Chapitre II. La théorie du signifiant

« Un jour je me suis aperçu qu’il était difficile de ne pas entrer dans la linguistique à partir du moment où l’inconscient était découvert. »

Par cette formule rétrospective, au seuil du Séminaire Encore(19 décembre 1972), Lacan résume ce dont il s’agit. La théorie lacanienne fait du langage le présupposé de la psychanalyse : « C’est toute la structure du langage que l’expérience analytique découvre dans l’inconscient » (ILI, E, 495). Il s’agit de radicaliser ce constat élémentaire et fondamental que l’analyse est expérience de parole : la parole n’en est pas seulement le médium, mais bien le fondement. C’est un article — cette « passion du signifiant » (SP, 688) — sur lequel la pensée de Lacan est restée d’une fidélité indéfectible, mais selon des paliers où cet énoncé se radicalise.

La formule selon laquelle « l’inconscient est structuré comme un langage » — qui apparaît en 1960, au cours du congrès de Bonneval (PI) — mérite de figurer en épigraphe de sa théorie. Quoique cela évoque l’« Au commencement était le Verbe… » du « quatrième Évangile » (johannique) (DR, AE, 135), l’opération s’appuie sur une référence à la linguistique (de Saussure à Jakobson), comme strict corrélat de « la découverte de l’inconscient », qui implique qu’il y a un discours articulé du symptôme (infra, p. 90).

1. Saussure avec Freud : l’algorithme lacanien

Cette formule s’inscrit en effet en référence à la linguistique saussurienne.

Lacan l’emprunte à l’usage qu’en fait Ferdinand de Saussure (1857-1913) dans son Cours de linguistique générale, issu des leçons professées entre 1906 et 1911 à l’université de Genève17.

Pour juger de cet emprunt, il faut rappeler que la linguistique rompt avec l’axiome de la philosophie du langage, celui d’une mise en rapport du mot ou signe avec une réalité, ce qui pose la question de la « mentalisation » de la réalité. Saussure part du « signe linguistique », unité de base de la langue comme système, qui relie non pas un contenu psychique à un référent matériel — puisque les deux faces en sont psychiques — mais un « concept » ou idée (signifié) et une « image acoustique » (signifiant). Signifiant et signifié sont des relata, qu’unit une relation purement arbitraire : autrement dit, il n’y a aucune ressemblance nécessaire entre signifiant et signifié. De plus, les signes linguistiques sont reliés entre eux selon les deux axes, « syntagmatique » — selon la connexion avec les autres « signifiants » — et « paradigmatique » — selon les analogies de signifiés. Il apparaît ainsi que la langue est un système différentiel où chaque « unité » se définit de se distinguer des autres (comme « valeur linguistique »).

Lacan, faisant fond sur la révolution saussurienne dont la pensée française, accuse réception au début des années 1950, radicalise la théorie du signifiant. Ce recours à la linguistique, dont l’enjeu est de penser le désir, en sa dimension inconsciente, implique une révision de la conception saussurienne du « signe linguistique » (entamée in S I, 23 juin 1954).

En premier lieu, il le place en position dominante par rapport au signifié, soit S/s, présenté comme « algorithme » (ILI, E, 497). On peut le vérifier en remarquant qu’un mot se déchiffre moins par rapport à son signifié que par son renvoi à d’autres mots. L’« effet de sens » est le rebond d’un signifiant sur l’autre — ce qui ouvre l’idée de chaîne signifiante. Ce qui est à penser est donc l’autonomie du signifiant et sa valeur comme pure différence et non comme différence qualitative, le signifiant se définissant d’être ce que n’est pas l’autre signifiant. Mieux : « Plus il ne signifie rien, plus le signifiant est indestructible » (S III, p. 210).

En deuxième lieu, il met ainsi l’accent sur la barre de séparation. Signifiant et signifié ne sont pas seulement distingués, ils sont séparés.

