hallucinatoire (travail du rêve) les transforme en accomplissement de désirs, en rêves ; le sens le plus profond des rêves sexuels, selon les règles de la théorie freudienne du rêve, est d’une part le rapport sexuel (au sens du fantasme œdipien), d’autre part l’existence dans le corps maternel ou le retour à cet état. Donc les observations des naturalistes comme celles des psychanalystes nous obligent à considérer le caractère d’accomplissement de désirs des rêves comme un simple pendant psychique à la tendance générale à la régression maternelle qui se manifeste chez tant d’êtres vivants47
La régression du donneur à un mode d’existence archaïque peut se comparer à l'hallucination dans le sommeil et constituer un exemple de ce que nous pourrions appeler une hallucination organique..
L’analogie entre le sommeil et le coït est encore renforcée par la périodicité qui les caractérise l’un et l’autre. L’accumulation des déchets produits par la fatigue qui prélude à l'envie de dormir nous rappelle vivement la manière dont nous avons imaginé l’accumulation amphimictique de la tension sexuelle et sa décharge. (Voir aussi la théorie biologique du sommeil selon Claparède : « Nous dormons pour ne pas être fatigués48
En français dans le texte.. ») De même, l’effet revigorant du sommeil est à maints égards assimilable à cette capacité de réalisation accrue qui apparaît après une satisfaction sexuelle normale. Mais là encore le rapport avec la forme d’existence intra-utérine constitue le troisième terme de comparaison : l’individu doit la revigoration passagère49
Jung, C. G. : « Wandlungen und Symbole der Libido », Jahrbuch für Psa., IV. 1912 (« Métamorphose et symboles de la libido »). qu’il puise dans la sexualité comme dans le sommeil à ce plongeon dans une existence paradisiaque où il n’y avait pas encore de luttes, seulement croissance et développement, sans effort aucun. On dit que dans les états morbides la guérison a essentiellement lieu pendant le sommeil ; nous estimons qu’on peut aussi parler à juste titre des effets curatifs miraculeux de l’amour ; il semble que dans les deux cas la nature fasse appel à des forces génératrices archaïques pour les mettre au service de la régénération.
Là encore nous pouvons citer des dictons forgés par la sagesse populaire et les propos de certains esprits intuitifs qui paraissent confirmer notre conception. Après une bonne nuit de sommeil, on a l’impression d’une « renaissance ». Selon Shakespeare, dormir c’est :
« The death of each day's life, sore labour’s bath,
Balm of hurt minds, great nature’s second source,
Chief nourisher in life's feast50
« Le sommeil, mort de la vie de chaque jour, bain du travail douloureux, baume des esprits blessés, seconde source de la grande nature, aliment suprême du festin de la vie !... » (Traduction de Maurice Maeterlinck.). »
(Macbeth, II, 2)
Trömner, excellent connaisseur de la physiologie du sommeil, utilise dans son petit livre sur le sommeil nombre de comparaisons que nous considérons avec plus de sérieux que l’auteur lui-même. À propos du réveil, il dit : « ...So entsteht Licht und Leben aus dem Schosse von Nacht und Nichts. Aber die Nacht entlässt ihre Geschöpfe nicht dauernd, sie zwingt sie periodisch zurück in ihren schweigenden Schoss... Wir müssen taglich zurück zum Schosse der allenährenden Nacht. In seinem Dunkel wohnen die wahren Mütter des Daseins51
« C’est ainsi que la lumière et la vie naissent du giron de la Nuit et du Néant... Mais la nuit ne lâche pas ses créatures pour toujours, elle les force périodiquement à revenir dans son giron silencieux. Chaque jour il nous faut revenir bon gré mal gré dans le giron de la nuit nourricière... Dans son obscurité vivent les vraies mires de l’existence. » (Souligné par moi.). »
Nous pouvons aussi citer Hufeland (à l’exemple de Trömner) :
« Schlaf ist des Menschen Pflanzenheit,
Wo Nahrung, Wachstum bass gedeiht,
Wo selbtt die Seel’, vont Tag verwirrt
Hier gleichsam neu geboren wird52
« Le sommeil est l’époque végétale de l’homme, où la nourriture et la croissance prospèrent, où même l'âme, troublée par le jour, renaît à nouveau ».. »
L’état de sommeil, comme l’état psychique dans le coït et l’existence intra-utérine, est une répétition des formes d’existence dépassées depuis longtemps et peut-être même une répétition de l’existence d’avant l’apparition de la vie. Le sommeil, dit un vieux proverbe latin, est le frère de la mort. Les forces traumatiques qui interviennent lors du réveil, cette renaissance quotidienne, sont les mêmes que celles qui jadis ont « éveillé » la matière primitive à la vie. Toute étape évolutive imposée par la nécessité est un réveil d’un état de paix relative. « Le végétal est un animal qui dort »53
En français dans le texte., dit Buffon. Même l’embryogenèse est une sorte de sommeil que seule la répétition palingénétique de la phylogenèse vient troubler à la manière de quelque rêve biographique.
