Sur la santé mentale
Une personnalité bien intégrée est le fondement de la santé mentale. Je commencerai en énumérant quelques-uns des éléments d’une personnalité intégrée : maturité émotionnelle, force de caractère, capacité à traiter des émotions conflictuelles, un équilibre entre vie interne et adaptation à la réalité, ainsi qu’un assemblage réussi en un tout des différentes parties de la personnalité.
Dans une certaine mesure des fantasmes et des désirs infantiles persistent même chez une personne mure émotionnellement. Si les fantasmes et les désirs ont été librement éprouvés et élaborés avec succès — tout d’abord dans le jeu de l’enfant — ils sont une source d’intérêts et d’activités et de cette façon ils enrichissent la personnalité. Mais si les griefs à propos des désirs inaccomplis sont demeurés trop puissants et si leur élaboration est donc entravée, les relations personnelles et le plaisir provenant de sources variées sont perturbés, il devient difficile d’accepter les substituts qui seraient plus appropriés à des stades ultérieurs du développement, et le sens de la réalité est affaibli.
Même si le développement est satisfaisant et conduit au plaisir provenant de sources variées, un certain sentiment de deuil pour des plaisirs irrémédiablement perdus et des possibilités inaccomplies peut encore être découvert dans les couches plus profondes de l’esprit. Alors que le regret que l’enfance et la jeunesse ne reviendront jamais est souvent consciemment éprouvé par les gens proches de la cinquantaine, en psychanalyse nous découvrons que même la petite enfance et ses plaisirs sont encore inconsciemment l’objet de désirs intensément nostalgiques. La maturité émotionnelle signifie que ces sentiments de perte peuvent jusqu’à un certain point être contrebalancés par la capacité d’accepter des substituts, et les fantasmes infantiles ne perturbent pas la vie émotionnelle adulte. Être capable de jouir des plaisirs qui sont disponibles est lié, à tout âge, au fait d’être relativement dégagé d’envie et de griefs. Donc, une façon de pouvoir trouver le contentement à un stade plus tardif dans la vie est de jouir de manière vicariante des plaisirs des jeunes, en particulier de nos enfants et petits-enfants. Une autre source de gratification, même avant le grand âge, est la richesse des souvenirs qui maintiennent vivant le passé.
La force de caractère est basée sur quelques processus très précoces. La première et fondamentale relation dans laquelle l’enfant éprouve des sentiments d’amour aussi bien que de haine est la relation à la mère. Ce n’est pas seulement qu’elle figure comme un objet externe, mais le nourrisson prend aussi en lui (introjecte, selon Freud) des aspects de sa personnalité. Si les bons aspects de la mère introjectée sont ressentis comme dominant les aspects frustrants — cette mère intériorisée devient un fondement pour la force de caractère, parce que le moi peut développer ses potentialités sur cette base. En effet, si elle peut être ressentie comme guidant et protégeant mais ne dominant pas, l’identification à elle rend possible la paix intérieure. Le succès de cette première relation s’étend aux relations avec d’autres membres de la famille, en premier lieu au père, et se traduit dans les attitudes adultes, à la fois dans le cercle de famille et à l’égard des gens en général.
L’intériorisation des bons parents et l’identification à eux est à la base de la loyauté envers les personnes et du loyalisme envers les causes ainsi que de la capacité à faire des sacrifices pour ses convictions. La loyauté envers ce qui est aimé ou ressenti comme juste implique que les impulsions hostiles liées aux angoisses (qui ne sont jamais entièrement éliminées) sont tournées vers les objets qui mettent en danger ce qui est ressenti comme bon. Ce processus ne réussit jamais complètement et l’angoisse demeure que la destructivité puisse aussi mettre en danger le bon objet intérioré aussi bien que l’objet externe.
Beaucoup de personnes apparemment bien équilibrées n’ont pas de force de caractère. Elles se rendent la vie facile en évitant les conflits intérieurs et externes. Par voie de conséquence, elles aspirent à ce qui est heureux ou expédient et elles ne peuvent pas acquérir des convictions profondément enracinées.
