Représentation-but

= D. : Zielvorstellung. – En. : purposive idea. – Es. : representación-meta. – I. : rappresentazione finalizzata. – P. : representação-meta.

● Terme forgé par Freud pour rendre compte de ce qui oriente le cours des pensées aussi bien conscientes que préconscientes et inconscientes : il existe à chacun de ces niveaux une finalité assurant entre les pensées un enchaînement qui n’est pas seulement mécanique, mais déterminé par certaines représentations privilégiées qui exercent une véritable attraction sur les autres représentations (par exemple, tâche à accomplir dans le cas de pensées conscientes, fantasme inconscient dans les cas où le sujet se soumet à la règle de libre association).

◼ Le terme de représentation-but est utilisé par Freud particulièrement dans ses premiers écrits métapsychologiques : Projet de psychologie scientifique (Entwurf einer Psychologie, 1895) et chapitre VII de L’interprétation du rêve (Die Traumdeutung, 1900), où il figure à plusieurs reprises. Il met en évidence ce qu’il y a d’original dans la conception freudienne du déterminisme psychique : le cours des pensées n’est jamais indéterminé, c’est-à-dire libre de toute loi, et, davantage, les lois qui le régissent ne sont pas les lois purement mécaniques qu’a dégagées la doctrine associationniste, selon laquelle la succession des associations peut toujours se ramener à la contiguïté et à la ressemblance sans qu’il y ait lieu de lui reconnaître un sens plus profond. « Chaque fois qu’un élément psychique est lié à un autre par une association déconcertante et superficielle, il existe aussi une liaison correcte et profonde entre eux, liaison que dissimule la résistance de la censure » (1).

Le terme de représentation-but signale que pour Freud les associations obéissent à une certaine finalité. Finalité manifeste dans le cas d’une pensée attentive, discriminative, où la sélection est assurée par la représentation du but poursuivi. Finalité latente et découverte par la psychanalyse là où les associations semblent livrées à leur libre cours (voir : Libre association).

Pourquoi Freud parle-t-il de représentation-but et non pas seulement de but ou finalité ? la question se pose surtout pour la finalité inconsciente. On pourrait y répondre en disant que les représentations en question ne sont autre chose que les fantasmes inconscients. Une telle interprétation se justifie par référence aux premiers modèles que Freud donne du fonctionnement de la pensée : celle-ci, y compris l’exploration qui caractérise le processus secondaire, n’est possible qu’en raison du fait que le but, ou la représentation-but, reste investi, exerce une attraction qui rend plus perméables, mieux « frayées » toutes les voies se rapprochant de lui. Ce but, c’est la « représentation de désir » (Wunschvorstellung) qui provient de l’expérience de satisfaction* (2).

En traduisant Zielvorstellung par « représentation-but » et non par « représentation de but », nous pensons être fidèles à l’esprit de Freud : les représentations ici en cause ne renvoient pas tant de façon intentionnelle à des buts qu’elles ne sont elles-mêmes des éléments inducteurs capables d’organiser, d’orienter le cours des associations. L’équivalent anglais proposé de purposive idea concorde avec notre interprétation.

(1) Freud (S.). Die Traumdeulung, 1900. G.W., II-III, 535 ; S.E., V, 530 ; Fr., 436.

(2) Cf. Freud (S.). Aus den Anfängen der Psychoanalyse 1887-1902. Ail. 411-6 ; Angl., 389-94 ; Fr., 345-9.