Cependant la principale différence entre le sommeil et le coït pourrait résider dans le fait que le sommeil se contente de répéter la bienheureuse existence intra-utérine, tandis que le coït reproduit aussi les luttes qui se sont produites lors de « l’expulsion du paradis ». (Catastrophes cosmiques, naissance, luttes du sevrage et de l’apprentissage de la propreté.)
10. Conclusions bioanalytiques
Arrivés au terme de notre travail théorique dont le but était de nous fournir quelques éclaircissements, même provisoires, sur le sens et les formes de manifestation du processus génital, considérons le chemin parcouru et tentons de justifier la méthode employée dans l’ardente élaboration de cette hypothèse. Nous sommes partis d’une analyse du processus d’éjaculation qu’on peut encore plus ou moins qualifier de physiologique. Mais dès que nous avons tenté d’élucider un peu plus avant ce processus, nous avons été amené à recourir, sans scrupules, à des connaissances tirées d’un domaine scientifique entièrement différent, la psychologie. Nous ne voulons pas réexaminer ici si un tel procédé est scientifiquement justifiable ou non. Contentons-nous simplement de constater le fait : cet amalgame des connaissances psychologiques et biologiques a montré sa valeur heuristique dans l’étude d’un grand nombre de problèmes ardus rencontrés dans le domaine de la génitalité et de la conservation de l’espèce, et il nous a fourni certains aperçus que la science orthodoxe n’avait même pas permis de pressentir.
Mais nous devons revenir sur ce que nous avons dit à propos des connaissances psychologiques qui peuvent servir à résoudre les problèmes biologiques. Ce ne sont pas les connaissances psychologiques courantes, mais exclusivement nos connaissances psychanalytiques qui nous ont aidé à résoudre ces problèmes, comme nous le montrerons plus loin par des exemples. Pour le moment, soulignons d’une façon générale que la possibilité d’appliquer des notions et des méthodes de la psychanalyse à d’autres domaines de la science constitue pour nous une nouvelle preuve que l’enseignement de Freud nous a donné accès à une part considérable de réalités jusqu’ici inconnues.
Dès le début, en étudiant le mélange amphimictique des qualités pulsionnelles anale et urétrale dans le processus d’éjaculation, nous avons utilisé les notions de déplacement et de condensation qui nous viennent de la psychanalyse. D’autres notions, comme le détachement de leur objet d’énergies quantitativement et qualitativement déterminées et leur transfert sur d’autres objets, ou l’accumulation de différentes sortes et différentes quantités d’énergie sur un seul et même objet, étaient jusqu’à présent exclusivement utilisées en psychanalyse. Nous parlions du déplacement de l’investissement d’énergie d’une représentation sur une autre et de condensation d’énergies hétérogènes sur une représentation déterminée ; jusqu’ici, la biologie ignorait tout de ces mécanismes de déplacement. Pour établir notre hypothèse relative au déplacement et à la condensation organiques, c’est la théorie psychanalytique de l’hystérie qui a servi de transition : déplacement de l’énergie de représentations sur l’activité organique (conversion) et sa retransposition dans la sphère psychique (traitement psychanalytique). On ne fait qu’un pas de plus en supposant qu’un tel échange d’énergie est aussi courant dans une économie purement organique, c’est-à-dire dans l'action réciproque des organes eux-mêmes, et par conséquent accessible à l’analyse. Ainsi avons-nous posé la première pierre pour la fondation d’une nouvelle science bioanalytique, qui transfère systématiquement les connaissances et les méthodes de la psychanalyse dans les sciences naturelles. Quelques autres « premières pierres » vont suivre maintenant.
