Deuxième partie. La mathésis lacanienne. Autre, objet, sujet

Le propre de la pensée lacanienne de l’inconscient est de le déchiffrer au moyen d’une notation littérale : opérateurs de l’objet, de l’Autre et du sujet.

Si la trilogie SRI/RSI constitue la base géométrique (topologique) de la « pensée-Lacan », c’est au moyen de S/A/a qu’il en élabore l’algèbre. Elles sont assurément croisées, en sorte que l’usage n’en est possible que par les traverses d’un plan à l’autre. Il est donc essentiel de fixer la signification de ces opérateurs qui renvoient, en leur articulation, à la théorie du désir que l’on a vu émerger. Cela revient à apprendre à écrire et à maîtriser le jeu sur la lettre : ainsi ne parle-t-on pas de la même chose selon que l’on emploie la majuscule ou la minuscule. Il est décisif de distinguer, dans l’écriture lacanienne, le « petit autre » du « grand Autre », sous peine de confusion ou d’« amphibologie », c’est-à-dire de confusion des registres (« dyslexie » qui produit des effets funestes dans l’acte analytique même). Et c’est précisément pour corriger certaines confusions postfreudiennes que l’écriture en est requise. La nécessité de les distinguer par la taille de la lettre est le signal d’une distinction à opérer.

Le schéma L aura permis de positionner le sujet (barré), l’Autre et le petit autre selon le dédoublement imposé par l’imaginaire (a/á) (infra, p. 104).

On peut se demander là encore dans quel ordre doit se déployer cette séquence : faut-il aller du sujet à l’Autre, via l’objet — dans la mesure où le sujet est le premier maillon ? De l’Autre au sujet, via l’objet — dans la mesure où l’Autre précède le sujet ?

Il est vrai que, chronologiquement, Lacan a pris la mesure de la fonction de l’Autre, avant de spécifier le sujet comme « divisé » et de mettre au jour — last but not least — l’objet (« a »).

Il paraît en fait logique de partir de l’Autre, dans la mesure où c’est depuis cette place que Lacan vient briser l’illusion psychologique — jusqu’en sa variante intersubjective –, afin d’en ordonner les fonctions. Ensuite peut être mis au jour, en sa position centrale, l’objet, dans la mesure où Lacan y situe son apport proprement dit. Enfin, le sujet est le point sur lequel la modification anthropologique se notifie en dernière analyse : c’est cette pensée autre du sujet qui mérite donc de conclure le déploiement de la mathésis lacanienne.