Réalité psychique

= D. : psychische Realität. – En. : psychical reality. – Es. : realidad psiquica. – I. : realtà psichica. – P. : realidade psiquica.

● Terme souvent utilisé par Freud pour désigner ce qui, dans le psychisme du sujet, présente une cohérence et une résistance comparables à celles de la réalité matérielle ; il s’agit fondamentalement du désir inconscient et des fantasmes connexes.

◼ Quand Freud parle de réalité psychique, ce n’est pas simplement pour désigner le champ de la psychologie conçu comme ayant son ordre de réalité propre et susceptible d’une investigation scientifique, mais ce qui, pour le sujet, prend, dans son psychisme, valeur de réalité.

Dans l’histoire de la psychanalyse, l’idée de réalité psychique se dégage corrélativement à l’abandon, ou du moins à la limitation, de la théorie de la séduction* et du rôle pathogène des traumatismes infantiles réels. Des fantasmes, même s’ils ne sont pas fondés sur des événements réels, ont pour le sujet la même valeur pathogène que Freud attribuait d’abord aux « réminiscences » : « Les fantasmes possèdent une réalité psychique opposée à la réalité matérielle […] ; dans le monde des névroses c’est la réalité psychique qui joue le rôle dominant » (1 a).

Il existe bien un problème théorique du rapport entre le fantasme et les événements qui ont pu lui fournir un support (voir : Fantasme), mais, indique Freud, « … il ne nous a pas encore été donné de constater une différence quant aux effets, selon que les événements de la vie infantile sont un produit du fantasme ou de la réalité » (1 b). Aussi bien la cure psychanalytique s’engage-t-elle sur le présupposé que les symptômes névrotiques sont fondés pour le moins sur une réalité psychique et qu’en ce sens le névrosé « … doit avoir, en quelque façon, raison » (2). A plusieurs reprises, Freud a insisté sur l’idée que les affects apparemment les moins motivés, par exemple le sentiment de culpabilité dans la névrose obsessionnelle, sont pleinement justifiés, en tant qu’ils reposent sur des réalités psychiques.

D’une façon générale, la névrose, et a fortiori la psychose, se caractérisent par la prédominance de la réalité psychique dans la vie du sujet.

L’idée de réalité psychique est liée à l’hypothèse freudienne touchant les processus inconscients ; non seulement ceux-ci ne tiennent pas compte de la réalité extérieure, mais ils la remplacent par une réalité psychique (3). Employée dans son acception la plus rigoureuse, l’expression « réalité psychique » désignerait le désir inconscient et le fantasme qui lui est lié. Faut-il, se demande Freud à propos de l’analyse du rêve, reconnaître une réalité aux désirs inconscients ? « Bien entendu, on ne peut l’admettre en ce qui concerne toutes les pensées de transition et de liaison. Lorsqu’on se trouve en présence des désirs inconscients ramenés à leur expression la dernière et la plus vraie, on est bien forcé de dire que la réalité psychique est une forme d’existence particulière qu’il ne faut pas confondre avec la réalité matérielle » (4, α).

▲ (α) Sur l’historique et la problématique du concept de « réalité psychique », nous nous permettons de renvoyer le lecteur à Laplanche (J.) et Pontalis (J.-B.), Fantasme originaire, fantasmes des origines, origine du fantasme, in Les temps modernes, avril 1964, n° 215.

(1) Freud (S.). Vorlesungen zur Einführung in die Psychoanalyse, 1916-17. – a) G.W., XI, 383 ; S.E., XVI, 368 ; Fr., 396. – b) G.W., XI, 385 ; S.E., XVI, 370 ; Fr., 398.

(2) Freud (S.). Trauer und Melancholie, 1915. G.W., X, 432 ; S.E., XIV, 246 ; Fr., 196.

(3) Cf. Freud (S.). Das Unbewusste, 1915. G.W., X, 286 ; S.E., XIV, 187 ; Fr., 131.

(4) Freud (S.). Die Traumdeulung, 1900. G.W., II-III, 625 ; S.E., V, 620 ; Fr., 504.