Toutefois, la force de caractère, si elle n’est pas mitigée par de la considération pour les autres, n’est pas caractéristique d’une personnalité équilibrée. La compréhension des autres, la compassion, la sympathie et la tolérance enrichissent notre expérience du monde et nous font nous sentir plus en sécurité en nous-mêmes et moins solitaires.
L’équilibre dépend d’un certain insight dans la diversité de nos impulsions et de nos sentiments contradictoires ainsi que de la capacité d’accepter ces conflits intérieurs. Un aspect de l’équilibre est l’adaptation au monde externe — une adaptation qui n’empiète pas sur la liberté de nos émotions et pensées propres. Ceci implique une interaction : la vie intérieure influence les attitudes à l’égard de la réalité externe et elle est à son tour influencée par l’ajustement au monde de la réalité. Déjà le nourrisson intériorise ses premières expériences et les personnes qui l’entourent et ces intériorisations influencent sa vie intérieure. Si la bonté de l’objet prédomine dans ces processus et devient partie intégrante de la personnalité, son attitude à l’égard des expériences en provenance du monde externe est à son tour favorablement influencée. Ce n’est pas nécessairement un monde parfait celui qu’un tel nourrisson perçoit, mais c’est certainement un monde qui en vaut la peine parce que sa situation interne est une situation plus heureuse. Une interaction réussie de cette sorte contribue à l’équilibre et à une bonne relation au monde externe.
L’équilibre ne signifie pas l’évitement du conflit ; il implique la force de vivre des émotions douloureuses et d’y faire face. Si les émotions douloureuses sont clivées à l’excès, ceci restreint la personnalité et conduit à des inhibitions de diverses sortes. En particulier le refoulement de la vie fantasmatique a de fortes répercussions sur le développement, il aboutit en effet à l’inhibition des talents et de l’intellect ; il fait aussi obstacle à la reconnaissance des réalisations des autres et au plaisir qui pourrait en être tiré. Le manque de plaisir dans le travail et les loisirs ainsi que dans les contacts avec les autres rend stérile la personnalité et suscite des angoisses et de l’insatisfaction. De telles angoisses, de nature à la fois persécutive et dépressive jettent — si elles sont excessives — les bases de la maladie mentale.
Le fait que certaines personnes traversent la vie plutôt en douceur, particulièrement si elles réussissent, n’exclut pas pour elles le risque de maladie mentale si elles n’ont jamais accepté leurs conflits plus profonds. Ces conflits non résolus peuvent se faire sentir en particulier à certaines phases critiques, telles que l’adolescence, la cinquantaine ou le grand âge, alors que les personnes qui ont une bonne santé mentale sont beaucoup plus susceptibles de rester équilibrées à n’importe quel stade de la vie et sont moins dépendantes du succès externe.
Il est évident, d’après ma description, que la santé mentale n’est pas compatible avec le caractère superficiel. Car le caractère superficiel est lié au déni du conflit intérieur et des difficultés externes. Il y a recours excessif au déni parce que le moi n’est pas assez fort pour faire face à la douleur. Bien que dans certaines situations le déni semble faire partie d’une personnalité normale, s’il est prédominant, il conduit au manque de profondeur parce qu’il empêche l’insight dans sa propre vie intérieure et donc une réelle compréhension des autres. Une des satisfactions perdues est la capacité de donner et de prendre — de faire l’expérience de la gratitude et de la générosité.
L’insécurité qui est à la base d’un déni marqué est aussi une cause de manque de confiance en nous-mêmes parce que, inconsciemment, un insight insuffisant aboutit à ce que des parties de la personnalité demeurent inconnues. Pour échapper à cette insécurité il y a le mouvement de se tourner vers le monde externe ; mais, si le malheur ou l’échec dans les réalisations et les relations aux autres devaient survenir, de tels individus sont incapables de les traiter.