La coopération des organes et des parties d’organes, selon la « théorie de la génitalité », n’est pas seulement l’addition automatique des forces actives utiles en vue d’une performance commune. Chaque organe possède une certaine « personnalité » ; en chacun se répète le conflit entre les intérêts du Moi et les intérêts libidinaux que seule l’analyse de la personnalité psychique permettait de révéler jusqu’à présent. D’ailleurs la physiologie n’a pas encore accordé une importance suffisante au rôle des énergies libidinales dans le fonctionnement organique tant normal que pathologique ; il faudrait donc, si nos hypothèses relatives à la théorie de la génitalité recevaient une confirmation même partielle, compléter la physiologie et la pathologie actuelles exclusivement fondées sur le principe d'utilité par une biologie du plaisir. Nous pouvons dès maintenant esquisser les grandes lignes de cette nouvelle discipline. Lorsque, dans un chapitre précédent, j’ai tracé un parallèle entre la tendance à l'autotomie et le refoulement, c’est encore à la psychanalyse que j’empruntais. Le retrait de l’investissement des représentations marquées de déplaisir, c’est-à-dire le principe même du processus de refoulement, possède manifestement des modèles organiques ; je pense que notre compréhension des phénomènes naturels se trouverait singulièrement approfondie si l’application d’un mode de pensée psychanalytique permettait de mieux isoler les différentes motivations de tous ces phénomènes vitaux remarquables qui se fondent sur un refoulement organique de cette sorte.
Cette recherche paraît aboutir à un autre résultat, important pour la compréhension de la vie organique en général, en distinguant sur le plan conceptuel les pulsions érotiques au seul service du plaisir et les autres, simplement utilitaires. Mais ce qui serait encore plus important (comme Freud l’a déjà constaté dans sa « théorie des pulsions »), c’est d’établir l’existence d’une tendance régressive régissant la vie psychique comme la vie organique. Tout se passe comme si derrière la façade aisément accessible aux descriptions biologiques survivaient dans les êtres vivants une sorte d'inconscient biologique, des modes de fonctionnement et une organisation appartenant à des phases depuis longtemps dépassées de l’ontogenèse et de la phylogenèse. Ceux-ci n’agissent pas seulement comme les dirigeants occultes de l’activité organique manifeste ; dans certains états particuliers (sommeil, génitalité, maladie organique), leurs tendances archaïques supplantent les activités vitales superficielles, à la manière des archaïsmes psychologiques qui envahissent la conscience normale dans la névrose et la psychose. Il suffit de reprendre ici l'exemple du sommeil et du coït ; dans ces deux états, toute la vie psychique, et en partie aussi physique, régresse à un mode d’existence prénatal et même probablement plus ancien aussi sur le plan phylogénétique. Mais le même raisonnement nous amènera à concevoir aussi les phénomènes d’inflammation, de fièvre, de congestion, voire les réactions pathologiques les plus banales, comme un retour à des modes de fonctionnement embryonnaires ou encore plus anciens.
S’il en est réellement ainsi, si le sens des phénomènes manifestes de la vie normale organique se trouve dissimulé à des profondeurs encore insoupçonnées, alors l’analogie avec les hypothèses formulées par la psychanalyse devient encore plus frappante et nous sommes encore plus fortement incités à compléter notre connaissance en surface des sciences de la vie par une biologie des profondeurs. Tout ceci est en rapport avec un point que nous avons évoqué plus haut. Ce caractère superficiel des conceptions a fait que les sciences naturelles se sont généralement contentées d’une description univoque des phénomènes biologiques. Même la psychanalyse soutenait il y a peu de temps encore que seule la psyché possédait le privilège d’être composée d’éléments tels qu'un seul et même élément puisse s’inscrire simultanément dans plusieurs séries causales génétiquement différentes. L’analyse a défini ce fait par la notion de surdétermination de tout acte psychique, conséquence directe du caractère pluridimensionnel du psychisme. De même que la définition d'un point dans l'espace nécessite au moins trois axes de coordonnées, l’explication d’un fait psychique, et vraisemblablement, d’après ce qui précède, d’un fait scientifique naturel, n’est pas suffisamment déterminée par l’intégration dans une chaîne linéaire ou dans un réseau plan, si ses rapports à une troisième dimension ne sont pas définis avec exactitude. Il y a un fait curieux, qui jusqu'à présent n'a été observé que dans le cadre de l'activité psychique, c'est la possibilité pour un même élément d’être inséré et localisé analytiquement à la fois dans une série actuelle et dans une série de souvenirs, ce qui implique « l'intemporalité » des traces mnésiques inconscientes. Nous avons transposé dans la biologie ces constatations tirées de la vie psychique et c'est ainsi que nous avons pu décrire le coït et le sommeil à la fois comme une décharge de stimuli traumatiques actuels et une expression de la tendance à reproduire l'existence intra-utérine et l'existence aquatique primitive, situations apparemment dépassées depuis longtemps ; nous avons même pressenti que le coït et le sommeil représentaient la résurgence d’une tendance au repos encore beaucoup plus archaïque et primitive (désir pulsionnel de la paix inorganique, pulsion de mort). De cette même façon, l’investigation bioanalytique de l’ensemble des phénomènes biologiques devrait révéler, sous la surface manifeste, l'inconscient biologique. On découvrirait que toutes ces questions oiseuses sur le sens et le but de l’évolution se transformeraient d’elles-mêmes en une recherche des mobiles qui tous ont leurs racines dans le passé.
