IV. Le travail du trépas (1976)

« Le terrible avec les morts, c'est leurs gestes de vie dans notre mémoire. Car alors ils vivent atrocement, et nous n’y comprenons plus rien. »

Albert Cohen,

Le Livre de ma mère.

A propos de ce qui se passe pour l’individu dans les derniers moments de la vie, on dit volontiers qu’on ne peut le saisir qu’en termes de processus physiologiques ou biologiques, comme si les changements qui interviennent alors dans l’appareil psychique échappaient nécessairement à tout effort de compréhension. L’analyste, tout comme le philosophe, devrait donc simplement baisser les bras. C’est une façon de voir typique de notre sensibilité moderne. Dans les temps anciens, note Kurt Eissler, on croyait parfois lire dans l’agonie la lutte d’un dieu ou d’un ange avec des démons49. En somme, on n’hésitait pas à raconter des histoires, à construire des fantasmagories décrivant allusivement ce qui a lieu dans l’esprit in extremis, au cours de ce passage qui, aujourd’hui, va précisément retenir mon attention.

A vrai dire le sujet m’occupait déjà depuis un cerlain temps50, lorsque, en 1974, trois prix Nobel, J. Monod, L. Pau-ling et G. Thompson, publièrent dans la revue The Iîumanist un manifeste en faveur de l’euthanasie *. J’ai conservé ce texte, qui à l’époque fit quelque bruit, et c’est en le relisant maintenant que je me ressouviens du mot d’un de mes plus anciens analysés. Parfaitement étranger à tout savoir analytique, cet homme me disait de temps à autre : « Je pense que... Mais ma pensée me dit que... », le deuxième membre de la phrase contredisant bien entendu presque toujours le premier. La thèse exposée dans le manifeste m’a aussitôt plongé dans une situation compaiable. D’une part, en effet, je croyais en partager spontanément et sans réserves les idées, et d’autre part, au moment de traiter plus à fond ce thème du trépas, voilà que ma « pensée », comme aurait dit mon patient, me soufflait tout autre chose. Je vais donc devoir m’accommoder de réflexions qui, en partie, seront contradictoires.

Aucune morale, affirment les signataires du manifeste, ne saurait interdire à quiconque de mettre fin à sa vie lorsqu’il est atteint d’une horrible maladie contre laquelle les remèdes connus sont sans effets : il « serait barbare et cruel » de maintenir une personne en vie contre sa volonté lorsque cette vie précisément « a perdu toute dignité, beauté et signification », « la souffrance inutile ne devrait pas avoir de place dans les sociétés civilisées ». Dans cette perspective, lorsqu’il n’est plus possible de « vivre pleinement », l’euthanasie devrait être pour chacun une espérance et même un droit. Cette argumentation parait irréfutable, en tout cas on ne lui oppose guère en général que des principes moraux ou religieux bien conventionnels : le mérite du courage, l’affrontement du tragique de l’existence, les vertus de la souffrance, etc. Dans le manifeste, toutefois, deux points m’ont spécialement donné à penser : l’impossibilité de vivre pleinement, notion tout à la fois catégorique et imprécise, qui laisse deviner une problématique narcissique, la crainte de ne pas être à la hauteur des exigences de l’Idéal du Moi ; puis le point de vue éthique, selon lequel « la mort devrait être considérée comme une partie intégrante de la vie ». Mais comment concilier cette conception qui, de l’aveu des auteurs, relève de la morale, voire de la philosophie, avec l’acte purement matériel qui est censé rendre à la vie et à la mort prises ensemble toute leur dignité ? Si la mort n’est plus seulement un ultime accident biologique, le dernier effet d’une détérioration somatique, alors nous sommes tenus de la considérer également comme un événement psychique et de nous comporter en conséquence.

La réflexion psychanalytique, on le sait, est venue au problème de la mort essentiellement par le biais des phénomènes de la répétition et de l’agressivité, c’est-à-dire par l’intermédiaire des choses observables dans la vie. On pourrait tout aussi bien, en suivant le chemin inverse, partir de la mort pour se tourner vers la vie, ou plus exactement, vers un aspect très particulier de la vie parvenue à son terme. Non que je veuille faire une projection de la mort dans la vie jusque dans son origine même, comme le proposent certaines ontologies (Heidegger). Je me contenterai d’envisager ici la période terminale de l’existence du sujet irrémédiablement condamné, autrement dit le trépas en un sens élargi. Mais, dira-t-on, les formes infiniment variées du processus défient toute analyse ; en outre, si les analystes se sont longuement attachés au deuil, qui, lui, est très accessible, ils n’ont guère eu l’occasion de disposer de la mort en tant que « matériel clinique » pour fonder leur réflexion, à moins d’avoir fréquenté un hôpital général, où l’expérience de la mort offre à l’observation les aspects les plus divers. De plus, ceux qui, sentant là un véritable domaine de recherche, ont orienté dans ce sens une part de leur travail, semblent souvent s’être arrêtés en chemin, pour des raisons qui en elles-mêmes déjà mériteraient examen.

