Avant-propos

Dans cet essai, je me propose de poursuivre le développement des consi­dérations que j'avais esquissées dans Au-delà du principe du plaisir, en obser­vant à leur égard la même attitude de curiosité bienveillante qui m'avait guidée, ainsi que je l'ai dit, lorsque j'écrivais ce dernier essai. Je reprends donc les mêmes idées, en les attachant à divers faits fournis par l'observation psychanalytique ; et je cherche à tirer de cette association entre les idées et les faits de nouvelles conclusions, sans toutefois recourir à de nouveaux emprunts à la biologie. Il en résulte que je reste ici plus près de la psychanalyse que dans Au-delà. Aussi, cet essai porte-t-il plutôt le caractère d'une synthèse que celui d'une spéculation et semble se poser un but assez élevé. Je me rends cependant compte qu'il ne va pas au-delà de certaines constatations très rudi­mentaires et j'accepte à l'avance le reproche qu'on pourrait m'adresser sur ce point.

Il n'en reste pas moins que je touche ici à des questions qui n'ont pas encore fait l'objet d'une élaboration psychanalytique et que je suis obligé de m'occuper de certaines théories qui ont été formulées par des auteurs non-psychnalystes, ou par des psychanalystes ayant rompu avec la psychanalyse. Tout en étant disposé à toujours reconnaître ce que je dois à d'autres tra­vailleurs, je dois cependant déclarer que, dans ce cas particulier, je ne me sens redevable à personne de quoi que ce soit. Sil est des questions dont la psy­chanalyse ne s'est pas encore occupée, il faut en chercher la cause, non dans un parti-pris ou dans une attitude délibérément négative à l'égard de ces ques­tions, mais dans le fait que le chemin qu'elle avait suivi jusqu'à présent ne l'avait pas encore mise en leur présence. Et aujourd'hui qu'elle est enfin arrivée à ce point, ces questions se présentent à elle sous un aspect qui diffère de celui sous lequel elles se présentent aux autres.