Permettez-moi de signaler quelques processus auxquels ces constatations peuvent s’appliquer dès maintenant avec profit. Prenons par exemple l'alimentation du nourrisson : en apparence on peut la caractériser parfaitement en décrivant la tétée, les processus digestifs, la distribution des produits nutritifs dans les tissus, leur introduction dans l’économie physico-chimique de l’organisme (calcul des calories). Mais à côté de tout cela, le bio-analyste sera frappé par le fait que la première substance nutritive du nourrisson est en fait le corps de la mère (ou plus exactement ses éléments tissulaires transformés en lait). À l’instar du parasitisme génital et embryonnaire, le bio-analyste va penser que l’homme, en se nourrissant de lait maternel et d’autres produits animaux, est en fait pendant toute sa vie un parasite qui s’incorpore les corps de ses ancêtres humains et animaux mais abandonne à ses hôtes (mère, animal) la tâche de produire la nourriture. En poursuivant cette démarche, le bio-analyste aboutira à la conclusion que ce processus, que nous pourrions appeler la dévoration des ancêtres (phylophagie), se retrouve partout dans le monde vivant. L’omnivore ou le carnivore dévore les herbivores et laisse à ces derniers le soin de produire à partir de la nourriture végétale les substances organiques qui lui sont nécessaires. L’herbivore, lui, se nourrit de plantes et leur confie la tâche d’élaborer à partir des minéraux les substances végétales nécessaires. Suivant la conception bio-analytique, l’alimentation par le lait maternel dissimule et en même temps représente sous une forme quasi méconnaissable toute la phylogenèse de la nutrition54
En partant de molécules protéiniques animales on pourrait donc reconstituer tout le passé végétal et minéral. L’analogie entre analyse psychique et analyse chimique serait ainsi considérablement approfondie.. Notre attention une fois attirée sur ce fait, nous parviendrons certainement à reconnaître dans certaines anomalies de la nutrition, comme dans les cas pathologiques par exemple, une réactivation plus nette de tendances régressives généralement masquées. Ainsi, derrière le symptôme du vomissement nous n’apercevrions pas seulement les causes manifestes, mais aussi les tendances régressives à une époque primitive embryonnaire et phylogénétique où un seul et même canal digestif (la bouche primitive) effectuait le péristaltisme et l’antipéristaltisme.
Cohnheim et Stricker déjà ont considéré les processus inflammatoires non seulement comme des réactions actuelles à des excitations, mais aussi comme une sorte de régression tissulaire à la forme embryonnaire. Je pense que bien des altérations pathologiques nous deviendraient plus compréhensibles si nous parvenions à reconnaître et à suivre l’action des tendances régressives tant dans les processus de décomposition que dans ceux de guérison.
L’étude bio-analytique des processus morbides organiques montrera selon nous que la plus grande partie des symptômes peuvent être ramenés à une redistribution de la « libido d’organe ». Les organes n’accomplissent leur fonction d’utilité que dans la mesure où l’organisme tout entier se préoccupe aussi de satisfaire leurs exigences libidinales (voir les prestations libidinales fournies par l’organe génital au profit du corps tout entier). Si ce service n’est plus assuré, la tendance à l’auto-satisfaction au détriment de la collectivité risque de se réveiller dans les organes, tout comme l’enfant maltraité qui se console par l’auto-satisfaction (voir Freud, l’abandon de la fonction utilitaire dans la cécité hystérique). Mais des lésions locales aussi peuvent entraîner la suspension de l’activité altruiste et le réveil de processus « auto-érotiques » dans les tissus. Lorsque des causes psychiques produisent une maladie organique (Groddeck, Deutsch), il s’agit de transfert de quantités de libido sur un système libidinal organique préexistant. Les troubles vaso-moteurs et trophiques se situent à la limite des maladies névrotiques et organiques, distinction purement artificielle. Une syncope, par exemple, n’est, à première vue, que la conséquence d’une irrigation cérébrale insuffisante ; la conception bio-analytique ajouterait que la régulation de la tension artérielle régresse à une période antérieure à la position verticale, lorsque l’irrigation sanguine du cerveau n’exige pas encore d’action splanchnique aussi élevée. Dans les syncopes d’origine psychogène, cette régression se met au service du refoulement névrotique.