L’analyse est pourtant le meilleur moyen de ne pas manquer cette activité psychique essentielle, ce dernier travail que tout être doit accomplir au cours de ce passage qu’est littéralement le trépas. Si le manifeste des Nobel m’a laissé tellement perplexe, c’est que, tout en exprimant la volonté d’intégrer la mort dans la vie, il ne tenait pas compte de toutes les conséquences qu’implique logiquement la formule. La nécessité d’abréger les souffrances de l’individu pour préserver la dignité de sa fin, qui ne la reconnaîtrait ? Seulement, on ne peut pas ignorer qu’elle entraîne indirectement à neutraliser le travail psychique que le moribond peut accomplir naturellement. D’un autre côté, il est non moins certain que la souffrance physique peut porter gravement atteinte à l’activité mentale, mais qui en décidera ? En droit celui qui l’endure ; or à la dernière extrémité il est habité par des pensées contradictoires. Ainsi lorsqu’il réclame que l’on hâte sa fin, il trouve dans le même temps le moyen d’exprimer en sourdine une tout autre demande, qu’il faut savoir déchiffrer. Profondément, le mourant attend qu’on ne se soustraie pas à cette relation, à cet engagement réciproque qu’il propose presque secrètement, parfois à son insu, et dont va dépendre le déroulement du travail du trépas. En fait, il s’engage, en vertu de ce que j’imagine comme une sorte de savoir de l’espèce, dans une ultime expérience relationnelle. Alors que les liens qui l’attachent aux autres sont sur le point de se défaire absolument, il est paradoxalement soulevé par un mouvement puissant, à certains égards passionnel. Par là, il surinvestit ses objets d’amour, car ceux-ci sont indispensables à son dernier effort pour assimiler tout ce qui n’a pu l’être jusque-là dans sa vie pulsionnelle, comme s’il tentait de se mettre complètement au monde avant de disparaître.

On s’étonnera peut-être de n’avoir encore trouvé ici aucune référence à l’instinct de mort. C’est un parti que je prends, j’ai déjà eu l’occasion de m’en expliquer51. Je pense, en effet, que s’il s’agit d’examiner des faits cliniques quels qu’ils soient, mieux vaut mettre provisoirement cette problématique à l’écart. Autrement, entraîné dans une discussion interminable qui, certes, a son utilité, mais à un tout autre niveau, on risque de perdre le contact avec la réalité. En outre, la clinique m’a toujours amené à mettre moins l’accent sur un instinct de mort que sur les modalités de fonctionnement de l’instinct, ou si l’on préfère, sur son destin 52. Plutôt que de me prononcer sur la nature instinctuelle de certains mouvements d’apparence léthale, je préfère maintenir des oppositions fonctionnelles, par exemple l’antagonisme principe de constance principe d’inertie, qui, dans le cas qui m’occupe, me paraissent fournir un appareil théorique suffisant.

Les analystes ayant pu suivre en psychothérapie ou même observer suffisamment longtemps des patients condamnés à brève échéance sont assurément peu nombreux. Leur expérience est d’autant plus précieuse, surtout lorsqu’ils l’ont saisie dans des exposés de cas détaillés, comme l’ont fait Kurt Eissler53, Janice Norton54 et Elisabeth Kübler-Ross55 par exemple ; cette dernière était du reste professeur de psychiatrie à l’Université de Chicago, où elle avait fondé un séminaire de recherches consacré à cette catégorie de patients. Or chacun des auteurs, quoique partant d’observations rigoureuses, faites avec un sens clinique pénétrant, aboutit à des conclusions parfois très contradictoires. On a le sentiment que, là, des pensées opposées cheminent parallèlement, les unes dépendant essentiellement de données contre-transférentielles et de références théoriques — au deuil en particulier ; les autres découlant d’une attitude affective profonde, d’une intuition obscure, mais féconde. Et tandis que l’intuition permet de saisir au plus près ce qui se passe réellement, elle est reléguée au second plan dès qu’il s’agit de formuler une théorie.

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Kurt Eissler, par exemple, souligne avec pertinence que le thérapeute de ces patients doit reconnaître et combler leurs souhaits avant même qu’ils n’aient été exprimés56. Citant Jones, il insiste sur la portée de cette disponibilité absolue, qui, pour le thérapeute, prend la valeur d’un don de sa propre vie au patient. Dès lors, celui-ci peut transformer l’horreur d’avoir été « choisi » par la mort, alors que la vie continue dans le monde, en une mort partagée avec un autre qu’on entraîne avec soi — ce qui correspond peut-être à une nouvelle naissanceB. Eissler n’ignore donc nullement le transfert intense de ces patients qui, loin de se détacher de leurs objets

d’amour, cherchent à les remplacer dès qu’ils leur font défaut. Mais cela ne l’empêche pas d’écrire un peu plus loin que, à l’approche de la mort, l’agonie serait allégée si le patient était capable d’une sorte de travail de deuil sur ses objets d’amour, qui, en lui permettant de désinvestir le monde par avance, le conduirait à accepter la mort comme une (' conséquence naturelle de la constellation économique du moment1 ». Eissler voit fort bien que lorsque les objets restent clairement perçus dans la réalité, un tel désinvestissement n’est guère concevable, mais l’opposition qui subsiste entre ses notations cliniques et son commentaire théorique n’en est pas réduite pour autant.