En troisième lieu, il introduit la notion de « point de capiton », opération par laquelle « le signifiant arrête le glissement autrement indéfini de la signification » et qui trouve dans la phrase et sa ponctuation son modèle diachronique (SSDDIF, E, 805).

2. Le signifiant ou la lettre du désir : praxis du signifiant et signifiant phallique

Ces modifications se justifient par le fait qu’il réfère le signifiant au désir. C’est ce qui justifie cet emprunt à la linguistique. L’examen de La Lettre volée d’Edgar Poe donne l’occasion, dans le Séminaire du 26 avril 1955, de mettre en évidence cette domination exercée par le signifiant sur le sujet et l’aptitude d’un tel signifiant à organiser une interaction, à la fois rigoureuse et aveugle, entre les sujets. Jeu de dupes et de vérité où cette lettre cachée est sous les yeux de tous (le roi, la reine, le ministre), l’art de Dupin étant de savoir y faire avec le signifiant. Lacan le compare au loto, où le désordre et l’inorganisation des éléments mêlés se conjuguent à une « organisation de structure », à « l’ordre le plus indestructible » (RRDL, E, 658).

C’est ce qui justifie de « marier » Saussure et Freud, ces contemporains qui semblent s’être soigneusement ignorés18. Mariage de circonstance, ne l’oublions pas, destiné à penser la logique du désir comme inconsciente — union invraisemblable que l’exigence psychanalytique rend nécessaire : « Un psychanalyste doit aisément s’y introduire à la distinction fondamentale du signifiant et du signifié, et commencer à s’exercer avec les deux réseaux qu’ils organisent de relations qui ne se recouvrent pas » (CF, E, 414).

La théorie du signifiant est le corrélat de l’idée qu’« il n’y a pas de métalangage ». Autrement dit, le langage ne trouve pas sa clé dans quelque extériorité. Il génère sa propre vérité.

C’est d’ores et déjà la nécessité de la prise en compte des psychoses qui exige de reconnaître « le rôle médiateur primordial du signifiant » (S III, 2 mai 1956). Corrélativement se dégage « la signification du phallus », soit sa fonction de « signifiant fondamental ». Dès l’origine de sa théorie du signifiant, Lacan en souligne le rapport à la castration. Lacan affirme donc logiquement que « le phallus est un signifiant » (SP, E, 690). C’est « le signifiant privilégié de cette marque où la part du logos se conjoint à l’avènement du désir » (E, 692). Le phallus est « le signe où le logos marque la vie de son empreinte » (PVF, AE, 171). En d’autres termes : « Le phallus a la fonction de manque à être que détermine dans le sujet sa relation au signifiant » (STS, 710). Ce faisant, il dépasse la conception du phallus comme « objet partiel » et distingue de phi — l’aspect imaginaire — le phallus signifiant noté PHI. L’homme « parle » donc autour du phallus. Il en est arrivé à suggérer que l’origine du langage serait liée à l’expérience de la détumescence — l’homme devenant « parlêtre » de s’être heurté à l’énigme de la jouissance phallique.

3. Logique du signifiant et rhétorique de l’inconscient

Le recours à la théorie du signifiant permet de substituer à la représentation « physicaliste » freudienne une représentation « linguistique », sauf à préciser qu’il ne s’agit, ici et là, que de penser les processus inconscients qui sous-tendent le sujet.

Les conséquences en chaîne en deviennent alors lisibles.

En premier lieu, les « formations de l’inconscient » se laissent déchiffrer selon la logique du langage. C’est ce qui permet de faire du désir plus que l’objet de l’interprétation, soit son principe opérateur. Rêve, symptôme, mot d’esprit se montrent des processus de métaphore et de métonymie, dont Freud prend acte comme « condensation » et « déplacement ». C’est Jakobson19 que Lacan mobilise pour penser l’axe métaphorique (de substitution) et l’axe métonymique (de combinaison) — ce qui dégage une rhétorique de l’inconscient (S III, 2 et 9 mai 1956). L’analyse réitérée de l’exemple de la « gerbe de Booz » empruntée à Hugo illustre que, « dans l’élaboration des effets du langage », « on peut… construire une poétique qui ne doit rien à l’esprit du poète, non plus qu’à son incarnation » (S V, E, 860). C’est cette surdétermination qui articule signifiant et symbolique(infra, p. 50).