Quant aux prototypes des mécanismes bio-analytiques, nous les trouverons toujours, je pense, dans la structure des névroses et des psychoses qui nous sont les plus familières. En fin de compte, un esprit audacieusement animiste pourrait décrire les processus tant physiologiques que pathologiques en termes de psychologie et de psychiatrie de la vie organique, en gardant à l’esprit les paroles de Goethe :
« Alle Glieder bilden sich aus nach ewigen Gesetsen,
Und die seltsamste Forme bewahrt im Geheimen des Urbild55
« Tous les corps se forment selon des lois éternelles, et la forme la plus étrange est conservée dans le secret du modèle primitif. » Ortvay a signalé que l’étude psychanalytique du refoulement pouvait fournir une explication des phénomènes de dominance et de récessivité des unités héréditaires de Mendel.. »
Nous nous sommes permis dans ce travail d’introduire une autre innovation métabiologique non moins importante, même si elle paraît sans doute un peu étrange à première vue ; il s’agit de l’utilisation du symbolisme comme source de connaissances dans le domaine des sciences exactes et naturelles. Nous avons constaté que les « symboles » découverts par l’analyse dans le psychisme ne sont pas seulement l’expression des jeux fortuits de l’imagination, mais des traces historiquement importantes de faits biologiques « refoulés » ; c’est ainsi que nous avons pu faire quelques hypothèses fondamentalement nouvelles et peut-être pas entièrement inexactes concernant le sens de la génitalité en général et d’un grand nombre de ses aspects partiels. Il est encore impossible de prédire quels sont les nouveaux développements contenus en germe dans cette conception, ni combien de savoir inconscient recèlent les légendes naïves du folklore, les contes et les mythes et surtout le symbolisme luxuriant des rêves.
Autant le point de vue partiel de l’utilitarisme qui domine actuellement l’ensemble des sciences exactes et naturelles a pu profiter à certaines disciplines (la technique), autant il a barré la route à toute conception biologique plus profonde, dont l’accès n’est possible que si nous tenons compte, à côté des mécanismes utilitaires, des divers mécanismes de plaisir qui s’exprimeraient, entre autres, justement par le symbolisme.
En analysant les processus génitaux, nous avons eu à nous occuper abondamment des questions de l’évolution et de l'involution organiques ; nous avons même eu l’audace d’introduire subrepticement une théorie de l’évolution d’un nouveau genre où nous avons tout simplement appliqué à la biologie les observations et les hypothèses psychanalytiques sur les processus d’évolution de la vie psychique56
Voir l’œuvre de Brun, biologiste suisse : Selektionstheorie und Lustprinzip (Théorie de la sélection et principe de plaisir), Zeitschrift f. Psa, IX, qui, a l’aide d’un exemple fourni par une espèce de fourmis, démontre admirablement l’action du « principe de plaisir » sur l’évolution.. Esquissons ne fût-ce que les grandes lignes de cette tentative.
En accord avec nos conclusions tirées d’une étude du « sens de réalité » et avec les études approfondies de Freud sur la vie pulsionnelle, nous sommes partis, pour examiner l’évolution de la génitalité, du fait que seule une excitation extérieure, privation ou catastrophe, peut avoir contraint l’être vivant à changer ses modes de fonctionnement et son organisation. Notre investigation la plus poussée a porté sur ce travail d’adaptation des êtres vivants qui leur a été imposé par une des dernières catastrophes, l’assèchement des océans. Nous avons soutenu que ces êtres se sont certes adaptés à la nouvelle situation, mais avec l’intention secrète de rétablir l'ancienne situation de quiétude dans ce nouveau milieu, le plus vite et le plus souvent possible.
Le sommeil, le coït, mais aussi le développement d’un sac amniotique contenant du liquide amniotique et d’une façon générale la fécondation interne et le développement intra-utérin sont tous, selon notre hypothèse, des organisations tendant à rétablir cette phase d’évolution apparemment dépassée57
Le fait qu’il existe exceptionnellement des amniotes qui s’accouplent est assurément un défaut esthétique de toute la « théorie de la génitalité ». Il est vrai que l’accouplement de ces amniotes ne met en jeu que des organes de copulation « accessoires » (donc non authentiques).. L’analyste est frappé par la ressemblance de ce processus avec le refoulement et le retour du refoulé, tels qu’on les observe dans le psychisme. La ressemblance est si grande que nous devons reconnaître avoir appliqué, inconsciemment il est vrai, la dynamique apprise dans le domaine des névroses à l’interprétation des processus évolutifs. Mais au lieu de nous en excuser, nous proposons d’admettre cette méthode comme légitime et justifiée sur le plan scientifique, convaincu que l’application systématique de cette méthode ne peut qu’enrichir la théorie de l’évolution. Nous croyons donc que le désir de rétablir une position d’équilibre abandonnée par nécessité ne s'éteint jamais complètement mais doit seulement se mettre en veilleuse par moments parce que la censure biologique instituée par les intérêts actuels du Moi s'oppose à sa réalisation58
Un bel exemple de « censure organique » est fourni par le comportement de certains hibernants. Leur corps se refroidit à mesure que la température extérieure s’abaisse. Mais si la température tombe au-dessous d’un certain degré, la production de chaleur recommence immédiatement, la régression à la poïkilothermie est interrompue et l’animal se réveille : l’animal médullaire redevient animal cérébral.. Ainsi dans la biologie aussi nous retrouvons cette modification du principe de plaisir qui là encore peut s’appeler principe de réalité et nous pouvons faire la même constatation qu’en ce qui concerne la vie psychique : cette même force qui incite à la régression, si une instance de censure l’empêche de s’exprimer directement, devient progressive, c’est-à-dire va dans le sens de l’adaptation et d’une plus grande complexité.