Le remarquable travail de Janice Norton suggère des critiques analogues. Le cas traité est du reste tout à fait exemplaire. C’est celui d’une jeune femme mariée et mère de deux enfants, que Janice Norton prit en psychothérapie pendant la période terminale d’un cancer généralisé. La patiente, très peu névrosée nous dit-on, était parfaitement au courant de son état. Elle savait qu’il ne lui restait que fort peu de temps à vivre, quelques mois au plus. Comme il arrive fréquemment, la perspective de sa mort prochaine avait sérieusement perturbé ses relations avec son entourage. Ainsi son mari, ses parents, une sœur, qui tous pourtant l’aimaient tendrement, « avaient tellement désinvesti leurs relations avec elle qu’ils ne pouvaient plus lui être d’aucune aide. Pour eux, à maints égards elle était déjà morte ou même retardait par trop le moment de mourir ». Malgré la défection de ses proches, malgré la progression du mal avec son cortège d’infirmités

— par exemple une cécité temporaire —, « le besoin d’un échange avec autrui, loin de diminuer, ne cessa d’augmenter ». Janice Norton semble avoir été immédiatement sensible à cet appel ; elle y répondit spontanément, et constata bientôt le développement d’un transfert très intense, qu’elle put suivre jusque dans ses aspects les plus régressifs. Fort justement, ceux-ci furent compris comme le moyen de maintenir à tous les niveaux un investissement constant et puissant du thérapeute. Ce mouvement allait même si loin que la patiente, tout en parlant de son imagination « sotte et illogique », avait parfois le sentiment que Janice Norton était près d’elle vingt-quatre heures sur vingt-quatre et qu’elle ne cessait pas de lui parler. Au cours de son transfert régressif, la patiente ayant répété quelque chose qui avait trait à ses relations avec sa mère, Janice Norton ne manqua pas d’en tenir compte, elle comprit qu’il lui fallait assumer certaines fonctions du Moi de sa malade, à la manière d’une mère qui joue le rôle de Moi externe de son tout-petit. Janice Norton affirme encore que l’essentiel de la psychothérapie, son objectif majeur, est de faciliter au maximum le développement de cette relation transférentielle régressive, pour protéger le patient contre tout sentiment de perte objectale. De fait, lorsque l’entourage familial et médical fait défaut, exposant le patient à ce qu’il redoute le plus : mourir seul, c’est bien le psychothérapeute qui est le mieux armé pour retenir sur lui tous les investissements. Dans le cas présenté, la patiente, nous dit-on, semble avoir résolu le problème de la séparation inévitable d’avec sa thérapeute en l’entraînant fantasmatiquement avec elle dans la mort, « bien que, ajoutait-elle parfois, cela ne puisse se produire exactement au même moment ». Cette incorporation de l’objet, de même nature que celle qui permettait à la patiente d’halluciner la présence constante de Janice Norton, est jusqu’à un certain point comparable à ce qu’on observe dans le travail du deuil, mais jusqu’à un certain point seulement, car le travail de deuil ne s’accomplit complètement que s’il aboutit à une récupération des investissements placés dans les objets perdus. Si la jeune femme avait bien opéré vis-à-vis de ses proches un certain retrait, la libido ainsi libérée, exaltée même, avait été aussitôt engagée dans sa relation avec la thérapeute, personne dont, pour elle, il n’était justement pas question de faire le deuil. Et, comme elle était pratiquement assurée que son dernier objet ne se déroberait pas, elle n’avait pas de raison de retirer la libido placée dans sa représentation. Tout cela est clair dans l’observation, mais alors pourquoi Janice Norton souscrit-elle aux vues d’Eissler sur le bienfait que serait pour le mourant le deuil anticipé de ses objets ? Pourquoi le trait marquant des derniers mois de la vie de sa patiente lui paraît-il être le travail de deuil qu’elle effectuait sur ses objets d’amour familiaux, alors que le véritable objet, sur quoi tout s’était