Par contraste, une personne qui peut éprouver profondément la peine quand elle survient est également capable de partager le chagrin et le malheur des autres. En même temps, ne pas être submergé par le chagrin ou par la tristesse des autres et maintenir un équilibre est partie intégrante de la santé mentale. La première expérience où l’on compatit à la peine des autres est en relation avec ceux qui sont les plus proches du jeune enfant — les parents et les frères et sœurs. À l’âge adulte, des parents qui peuvent comprendre les conflits de leurs enfants et partager leur tristesse occasionnelle ont un insight plus profond dans les complexités de la vie intérieure de l’enfant. Ceci signifie qu’ils sont aussi capables de partager pleinement les plaisirs de l’enfant et de tirer du bonheur de ce lien étroit.
Faire effort pour obtenir le succès externe est tout à fait compatible avec la force du caractère si cela ne devient pas le point central sur lequel repose la satisfaction dans la vie. Selon ce que j’ai observé, si cela est l’objectif principal et si les autres attitudes que j’ai mentionnées plus tôt ne sont pas acquises, l’équilibre mental est mal assuré. Les satisfactions externes ne compensent pas le manque de tranquillité d’esprit. Celle-ci ne peut advenir que si les conflits intérieurs sont réduits et donc, que, si la confiance en soi et dans les autres a été établie. Si une telle tranquillité d’esprit fait défaut, l’individu risque de réagir à tout revers externe avec de forts sentiments d’être persécuté et dépossédé.
La description de la santé mentale que j’ai donnée montre sa nature complexe, aux multiples facettes. En effet, ainsi que j’ai essayé de l’indiquer, elle est basée sur une interaction entre les sources fondamentales de la vie mentale — les motions d’amour et de haine — une interaction dans laquelle la capacité d’amour est prédominante.
Afin d’éclaircir la question de l’origine de la santé mentale, je donnerai un bref aperçu de la vie émotionnelle du nourrisson et du jeune enfant. La bonne relation du tout-petit à la mère et à la nourriture, l’amour et les soins qu’elle prodigue, est la base d’un développement émotionnel stable. Toutefois, même à ce stade précoce, et même dans des conditions très favorables, le conflit entre amour et haine (ou, pour le dire avec les mots de Freud, entre les motions destructrices et la libido) joue un rôle important dans cette relation. Les frustrations qui dans une certaine mesure sont inévitables, renforcent la haine et l’agressivité. Par frustration je ne veux pas seulement dire que le nourrisson n’est pas toujours nourri lorsqu’il le veut ; nous découvrons en analyse rétrospectivement qu’il y a des désirs inconscients — pas toujours perceptibles dans le comportement du nourrisson — qui se centrent sur la présence continuelle de la mère et sur son amour exclusif. Cela fait partie de la vie émotionnelle du nourrisson qu’il soit avide et qu’il désire plus que ce que même la meilleure situation externe peut réaliser. De concert avec les motions destructrices le nourrisson éprouve aussi des sentiments d’envie qui renforcent son avidité et contrecarrent la possibilité qu’il a de jouir des satisfactions disponibles. Les sentiments destructeurs donnent naissance à la peur des représailles et à la persécution, et c’est la première forme que l’angoisse prend chez le nourrisson.
Cette lutte a pour effet que, dans la mesure où le nourrisson veut préserver les aspects aimés de la bonne mère, interne et externe, il doit continuer à cliver l’amour de la haine et à maintenir ainsi la division de la mère en une bonne et une mauvaise mère. Ceci lui permet de retirer une certaine somme de sécurité de sa relation à la mère aimée et donc de développer sa capacité d’amour. Si le clivage n’est pas trop profond et si l’intégration et la synthèse à un stade ultérieur ne sont pas entravées, c’est une précondition pour une bonne relation à la mère et pour un développement normal.
J’ai mentionné les sentiments persécutifs comme étant la première forme de l’angoisse. Mais des sentiments de nature dépressive aussi sont sporadiquement éprouvés à partir du commencement de la vie. Ils gagnent en force avec la croissance du moi et le sens grandissant de la réalité et ils arrivent au point critique vers la seconde moitié de la première année (position dépressive). À ce stade le nourrisson éprouve plus pleinement l’angoisse dépressive ainsi qu’un sentiment de culpabilité concernant ses motions agressives à l’endroit de sa mère aimée. Bon nombre des problèmes qui se présentent chez les jeunes enfants avec une sévérité variable — tels que le sommeil perturbé, les difficultés pour manger, l’incapacité de se contenter eux-mêmes et les demandes constantes d’attention et de présence de la mère — sont fondamentalement un résultat de ce conflit. À un stade plus tardif un autre résultat accroît les difficultés d’adaptation aux exigences de l’éducation.