Le premier effet de tout choc exogène sera de réveiller la tendance à l’autotomie qui sommeille dans l’organisme (pulsion de mort) ; les éléments organiques ne vont pas manquer l'occasion qui leur est offerte de mourir. Mais si la perturbation est trop violente, donc traumatique, et qu'elle ne suit pas le rythme progressif selon lequel l'organisme s'est autrefois structuré, il se produit une « désintrication » (Freud) imparfaite des pulsions de l'organisme et les éléments de ce début de décomposition deviennent les matériaux de l'évolution ultérieure. Ainsi, dans les expériences de J. Loeb, les ovules d’oursins artificiellement fécondés par l’eau de mer hypotonique meurent à leur périphérie par cytolyse ; plus tard les fragments de cellules mortes forment une membrane qui empêche la décomposition de se poursuivre tandis que, sous l’effet de l’impulsion subie, l’intérieur de la cellule commence à se développer59
L’action du sperme sur l'ovule commence probablement elle aussi par une destruction, mais dont le sens régressif devient ensuite progressif.. Si les philosophes se demandent comment nous concevons cette régénération et cette reprise de l’évolution, nous pourrons répondre sans aucun recours à des idées mystiques. Il se peut que l’« altruisme » qui s’y exprime ne soit qu’une adroite combinaison des égoïsmes élémentaires ; cependant on peut aussi imaginer que le degré de complexité déjà atteint agisse dans un sens régressif sur les produits de décomposition, ou du moins contribue à ce que les organismes soient moins pressés de mourir, mais se reconstruisent eux-mêmes à partir de leurs propres déchets, voire utilisent la force inverse produite par la destruction partielle pour poursuivre leur développement.
Quoi qu’il en soit, la conception bio-analytique des processus d’évolution ne voit partout que des désirs œuvrant à rétablir des états de vie ou de mort antérieurs. L’étude psychanalytique de l’hystérie nous a montré que même dans l’organisme la puissance psychique du désir est si active qu’un désir peut se « matérialiser » dans le corps, transformer le corps selon sa fantaisie. Nous n’avons aucune raison de limiter l’action de ces motions de désir à la vie psychique et d’en exclure la possibilité ailleurs, donc dans l'inconscient biologique ; et nous sommes même tentés de supposer, en accord avec Freud, que seul le recours au désir conçu comme facteur d’évolution peut permettre de comprendre la théorie de l’adaptation selon Lamarck.
Pour en revenir à notre thèse fondamentale : dans la stratification biologique des organismes, toutes les phases antérieures subsistent d’une façon ou d’une autre, séparées par des résistances forgées par la censure, de sorte qu’un examen analytique devrait permettre de reconstruire le passé le plus reculé de l’organisme en partant du comportement et du mode de fonctionnement actuels.
En tout cas nous avons dû renoncer à retenir des processus trop complexes comme explications dernières de l’évolution. Par exemple, quand Lamarck incrimine l’utilisation ou la non-utilisation des organes pour expliquer leur évolution ou leur involution, il ne se rend pas compte qu’en fait il a éludé le véritable problème qui est de savoir pourquoi l’organe vivant prend de la vigueur lorsqu’il est utilisé au lieu de s’user comme une machine inorganique. Seules mes observations recueillies dans le domaine de l’hystérie et des pathonévroses60
Hystérie et pathonévroses. Recueil d’articles de Ferenczi dont la plupart des chapitres sont reproduits dans Psychanalyse III. (N. d. T.) ont pu montrer comment se constitue un contre-investissement trop puissant de l’organe perturbé sous l’influence du désir de rétablir l’équilibre rompu et par le retrait des autres investissements ; ce contre-investissement d’une part sert à protéger les autres organes contre les effets pernicieux, d’autre part constitue une source d’énergie au profit de la guérison et de la régénération. C’est ce qui se passe aussi probablement dans le cas des troubles chroniques affectant le fonctionnement d’un organe, de sorte que le mode de réaction hystéro-pathonévrotique ne serait qu’un exemple de ces déplacements d’énergie qui interviennent dans tout travail d’adaptation ou d’évolution.