concentré, c’était elle, précisément ? Comment pouvait-elle aider la jeune femme à mourir en lui évitant tout vécu de perte objectale, et croire en même temps qu’il est plus facile de mourir quand on s’est séparé de ses objets, autrement dit quand on est déjà mort affectivement ? Toutes ces contradictions relèvent, bien entendu, de l’auto-analyse du thérapeute et je ne les souligne avec insistance que parce qu’elles me paraissent inévitables, tant que, jugeant l’importance des personnes réelles et de leur présence effective absolument décisive, on en vient à sous-estimer le rôle des représentations d’objets et des fantasmes dans lesquels elles sont prises. De même, la prégnance de ce qui se passe au niveau des processus conscients empêche d’appréhender clairement le fantastique bouleversement topique qui se produit dans ces moments ultimes. Enfin, en s’intéressant presque exclusivement au destin des affects — pris du reste dans le sens le plus restrictif —, on néglige celui de l’instinct, alors que les « nouveaux processus structuraux » dont parle Eissler lui-même pourraient justement en dépendre. Mais c’est aussi que le thème de la mort exerce sur nous une telle fascination qu’on en oublie de s’interroger sur le sort de la libido, dont les mouvements, à l’approche de la fin, sont pourtant tout aussi dignes d’attention que ceux qui ont présidé aux débuts de la vie. Pour ma part, j’ai toujours été frappé par le fait que ce qui nous échappe si souvent est parfaitement perçu et compris par le personnel infirmier ou un entourage médical attentif *. A la veille de leur mort ou dans les heures qui la précèdent, le comportement de certains patients laisse déduire un surprenant élan pulsionnel, une avidité régressive, positivement unheimlich, qui ferait presque parler d’un embrasement du désir. Une malade qui avait complètement perdu l’appétit se jette voracement sur la nourriture : alors qu’on s’attendait à une extinction accélérée de tous les processus, voilà que, sous une forme certes insolite qui crée quelque malaise, la vie semble soudain s’exalter. Et comme les personnes encore présentes sont étreintes par l’angoisse, elles utilisent pleinement le déni. Aveugles à la valeur de pronostic funeste de ce qui se passe, elles commencent à croire à une miraculeuse rémission. Le cas n’est pas très fréquent, dira-t-on peut-être, c’est vrai, mais l’argument statistique est sans portée lorsqu’il s’agit de cerner la forme exemplaire d’un fait. En outre, la « passion » dont je parle n’est pas toujours spectaculaire, et pour qui veut tout ignorer, il est facile de ne pas la voir. On ne devrait pourtant pas passer à côté de l’aspect relationnel du phénomène, dans lequel les objets d’amour investis sont comme entourés par des bras innombrables et secrètement invités à une sorte de fête maniaque. Je me souviens d’un cas bien proche de celui que décrit Janice Norton, celui d’une jeune femme, parvenue elle aussi au dernier stade d’une généralisation cancéreuse. Jusqu’à la fin son comportement stupéfia son entourage, moi y compris ; sur le moment je le reconnais, je ne l’ai absolument pas saisi. Dans l’affreuse condition que l’on imagine, avec des métastases osseuses diffuses et affectant même le rachis, elle noua une relation amoureuse complète avec un de ses chirurgiens, celui-là même qui l’avait informée clairement de son état, et par conséquent, du pronostic. Bien que l’authenticité de cette liaison ne fît de doute pour personne, certains furent tout de même quelque peu choqués par l’attitude du chirurgien, une personnalité de grande intelligence et de haute valeur morale, qui, après qu’il eut été happé par le mouvement transférentiel, avait obscurément senti là quelque chose de fondamental. Mais l’élan de la jeune femme ne se limita pas à ce mouvement amoureux, elle réussit encore à mener à bien un travail personnel dans un domaine touchant l’art, et pour en assurer le succès, elle participa peu de jours avant sa mort à une manifestation où on la mena en ambulance. Ce jour-là, chacun la vit souriante, parée, brillante, tandis que médecins et infirmiers tremblaient à l’idée de l’accident prévisible qui eût pu briser dans l’instant cette intensité de vie.

Avant de rencontrer Janice Norton, sa future patiente avait fait une expérience très analogue à celle de cette jeune femme. Un pasteur venait lui rendre de fréquentes visites, au cours desquelles ils & philosophaient » ensemble sur l’immortalité. Bien que des plus sceptiques à l’égard de toute doctrine religieuse, la patiente prenait plaisir à ces rencontres. Peu à peu ces conversations avec le pasteur prirent un tour plus personnel, et le jour vint où elle lui déclara qu’elle était sur le point de tomber amoureuse de lui. On conçoit la réaction du pasteur, en l’occurrence moins profond que le chirurgien. Il répondit à la jeune femme qu’elle n’était pas réaliste, qu’elle était malade, etc. Il écourta donc les visites, puis prit la fuite. La perspective de la mort n’avait aucunement diminué le besoin que la malade avait des autres, mais au contraire l’avait exacerbé. Ses facultés créatrices se ranimèrent également, et dans les mois qui suivirent l’apparition des métastases, elle recommença d’écrire des poèmes. Un autre petit fait exprime bien, au centre de ces étranges transferts, les espoirs tenaces de la libido. Un jour, la jeune femme demanda à Janice Norton de bien vouloir porter après sa mort une robe rouge qu’elle avait acquise juste avant le début de sa maladie dans l’intention de se rendre plus séduisante.