De concert avec le sentiment de culpabilité plus développé, un désir de faire réparation est éprouvé, et cette tendance apporte un soulagement au nourrisson parce qu’en faisant plaisir à sa mère il ressent qu’il répare le mal qu’il lui fait dans ses fantasmes agressifs. La capacité — quelque primitive qu’elle soit chez le très jeune enfant — de donner effet à ce besoin pressant forme un des principaux facteurs qui l’aident dans une certaine mesure à surmonter sa dépression et sa culpabilité. S’il ne peut pas ressentir et exprimer son désir de réparation, ce qui voudrait dire que sa capacité d’amour n’est pas assez forte, le nourrisson peut recourir à des processus de clivage accrus. Au bout du compte il peut paraître excessivement bon et soumis. Mais un tel clivage peut détériorer dons et talents parce qu’ils sont souvent refoulés conjointement avec les sentiments douloureux qui sont à la base des conflits de l’enfant. Ainsi, ne pas pouvoir, à l’âge du nourrisson, faire l’expérience de conflits douloureux implique aussi une lourde perte à d’autres égards, tels le développement d’intérêts et la capacité d’apprécier les gens ainsi que d’éprouver des plaisirs de toutes sortes.
En dépit de toutes ces difficultés internes et externes, le jeune enfant trouve normalement le moyen de faire face à ses conflits fondamentaux et ceci lui permet à d’autres moments d’éprouver du plaisir et de la gratitude pour le bonheur reçu. S’il a assez de chance pour avoir des parents compréhensifs, ses problèmes peuvent être diminués, et — d’autre part — une éducation trop stricte ou trop indulgente peut les accroître. La capacité de l’enfant à faire face à ses conflits se prolonge jusqu’à l’adolescence et à l’âge adulte et elle est la base de la santé mentale. La santé mentale est ainsi non seulement un produit de la personnalité mature mais elle vaut en quelque sorte pour chaque stade dans le développement de l’individu.
J’ai mentionné l’importance du cadre de vie de l’enfant, mais ceci n’est qu’un aspect d’une interaction très complexe entre facteurs internes et externes. Par facteurs internes, je veux dire que certains enfants dès le début ont une plus grande capacité d’amour que d’autres, capacité qui est étroitement liée à un moi plus fort, et que leur vie fantasmatique est plus riche et laisse intérêts et dons se développer. Il se peut donc que nous trouvions que des enfants placés dans des circonstances favorables n’acquièrent pas l’équilibre que je suppose être la base de la santé mentale alors que, parfois, des enfants placés dans des conditions défavorables sont à même d’y parvenir.
Certaines attitudes marquantes des stades précoces se maintiennent dans une mesure variable jusque dans la vie adulte. Ce n’est que si elles sont suffisamment modifiées que la santé mentale est possible. Par exemple, il y a un sentiment d’omnipotence chez le nourrisson qui lui fait apparaître ses motions de haine et d’amour comme extrêmement puissantes. Des restes de cette attitude peuvent facilement être observés chez l’adulte aussi, bien que normalement la meilleure adaptation à la réalité diminue le sentiment que ce qui a été désiré a pris effet.
Un autre facteur dans le développement précoce est le déni de ce qui est douloureux, et ici encore nous sommes avertis du fait que dans la vie adulte cette attitude n’a pas entièrement disparu. Le besoin d’idéaliser à la fois le soi et l’objet résulte de la nécessité pour le nourrisson de cliver le bon du mauvais à la fois chez lui-même et chez ses objets. Il y a une corrélation étroite entre le besoin d’idéaliser et l’angoisse persécutive. L’idéalisation à l’effet d’une réassurance et, dans la mesure où ce processus reste opérant chez l’adulte, il sert toujours à contrebalancer les angoisses persécutives. La peur d’ennemis et d’attaques hostiles est mitigée par l’accroissement de la faculté de bonté des autres.