En second lieu, cela impose une mutation de la conception du sujet (infra, p. 79). Si la théorie du signifiant a été posée dans les années 1950, un nouveau souffle apparaît au début des années 1960 avec la définition du sujet comme signifiant représenté pour un autre signifiant (dont nous prendrons la mesure infra, p. 79-81). Le sujet s’avère ainsi divisé par le signifiant. Un signifiant donné (S1) est ce qui représente ce sujet divisé pour un autre signifiant (S2). À la différence du signe qui « représente quelque chose pour quelqu’un », un signifiant « représente un sujet pour un autre signifiant » (S IX, 6 décembre 1961) : il n’y en a pas d’autre définition, note Lacan.

On peut dire que l’on passe ici d’une référence linguistique à une mathématisation du signifiant — qui ouvrira la voie du discours avec numérotation du signifiant (S1, S2). Bref, « l’inconscient relève du logique pur, c’est-à-dire du signifiant », comme l’indique la quatrième de couverture des Écrits. Cela va ensuite en rendre possible l’usage dans la théorie des discours au début des années 1970 (infra, p. 70, 111).

***

« La Verdichtung, condensation, c’est la structure de surimposition des signifiants où prend son champ la métaphore… La Verschiebung ou déplacement, c’est… ce virement de la signification que la métonymie démontre » (ILI, E, 511). Métaphore et métonymie lacaniennes semblent donc assimilées avec la condensation et le déplacement freudiens… Sauf à entendre la mise au point, tardive, il est vrai, de Lacan : « Je ne métaphorise pas la métaphore, ni ne métonymise la métonymie pour dire qu’elles équivalent à la condensation et au virement dans l’inconscient. Mais je me déplace avec le déplacement du réel dans le symbolique, et je me condense pour faire poids de mes symboles dans le réel, comme il convient à suivre l’inconscient à la trace » (RAD, AE, 420). Corrélativement, le signifiant prend la place du « représentant-représentation » de la pulsion, ce qui implique un déplacement de la fonction de représentance, de la métapsychologie freudienne à la théorie lacanienne du signifiant. Cela n’annule nullement la référence à la pulsion (voir infra, p. 74), mais en redéfinit l’économie eu égard au registre du signifiant.

4. De l’instance de la lettre à la « dit-mension »

« Il faut prendre le désir à la lettre » (DC, E, 620) : cet adage engage dans une dimension différente du signifiant et complémentaire. « Il y a bien une instance de la lettre dans l’inconscient », comme l’annonce l’écrit éponyme.

Au sens propre, la lettre désigne à la fois la missive et la matérialité typographique. C’est « ce support matériel que le discours concret emprunte au langage » (ILI, E, 495). Mais dire qu’il y a une « instance de la lettre », c’est souligner que la lettre est là d’emblée, et non comme effet de la transcription.

Si La Lettre volée(1953) introduisait les Écrits, il est juste que Lituraterre (1971) introduise les Autres écrits : Lacan théorise la lettre aux deux bouts de son trajet. Dans ce dernier texte, Lacan réalise une double opération : d’une part, récuser l’idée d’une originarité de l’écriture — accréditée par la « grammatologie » derridienne et ses variantes20 — en réaffirmant le primat du signifiant, d’autre part resituer l’originarité de la lettre comme instance. « Pas question d’accréditer une “primarité” de la lettre au regard du signifiant mais, entre la jouissance et le savoir, la lettre ferait le littoral… » (S XVIII, 12 mai 1971 ; LIT, AE, 14).