Ces observations qui, au demeurant, ne sont nullement exceptionnelles, montrent bien les deux traits essentiels caractérisant l’approche de la mort, je veux dire : l'expansion libidinale et l'exaltation de l'appétence relationnelle. Ces deux mouvements, qui se commandent l’un l’autre, président à l’activité psychique particulière que j’ai nommée travail du trépas, en pensant au deuil bien entendu, mais aussi au rêve qui, à sa manière, répond à une exigence du même ordre. Un rapprochement qui n’est nullement arbitraire, j’en ai trouvé la confirmation dans un fait exemplaire prouvant que ces deux aspects du même travail sont quasiment indissociables. Assistant sans aucun recours à la mort d’un homme victime d’une hémorragie cataclysmique, un collègue me rapporte qu’il a vu le malheureux sortir soudain de l’état d’inconscience dans lequel il sombrait pour s’écrier juste avant de s’éteindre : « Je viens de faire un drôle de rêve. » Dans cet épisode dramatique, l’homme, de toute évidence, tente un dernier effort avant de mourir, comme s’il voulait ou devait encore faire quelque chose de ce qui lui arrive.

C’est une idée très répandue que l’être humain voit défiler toute son existence en images au moment même où elle va finir. Mais comment, et pourquoi ? Quel sens faut-il attribuer à cette sorte de sacrifice de la vie antérieure qui serait alors

accompli ? Pour saisir d’un peu plus près cette contraction extrême du dernier instant, il faut sans aucun doute revenir à l’observation, s’interroger sur la finalité de cette activité psychique dont on perçoit plus ou moins clairement les effets, et tenir compte d’un aspect essentiel du problème, qui est la temporalité. Dans le rapprochement que l’on peut faire entre travail du deuil et travail du trépas, il ne faut pas négliger une différence de poids, à savoir que, contrairement à l’endeuillé, le mourant ne dispose que de très peu de temps pour accomplir sa tâche et que celle-ci de surcroît est bien la dernière. Il est vrai que la façon dont ce « peu de temps » est vécu n’a peut-être rien à voir avec ce que nous appelons tel dans la vie. Pour ma part, je suis porté à croire qu’il se produit à la toute fin une extraordinaire condensation des données temporelles, comme si la conscience était alors progressivement affectée par la loi d’intemporalité qui règne dans l’inconscient. En outre il est probable que le travail du trépas, au sens où je l’entends, commence bien avant l’agonie. Pour la patiente de Janice Norton comme pour la jeune femme dont j’ai rapporté le cas, il avait certainement débuté plusieurs mois avant la mort, en partie peut-être parce qu’elles avaient été complètement informées de leur état, ce qui, dans ma perspective, crée d’ailleurs la situation la plus favorable. Elisabeth Kübler-Ross qui a pu étudier plus de deux cents cas, partage au moins en partie ce point de vue, lorsqu’elle propose de remplacer la question : « Dois-je informer mon patient ? » par : « Comment vais-je partager ce savoir avec lui ? » Quoi qu’il en soit, ajoute-t-elle, qu’ils aient été informés ou non, la plupart d’entre eux, sinon tous, « savaient ». Le travail du trépas commencerait-il donc à partir du moment où le patient « sait » ? J’inclinerais à penser qu’il commence très tôt, car les processus morbides qui se déroulent dans le corps, l’appareil psychique ne manque jamais de les repérer à quelque niveau ; après quoi, il les met en forme, les raconte symboliquement, les dramatise comme dans un rêve voué à l’oubli, ce qui implique déjà un certain engagement de la libido. Pour Elisabeth Kübler-Ross, qui a surtout en vue ce qui affecte le Moi conscient, le patient informé de son état traverse plusieurs phases, qui vont du refus et de la dénégation à l’abandon de l’espoir impossible, en passant par la colère, les marchandages, la dépression et la résignation. Si le travail du trépas commence assez précocement, comme je le crois, il est possible qu’il ne s’effectue vraiment qu’à partir du moment où, ayant dépassé la phase de dépression, le patient en vient à une sorte d’acceptation du destin, ce qui, comme j’ai pu l’observer une fois, peut se faire dans un temps très court.

Chez certains, les représentations des objets d’amour sont si puissamment investies que le travail du trépas se déclenche de lui-même, mais le plus souvent, les cas que j’ai cités en sont de bons exemples, la présence d’une personne réelle est indispensable. Que celle-ci soit un proche, un médecin ou un analyste, il faut qu’elle soit réellement disponible, sûre aux yeux du patient et capable de combler ses besoins élémentaires, ce qui signifie profondément qu’elle accepte qu’une part d’elle-même soit incluse dans l’orbite funèbre du mourant. Je préfère cette dernière formule à celle d’empathie ou d’identification, toujours sélective, parce qu’elle tient mieux compte de ce fait essentiel que, dans la désastreuse défaillance des objets d’amour ou de leurs substituts, ce qui est en jeu en réalité, c’est la crainte ancestrale d’être entraîné, dévoré par le moribond. Le folklore illustre abondamment ces craintes, mais même dans l’expérience courante, il n’est pas rare d’entendre un survivant affirmer que le défunt cherche toujours à le happer par-delà la mort. Je reviendrai sur les conséquences de la carence des objets, pour l’instant j’observerai seulement que lorsque l’objet n’est plus à même de tenir son rôle, sa représentation s’altère dans l’esprit du patient, lequel remplace alors la relation avec elle par une identification, ou pour reprendre le terme de Fuchs dans son étude sur l’introjection, par l’édification d’un monument funéraire A mesure que les capacités de transfert du mourant augmentent, en vertu de ce mouvement paradoxal que j’ai tenté de décrire, il concentre peu à peu ses intérêts profonds sur une seule personne, qui du reste ne fait pas nécessairement partie des êtres les plus chers. L’important, en effet, c’est que l’objet élu soit capable