Plus toutes ces attitudes ont été modifiées dans l’enfance et à l’âge adulte, plus l’équilibre mental sera stable. Lorsque le jugement n’est pas troublé par l’angoisse persécutive et l’idéalisation, un point de vue mature est possible.
Les attitudes que j’ai énumérées, puisqu’elles ne sont jamais complètement surmontées, jouent un rôle dans les défenses multiples que le moi utilise afin de combattre l’angoisse. Par exemple, le clivage est une façon de préserver le bon objet et les bonnes motions instinctuelles contre les dangereuses et effrayantes motions destructrices qui créent des objets exerçant des représailles, et ce mécanisme est renforcé chaque fois que l’angoisse est accrue. J’ai également découvert, en analysant de jeunes enfants, avec quelle vigueur ils renforcent l’omnipotence lorsqu’ils sont effrayés. La projection et l’introjection, qui sont des processus fondamentaux, sont d’autres mécanismes qui peuvent être utilisés défensivement. L’enfant a l’impression d’être mauvais et il essaie d’échapper à la culpabilité en attribuant sa propre méchanceté aux autres, ce qui signifie qu’il renforce ses angoisses persécutives. Une façon d’utiliser l’introjection comme défense est de prendre dans le soi les objets dont on espère qu’ils seront une protection contre les mauvais objets. Un corollaire de l’angoisse persécutive est l’idéalisation, car, plus l’angoisse persécutive est grande plus le besoin d’idéaliser est fort. La mère idéalisée devient ainsi une aide contre la mère persécutrice. Un élément de déni est étroitement lié à toutes ces défenses parce que c’est le moyen de faire face à toute situation effrayante ou douloureuse.
Plus le moi se développe, plus les défenses utilisées sont complexes et mieux elles s’ajustent, mais elles sont moins rigides. Lorsque l’insight n’est pas étouffé par les défenses, la santé mentale est possible. Une personne en bonne santé mentalement peut prendre conscience de son besoin de voir toute situation déplaisante sous un jour plus plaisant et peut corriger sa tendance à l’embellir. De cette façon elle est moins exposée à l’expérience douloureuse de l’effondrement de l’idéalisation, les angoisses persécutives et dépressives prenant le dessus, tout comme elle est plus à même de faire face aux expériences douloureuses provenant du monde externe.
Un élément important dans la santé mentale dont je n’ai pas traité jusqu’ici est l’intégration qui trouve expression dans l’assemblage des différentes parties du soi. Le besoin d’intégration provient du sentiment inconscient que des parties du soi sont inconnues, et il y a une sensation d’appauvrissement due au fait que le soi est privé de quelques-unes de ses parties. Le sentiment inconscient que des parties de soi sont inconnues augmente le besoin pressant d’intégration. Le besoin d’intégration, en outre, dérive du savoir inconscient que la haine ne peut être atténuée que par l’amour ; et si les deux sont maintenus séparés, l’atténuation ne peut réussir. Malgré ce besoin pressant, l’intégration implique toujours de la douleur, parce que la haine clivée et ses conséquences, sont extrêmement douloureuses à affronter ; l’incapacité à supporter cette douleur réveille une tendance à cliver les parties menaçantes et perturbantes des motions instinctuelles. Chez une personne normale, malgré ces conflits, une somme considérable d’intégration peut se rencontrer, et lorsque cette intégration est perturbée pour des raisons externes ou internes, une personne normale peut en retrouver le chemin. L’intégration a aussi un effet de tolérance à l’égard de nos propres motions instinctuelles et donc également à l’égard des défauts des autres. Mon expérience m’a montré que l’intégration complète n’existe jamais, mais plus il s’en approche, plus l’individu aura d’insight dans ses angoisses et ses motions instinctuelles, plus son caractère sera fort et plus son équilibre mental sera stable.