Lacan introduit dans L’Etourdit la « dit-mension ». Façon de réaffirmer que l’énoncé (le « dit ») renvoie à l’Autre comme lieu de langage (infra, p. 63). Cela suppose le dire du sujet, sans que le sujet puisse être considéré comme l’auteur de son dit. Il s’agit de « dire ce qu’il y a ». Du coup, imaginaire, symbolique et réel apparaissent comme « dit-mansions » — cette orthographe suggérant la domiciliation dans le dire et le langage comme « habitat » (cf. l’anglais mansion = « maison »).

Il est remarquable que s’il n’y a pas d’instance de la lettre chez Freud, il repère bien cette notion d’une « écriture des images » (Bilderschrift). Il la formule explicitement à propos de l’oubli des noms propres : l’examen de l’exemple Signorelli ne révèle-t-il pas que l’oubli ne se réfère ni au « sens » ni à la « délimitation acoustique des syllabes », mais à la liaison nominale ? (Psychopathologie de la vie quotidienne, chap. i, GW, IV, 10). La métaphore du rébus appliquée ici, comme au rêve, est révélatrice : celui-ci est un mode d’expression combiné de lettres et de dessins. Bref, les formations inconscientes traduisent un effet « hiéroglyphique ». Lacan n’aura qu’à promouvoir l’analogie en homologie, non sans mutation épistémique.

5. De la « linguisterie » à « lalangue » : le « motérialisme »

De tout ce parcours, ressort que, loin de faire de la psychanalyse une annexe de la linguistique, Lacan en dégage l’unicité. Pour se démarquer d’un tel dévoiement, Lacan parle de sa « linguisterie » (S XX, 19 décembre 1972), sur laquelle il semble ironiser (RSI, 1975) en une sorte d’« autocritique » rétrospective.

Un premier temps consiste à souligner le caractère de pléonasme de l’aphorisme d’origine : « Il est structuré comme un langage : ce qui est pléonasme nécessité pour me faire entendre, puisque langage est la structure » (Petit Discours à l’ORTF, 2 décembre 1966, in AE, 223). Cette espèce d’autocritique s’appuie sur un constat : « Il y a quelque chose dans le langage de trop général, de trop logique » (Conférences et entretiens, Scilicet, 6/7, p. 47). Cette évolution est marquée par l’apparition de ce néologisme « lalangue », proposé le 4 novembre 1971 (in Le Savoir du psychanalyste) et détaillé dans la Conférence à Genève sur le symptôme. En d’autres termes : « Le langage est ce qu’on essaye de savoir concernant la fonction de lalangue. » L’inconscient est « un savoir-faire avec lalangue » et le langage est « une élucubration du savoir sur lalangue » (S XX, 26 juin 1973). Lacan persiste et signe, mais infléchit la portée de son apophtegme fondateur : « L’inconscient, en tant qu’ici je le supporte de son déchiffrage, ne peut que se structurer comme un langage, un langage toujours hypothétique au regard de ce qui le soutient, à savoir lalangue » (souligné par nous).

Le néologisme « lalangue », qui agglomère l’article défini et le substantif, est destiné à inscrire plus intimement l’inconscient dans l’ordre langagier. À la limite, il n’est plus question du concept « l’inconscient » (das Unbewusste), mais de ce fait primitif que l’on peut écrire homophoniquement l’« une bévue », dans le registre de la version française de « lalangue »… Dans « lalangue », on peut entendre « lallation », soit ces émissions vocales des nourrissons qui manifestent la prise première dans la langue si bien dite « maternelle » : il s’agit de la réalité phonologique primitive par laquelle se forge la jouissance (comme « j’ouïs sens »).