1. S. H. Fuchs, « On Introjection », InUrn. Journ. Psychoanal., 18, 1937, p. 269.

do s’exposer sans angoisse excessive au large mouvement captatif qui tend à l’envelopper entièrement, autrement dit qu’il n’y ait pas entre ce qu’il est et sa représentation dans l’esprit du patient une trop grande hétérogénéité. Le mourant forme ainsi avec son objet ce que j’appellerai sa dernière dyade, par une allusion à la mère dont l’objet pourrait bien être une dernière incarnation. Le cri de l’homme appelant sa mère juste avant d’expirer, qu’il soit appel au secours ou annonce de prochaines retrouvailles, n’est que l’exemple le plus frappant de cette synonymie de la mère et de la mort qui devient patente lorsque certaines limites de la lutte pour la vie sont dépassées. De toute façon, le mourant et son objet clé constituent une sorte d’organisme, presque un corps indépendant, qui, pour pouvoir se construire, exige un contact physique entre ses éléments. Je crains qu’on ne mesure jamais assez l’importance de ce contact élémentaire, fût-il limité à deux mains qui se tiennent lorsque l’échange verbal est devenu impossible. Il y a là quelque chose de comparable à l’organisme formé par la mère et son nouveau-né ; ou encore au schéma corporel en voie d’édification, quand l’image globale et intégrée dépend de prises de contact successives entre les divers segments du corps. Au sein de cette organisation, tout mouvement affectant l’un des protagonistes se répercute et s’amplifie chez l’autre ; le moindre retrait contre-transfé-rentiel se traduit aussitôt par une modification plus ou moins subtile du comportement qui disloque la dyade. Cette relation est si fragile que non seulement tout retrait affectif lui est fatal, mais que, pour la maintenir, l’objet clé devrait ne pas être constamment assujetti à une nécessité impérieuse de maintenir la stabilité de son identité. En d’autres termes, il devrait pourvoir et assurer une présence qualitativement sans défaillance, et assumer un certain flou de son être, vivre presque en état d’absence. Chose difficile, certes, mais non pas impossible puisque, en fait, nous n’accédons jamais à une identité indubitable, parfaitement stable, définie sans ambiguïté. Quoique, pour la plupart, ce statut de relative a-personnalisation ne soit peut-être accessible qu’à certains moments extrêmes, il résulte naturellement de l’indifférenciation originaire du « je » et du « non-je » qui, selon moi, n’est jamais complètement réduite et est toujours prête à réappa-raitre, même en dehors du champ de la pathologie. Si dans l’unité organique que forment le mourant et son objet clé, le « je » est toujours en partie déposé dans l’autre, tout en se déplaçant dans cet espace transitionnel que j’ai décrit ailleurs comme spectre d’identitéx, c’est que la libido narcissique reste prise dans les représentations d’objet, lesquelles peuvent être autres sans perdre leur caractère familier. En cela, la fin de la vie ressemble profondément à son commencement, ce que l’observation confirme et que nous saurions probablement d’instinct, n’étaient nos idées préconçues. On peut même accorder à cette analogie, que la sagesse populaire et les poètes ont souvent pressentie, une valeur en quelque sorte dynamique, en ce sens que la mort à venir participerait tout au long de la vie à la construction de l’être et à l’individualisation dont il est susceptible. Une hypothèse qui me met en contradiction avec ce que je disais plus haut de la projection rétrograde de la mort dans la vie, mais qui n’est pas pour autant à exclure entièrement.

On conçoit que les processus que j’ai en vue ici bouleversent la topique. A un certain moment le Moi de celui qui va mourir sait et en même temps ne sait pas ; le Ça, lui, continue de désirer et de se manifester, avec l’agrément inattendu du Moi, que l’exacerbation de l’instinct a pourtant alerté. La proximité de l’échéance fatale provoque donc une sorte de clivage du Moi, ayant pour conséquence le cheminement de deux lignes de pensées contradictoires, dont chacune s’exprime indépendamment de l’autre. Selon l’une, la mort, en vertu d’un véritable déni, n’existe tout simplement pas ; selon l’autre, tout aussi clairement affirmée, il n’y a plus qu’à se résigner ou même souhaiter en finir au plus vite. En somme, on se trouve là en face d’une situation tout à fait comparable à celle de la psychose, à ceci près qu’elle ne découle pas d’un trouble mental. Dans ces certains cas toutefois, la position se rapprocherait plutôt du schéma névrotique, la résignation masquant à peine une appétence relationnelle parfaitement consciente, tandis que le fondement pulsionnel est soit tout à fait ignoré, soit perçu indirectement, lorsque le déplacement sur l’objet transférentiel fait de ce dernier le représentant du mourant dans le monde, là où se vivent les expériences de satisfaction. C’est dans ce sens qu’on pourrait interpréter le don de la robe rouge que Janice Norton reçut de sa patiente.