Notons en passant que la véritable explication de l’alternance différenciation-intégration proposée par Spencer comme étant la règle qui gouverne l’évolution pourrait être le retour du plaisir refoulé dont nous avons supposé l’existence dans les épisodes de déplaisir acceptés par nécessité, voire introjectés sous forme d’énergies pulsionnelles. La nécessité contraint les organismes au changement, le désir refoulé les pousse à revenir sans cesse à la situation abandonnée et, en quelque sorte, à sa « rédintégration ».
Lors de l’adaptation à la situation nouvelle imposée par la nécessité, la pulsion régressive s’empare probablement en premier lieu des organes et des fonctions qui au cours de l’évolution sont restés « sans emploi ». Il est frappant, par exemple, que chez tous les animaux pourvus d’une queue (chiens, chats), la partie caudale de la colonne vertébrale, autrefois pilier de soutien de segments corporels atrophiés depuis, est devenue l’organe des mouvements d’expression dont nous savons depuis Darwin et Freud qu’ils sont à concevoir comme des régressions à des comportements archaïques. C’est dans ces retraites ou d’autres semblables que se tapit sans doute la tendance régressive dans les moments où l’adaptation est trop difficile, pour reprendre son rôle de facteur structurant une fois le danger majeur surmonté. Par ailleurs, il est soigneusement prévu de couper même l’activité d’adaptation la plus rigoureuse par des périodes de repos pendant lesquelles l’organisme tout entier tombe temporairement dans la régression et toute sa production se résume à des mouvements d’expression (sommeil, coït)61
Citons brièvement quelques autres points de vue « bio-analytiques » concernant l'évolution organique. L’adaptation peut être autoplastique ou alloplastique ; dans le premier cas c’est l’organisation du corps lui-même qui s’adapte aux nouvelles circonstances, dans le second, l’organisme s’efforce de modifier le monde extérieur de façon à rendre l’adaptation corporelle inutile. C’est le mode d’évolution alloplastique qui est le plus « intelligent », spécifiquement « humain », mais il est également très répandu dans le monde animal (construction de nids !). Transformer le monde extérieur va beaucoup plus vite que transformer son propre organisme ; nous pouvons supposer que les animaux qui sont arrivés à ce degré d’évolution possèdent déjà un certain « sens du temps ». L’autoplastie peut être purement régressive (réduction des besoins, retour à des stades plus primitifs) ou bien aussi progressive (développement d’organes nouveaux). Le développement de la motilité (recherche d’un milieu plus favorable) entraîne l’économie de l’adaptation autoplastique. (Principe de Döderlein : parallélisme entre « sessilité » (enracinement) et variabilité accrue d’une part, mobilité et variabilité diminuée d’autre part.)
L’adaptation implique de renoncer à ses objets de satisfaction pour s’habituer à de nouveaux objets, c’est-à-dire transformer une perturbation (toujours pénible au début) en satisfaction. Cela se produit par identification avec le stimulus perturbant puis l’introjection de celui-ci ; ainsi l’épisode perturbant devient une partie du Moi (une pulsion), et le monde intérieur (microscosme
Auteur inconnu
2013-06-29T18:28:15
Noté tel quel dans l'édition de 82.
) devient ainsi le reflet de l’environnement et de ses catastrophes.
Les organes, ou les fonctions organiques nouvellement créées, se superposent simplement aux anciens, sans les détruire ; même lorsque l’ancien matériel est réemployé, l’organisation ou fonction apparemment abandonnée subsiste virtuellement sous forme d’« inconscient biologique » et certaines conditions peuvent en provoquer la réactivation. Nous pouvons comparer ces superpositions à des mécanismes d’inhibition ; par exemple, sur l’« excitabilité » générale primitive s'est construite l’excitation réflexe déjà orientée et sur celle-ci la réaction sélective psychique ; dans les états pathologiques ou autres états exceptionnels (hypnose profonde, fakirisme) le psychisme suspend son activité et l’organisme revient au stade de l’excitabilité réflexe, voire de l’excitabilité primitive..