« Lalangue » se manifeste d’abord par l’homophonie, c’est-à-dire la possibilité — qui va jusqu’au calembour — de faire jouer la matérialité phonématique : « C’est dans ce motérialisme que réside la prise de l’inconscient » (Conférence à Genève sur le symptôme, Le Bloc-Notes de la psychanalyse, no 5, 1985, p. 12).

6. Du « parlêtre » aux « discours »

Lacan forge la notion de « parlêtre ». De même que « lalangue » radicalise l’idée de l’inconscient-langage, de même le « parlêtre » radicalise le distinguo d’une « parole vraie » ou « vide », marquée encore d’un sceau d’authenticité (supra, p. 38 et infra, p. 96). L’être même de l’homme est dans la parole. Tel est le « parlêtre » qu’il « prend être de la parole » (… Ou pire, compte rendu, AE, 549). Ce mot-valise est destiné à souligner qu’il n’est ni essence ni existence, qu’il est donc pris dans la seule référence à son énonciation — ce qui donne une nouvelle résonance aux énoncés « il n’y a pas d’Autre de l’Autre » ni de « métalangage » (supra, p. 41).

Corrélativement, Lacan introduit au début des années 1970 l’instance du discours. Façon de donner sa version de ce que Foucault appelait l’« ordre du discours », en le corrélant à ce qui fait lien social entre les « parlêtres ». On en retiendra ici, en attendant de les définir, que les éléments en sont : S1, le signifiant-maître, S2 le second signifiant identifié au « savoir », S/, le sujet barré (infra, p. 81 sq.) et l’objet a (infra, p. 70 sq.) et qu’il s’agit de modes de production inconscients. Ainsi apparaissent quatre figures de discours : discours du maître, discours de l’hystérique, discours analytique et discours universitaire (infra, chap. x, p. 111). Cela atteste la productivité sociale du signifiant, son impact collectif et sa prise dans la jouissance sociale.

7. Le langage, condition de l’inconscient

L’ensemble de cette insistance sur cette fonction qu’il est important de sérier — langage, signifiant, parole vraie, instance de la lettre, lalangue, parlêtre, discours — a pour enjeu majeur de dégager la dimension fondamentale de l’inconscient. Ainsi se confirme que « le langage est la condition de l’inconscient » et, corrélativement, que « l’inconscient est la condition de la linguistique » (RAD, AE, 406). Le modèle de la communication est radicalement inapte à rendre compte de cet enracinement du sujet dans la langue. On retrouvera cette absoluité du signifiant dans la formule « Y’a d’l’Un » (infra, p. 113-114). Cela trouvera son écho dans la fonction de l’Autre : le parlêtre est pris dans une relation, au-delà du « petit autre », à l’Autre — ce qui ouvre la dimension du malentendu qui, dès lors, n’est pas accident de parcours, mais fait de structure.

On peut situer là le second déplacement de la pensée-Lacan : de la théorie pulsionnelle à la théorie du signifiant. Lacan rompt avec tout réalisme de la « pulsion », en tant qu’elle pourrait accréditer peu ou prou un fait (psycho)biologique — étant avéré que Freud vide le concept de cette connotation. Comme il l’annonçait dès 1950 au Ier congrès mondial de psychiatrie : « Le langage détermine la psychologie plus que la psychologie ne l’explique » (AE, 128). C’est pour éviter toute « superstition » de ce genre qu’il déplace la question du côté du signifiant.


17 F. de Saussure, Cours de linguistique générale, Payot, 1972.

18 P.-L. Assoun, Introduction à la métapsychologie freudienne, chap. iv, p. 78-80.

19 R. Jakobson, « Two aspects of language and two types of aphasia disturbances », in Fundamentals of Language, La Haye, Mouton, 1956. Voir aussi E. Benveniste, « Remarques sur la fonction du langage dans la découverte freudienne », in Éléments de linguistique générale, Gallimard, 1966.

20 J. Derrida, L’écriture et la différence, De la grammatologie, Éditions de Minuit, 1967.