Un tel élan n’empêche pourtant pas le Moi, sans doute en partie gouverné par son idéal, de revendiquer parfois orgueilleusement son droit à la mort, mais même alors, il est sans pouvoir réel sur le processus transférentiel. Encore faut-il s’entendre sur le sens donné à la notion de transfert ; pour ma part j’ai adopté ici, comme je l’ai déjà fait ailleurs*, la définition proposée par Ferenczi et reprise par Maria Torok57 et Nicolas Abraham58. Dans l’observation de Janice Norton, on a vu comment les intérêts de la patiente se concentraient certes sur un seul objet, et comment une relation ancienne se répétait à cette occasion, mais surtout, comment l’analyste se trouvait peu à peu englobée, digérée. Grâce à la distension progressive de son être psychique, le mourant absorbe l’objet dans son espace érotique, et si totalement parfois qu’il ne ressent même plus l’absence de la personne réelle. Ce trouble des perceptions internes et externes qui relève d’une profonde régression des relations objectales, peut certes céder au cours d’intervalles libres dans lesquels les fonctions du Moi sont tout à fait exemptes de régression. Mais il peut aussi durer longtemps, ce moment pendant lequel les limites entre le dedans et le dehors tendent à s’effacer ; et lorsque la représentation de l’objet est presque entièrement chargée de la libido narcissique que le mourant ne cesse d’engager, on peut dire que les frontières de l’être n’ont plus aucune stabilité. C’est précisément ce mouvement d’allure « phagocytante » que l’entourage du mourant a de plus en plus de mal à tolérer. Les autres, en effet, sont hors d’état de comprendre le sens que peut avoir cette expansion indéfinie de l’être psychique, chez quelqu’un qui, ils le sentent bien, tend à les inclure en lui et à les dissoudre. Comment se rendraient-ils compte qu’ils sont, en tant qu’ « incorporats », au service d’une dernière passion grâce à laquelle le mourant devrait pouvoir ressaisir et assimiler toute une masse de désirs instinctuels dirigés vers eux que, jusque-là, il n’a pu qu’incomplètement intégrer ? La patiente de Janice Norton n’est assurément pas la seule à craindre de ne plus être attirante, à pleurer toutes les expériences qu’elle n’avait pu vivre et ne vivrait jamais avec ceux qu’elle avait aimés. Échappant aux limitations ordinaires qu’imposent les lois de la temporalité, celles qui gouvernent les systèmes supérieurs, la prodigieuse expansion du Moi qui accompagne l’agonie est donc finalement au service d’une introjection pulsionnelle qui, en retour, augmente l’être en dilatant indéfiniment son narcissisme.

Cette problématique n’est pas sans rapport avec celle de l’amour-passion. C’est à juste titre que Chr. David affirme, contrairement aux vues développées par Freud dans Introduction au narcissisme, que l’état amoureux « ne peut être jugé comme un appauvrissement, puisqu’il est en même temps une réassurance narcissique très efficace59 ». Le thème romantique des liens étroits entre l’amour et la mort trouve ici sa confirmation. Cela dit, le « je » du mourant, si tant est qu’on puisse encore parler de « je », n’a plus de place dans le spectre d'identité,, ou plus exactement il y est partout en même temps, ce qui équivaut à ne plus être.

De toutes les observations faites au chevet des mourants, on peut conclure que le malade condamné ne se sépare de ceux qui lui sont chers que lorsqu’il est convaincu qu’ils ne peuvent plus assumer leur fonction. L’idée selon laquelle la mort serait plus douce pour qui réussit à se séparer de ses objets par avance revient pour moi à prôner une sorte d'euthanasie psychique, c’est-à-dire quelque chose qui fait échec au travail du trépas. Reste le problème de la douleur ; c’est également un fait d’expérience que même les douleurs les plus intenses ne sont pas toujours sans remède ; très peu de morphine suffisait à la patiente de Janice Norton, pourtant envahie de métastases affectant les poumons et le squelette, ce qui illustre la possibilité que la prise en charge du mourant par un objet clé, assumant pleinement son rôle, dispose d’un réel pouvoir sur les phénomènes algiques. Freud lui-même

était convaincu que « les douleurs corporelles, même les plus intenses, ne se produisent pas (ou restent inconscientes) lorsque l’esprit est saisi par un autre intérêt1 ». Pour ma part, j’ajouterai que lorsqu’elles se produisent tout de même et qu’elles sont rebelles à toute thérapeutique, les douleurs annulent les capacités d’investissement et jouent alors dans le même sens que l’abandon.