La bio-analyse ou science analytique de la vie ne peut éviter de prendre position sur le problème du début et de la fin de la vie. Déjà dans la théorie de la génitalité, lorsque nous avons recherché les causes dernières de l’attraction sexuelle, nous avons été amené à dépasser les limites de la vie animée ; Freud, lui aussi, voit dans les phénomènes de l’attraction chimique et physique une analogie avec ce même Éros platonicien qui maintient la cohésion de toute vie. En effet, les physiciens nous disent qu’on peut observer une agitation très intense dans la matière apparemment « morte » ; donc même si cette « vie » est d’un caractère moins instable, il s’agit bien là de vie. La vraie mort, le repos absolu, les physiciens n’en parlent que sur un mode parfaitement théorique lorsqu’ils affirment que toute énergie, selon le deuxième principe fondamental de la thermodynamique, est condamnée à la mort par dissipation. Mais dès maintenant, certains naturalistes62
Nernst : Das Weltgebäude im Lichte der neueren Fortchung (L’univers à la lumière des recherches récentes), 193 affirment que ces énergies dissipées se regroupent périodiquement, même si les périodes sont de très longue durée. Nous pouvons confronter cette conception avec le principe de la sélection naturelle selon Darwin, à savoir que tout changement n’est qu’un effet du hasard, les tendances immanentes ne pouvant pratiquement pas entrer en ligne de compte63
Une fois admise l’hypothèse que dès les entités inorganiques se retrouve cette « excitabilité » que nous reconnaissons comme une propriété de la matière vivante, nous pouvons aussi concevoir les motivations possibles de l’attraction mutuelle de ces éléments. En tout état de cause la fusion de deux éléments pourrait présenter l’avantage que les parties en regard offrent au monde extérieur hostile une surface plus réduite qu'à l’état isolé. Il s’ensuit une « économie d’énergie », et le premier « plaisir ». Quelque chose de ce genre s’exprime aussi dans le coït (« l’animal à deux dos »). Bölsche, de son côté, compare l’attraction entre la terre et le soleil à l’attraction sexuelle.. Mais pour nous qui penchions plutôt, nous l’avons déjà dit, pour les idées plus psychologiques de Lamarck en ce qui concerne l’évolution, il parait plus plausible d’admettre que d’une façon générale il n’existe pas de désintrication totale entre pulsion de mort et pulsion de vie, que même la matière dite « morte », donc inorganique, contient un « germe de vie » et par conséquent des tendances régressives vers le complexe d’ordre supérieur dont la décomposition leur a donné naissance. Qu’il n'y ait pas de vie absolue sans participation de tendances de mort, les sciences naturelles l’affirmaient depuis longtemps ; et récemment Freud a mis en évidence l’action des pulsions de mort dans tout ce qui est vivant. « Le but de toute vie est la mort, car l’inanimé était là avant le vivant. »
Mais peut-être la mort « absolue » n’existe même pas ; peut-être même l’inorganique dissimule des germes de vie et des tendances régressives ; ou peut-être même Nietzsche pourrait avoir raison lorsqu’il dit : « Toute matière inorganique provient de l’organique, c'est de la matière organique morte. Cadavre et homme. » Alors nous devrions définitivement abandonner le problème du commencement et de la fin de la vie et imaginer tout l’univers organique et inorganique comme une oscillation perpétuelle entre pulsions de vie et pulsions de mort où ni la vie ni la mort ne parviendraient jamais à établir leur hégémonie.
À nous médecins, l'« agonie » — d’ailleurs son nom l’indique — ne parait jamais paisible. Même un organisme quasi incapable de vivre lutte contre la mort. Une mort « naturelle », douce, manifestation paisible de la pulsion de mort, n’existe peut-être que dans nos représentations de désir dominées par la pulsion de mort ; dans la réalité la vie finit toujours de façon catastrophique, de même qu’elle a commencé par une catastrophe, la naissance. Il semble qu’on puisse déceler des caractères régressifs dans les symptômes de l’agonie qui s’efforceraient de modeler la mort à l’image de la naissance, pour la rendre ainsi moins cruelle. C’est seulement dans les instants qui précèdent les derniers mouvements respiratoires (parfois un peu plus tôt) qu’on peut observer une réconciliation totale avec la mort, et parfois même des expressions de satisfaction qui signent l’accession à un état de repos parfait, comme par exemple dans l’orgasme après le combat sexuel. La mort, comme le sommeil et le coït, présente des traits qui la rapprochent de la régression intra-utérine. Ce n’est pas sans raison que beaucoup de primitifs enterrent leurs morts en position accroupie, fœtale, et l’identité du symbolisme de la mort et de la naissance dans les rêves et les mythes ne peut être un effet du hasard.
Ainsi nous sommes revenus à notre point de départ : l’importance centrale de la régression au ventre maternel dans la théorie de la génitalité et, nous pouvons l’ajouter maintenant, dans la biologie en général.