On dira peut-être que je n’ai décrit ici qu’une « mort exemplaire ». Il se peut, mais l’exemple tire sa valeur de faits d’expérience précis, relevés du reste par d’autres auteurs et il me paraît digne d’être considéré. Exemplaire aussi, dira-t-on, l’image de celui qui retire volontairement les investissements qu’il avait placés dans ses objets d’amour, qui décide en faveur d’une maîtrise des événements et choisit librement la mort quand son jugement le convainc que la poursuite de la lutte est devenue vaine. Celui-là n’en impose-t-il pas par sa dignité et peut-être sa sagesse ? Moralement, certes, mais psychanalytiquement parlant, il pourrait bien s’agir là d’une erreur du Moi, en quelque sorte d’une « méprise narcissique ». En désexualisant ses relations objectales, l’homme nie sa débilité et sa dépendance, et son acceptation raisonnée du destin peut contribuer à augmenter son estime de lui-même. Si imposante qu’elle paraisse cependant, la décision d’en finir n’en scelle pas moins la faillite de l’imaginaire, elle affirme la prééminence des fonctions du jugement et, par là, l’hypertrophie du Moi-réalité. Pourquoi le Moi-plaisir, avec les activités fantasmatiques qui le spécifient, devrait-il s’éteindre le premier ou être condamné à ne pas jouer son rôle jusqu’au bout ? Qui saura quand, comment, à quel point les infirmités grandissantes altèrent les activités inconscientes qui ont lieu au plus profond du mourant ? Personne, pas même lui. Faute de franchir à rebours ce temps nodal du développement où l’enfant renonce à la satisfaction hallucinatoire pour tout à la fois représenter le réel et ouvrir une voie aux activités fantasmatiques, celui qui prend l’initiative de précipiter sa fin engage avant l’heure une dégradation qualitative de son énergie psychique, de sa libido, soumis dès lors à la seule loi du principe d’inertie. Dans ce cas, pour paraphraser une formule célèbre, l’ombre du Moi est tombée sur le Ça. Ainsi se trouve accompli dans la hâte ce que Freud appelle « la défaite de la pulsion qui oblige tout vivant à tenir bon à la vie1 », j’ajouterai, quant à moi, à vivre jusqu’à l’extrême limite. Le plus souvent, toutefois, ce sont les autres, je l’ai dit, qui entravent le travail du trépas. Aveugles à ce qui se passe, ils refusent le rôle d’objets clés du mourant, ou bien ils l’acceptent à moitié en attendant que celui-ci prenne l’initiative de rompre l’organisation qu’il tente de construire avec eux. Là on attend du mourant qu’il retire en lui toute sa libido pour la laisser se dégrader, sans se demander si la déperdition dont il souffre concerne son Moi ou ses objets ; autrement dit, on le conduit à quelque chose qui n’est pas le travail du deuil, mais celui de la mélancolie. Et lorsque cela tarde trop à s’accomplir, ceux qui avaient été d’abord des objets d’amour et qui avaient aimé ne voient plus dans le mourant qu’une chose un peu sale, une sorte de reste qu’il faut cacher, presque une souillure dont il faut se débarrasser. Par là l’objet qui refuse son rôle s’expose à rater lui-même son deuil et à échouer plus tard au moment de sa propre mort. Quant au condamné abandonné à sa condition malheureuse, il manque sa dernière tâche. Il n’a plus d’autre issue que de s’enfoncer inéluctablement dans une position mélancolique, à moins qu’il ne reste fixé à cette autre phase, normalement fugitive, où ne parle plus que la haine à l’égard du vivant. J’ai gardé le souvenir d’un homme jeune que j’ai très bien connu et qui, sachant ses jours comptés, se fit offrir une carabine pour tirer les oiseaux qui venaient se percher dans un arbre, juste devant sa fenêtre grande ouverte.


49    Kurt Eissler, The Psychiatrist and the Dying Patient, 1955, Int. University Press, New York.

50    Cf., supra, « S.j.e.m. ■, p. 151.

51    Cf., supra, « S.j.e.m. ».

52    Cf., supra, « Un cas de masochisme pervers ».

53    Kurt Eissler, op. cit.

54    Janice Norton, € Treatment of a Dying Patient », in The Psychoanalytic Study ofthe Child, V, XVIII.

55    Elisabeth Kübler-Ross, ■ On dealh and dying », Tavistock Publications, 1969.

56    Op. cit., p. 126.

57    Maria Torok, « Maladie du deuil et fantasme du cadavre exquis », Rev. franç. Psychanal., XXXII, 1968, 4.

58    Nicolas Abraham et Maria Torok, « Introjecter, Incorporer », Nouvelle Rtv. Psychanal., VI, automne 1972.

59 Ch. David, L’état amoureux, Payot, 1971, p. 241.