Stade sadique-anal

= D. : sadistisch-anale Stufe (ou Phase). – En. : anal-sadistic stage. – Es. : fase analsádica. – J. : fase sadico-anale. – P. : fase anal-sádica.

● Deuxième stade de l’évolution libidinale, selon Freud, qu’on peut situer approximativement entre deux et quatre ans ; il est caractérisé par une organisation de la libido sous le primat de la zone érogène anale ; la relation d’objet est imprégnée de significations liées à la fonction de défécation (expulsion-rétention) et à la valeur symbolique des fèces. On y voit s’affirmer le sado-masochisme en relation avec le développement de la maîtrise musculaire.

◼ Freud a commencé par relever des traits d’un érotisme anal chez l’adulte et à en décrire le fonctionnement chez l’enfant dans la défécation et la rétention des matières fécales (1).

C’est à partir de l’érotisme anal que va se dégager l’idée d’une organisation prégénitale de la libido. Dans l’article Caractère et érotisme anal (Charakter und Analerotik, 1908) (2), Freud met déjà en relation des traits de caractère persistant chez l’adulte (la triade : ordre, parcimonie, entêtement) avec l’érotisme anal de l’enfant.

Dans La prédisposition à la névrose obsessionnelle (Die Disposition zur Zwangsneurose, 1913), apparaît pour la première fois la notion d’une organisation prégénitale où les pulsions sadique et érotique-anale prédominent ; comme dans le stade génital, il existe un rapport à l’objet extérieur. « Nous voyons la nécessité d’intercaler un autre stade avant la forme finale – stade dans lequel les pulsions partielles sont déjà rassemblées pour le choix d’objet, où l’objet est déjà opposé et étranger à la personne propre mais où le primat des zones génitales n’est pas encore établi » (3).

Dans les remaniements ultérieurs des Trois essais sur la théorie de la sexualité (Drei Abhandlungen zur Sexualtheorie, 1915, 1924), le stade anal apparaît comme une des organisations prégénitales, situées entre les organisations orale et phallique. C’est le premier stade où se constitue une polarité activité – passivité* : Freud fait coïncider l’activité avec le sadisme et la passivité avec l’érotisme anal, et il attribue à chacune des pulsions partielles correspondantes une source distincte : musculature pour la pulsion d’emprise* (Bemächtigungslrieb) et muqueuse anale.

En 1924, K. Abraham a proposé de différencier deux phases au sein du stade sadique-anal en distinguant dans chacune des composantes deux types de comportement opposés par rapport à l’objet (4). Dans la première phase, l’érotisme anal est lié à l’évacuation, la pulsion sadique à la destruction de l’objet ; dans la seconde phase, l’érotisme anal est lié à la rétention, et la pulsion sadique au contrôle possessif. Pour Abraham, l’accession d’une phase à l’autre constitue un progrès décisif vers l’amour d’objet comme l’indiquerait le fait que la ligne de clivage entre régression* névrotiques et psychotiques passe entre ces deux phases.

Comment concevoir la liaison entre le sadisme et l’érotisme anal ? Le sadisme, par nature bipolaire – puisqu’il vise contradictoirement à détruire l’objet et à le maintenir en le maîtrisant – trouverait sa correspondance privilégiée dans le fonctionnement biphasique du sphincter anal (évacuation-rétention) et le contrôle de celui-ci.

Au stade anal, des valeurs symboliques de don et de refus s’attachent à l’activité de la défécation ; Freud a mis en évidence, dans cette perspective, l’équivalence symbolique fèces = cadeau = argent (5).

(1) Cf. Freud (S.). Drei Abhandlungen zur Sexualtheorie, 1905. G.W., V, 86*^ : S.E., VII, 185-7 ; Fr., 79-82.

(2) Cf. Freud (S.). GAV., VII, 203-9 ; S.E., IX, 169-75. t. r aplanciik i : r « t.-h. pontalis

(3) Freud (S.). G.W., VIII, 446-7 ; S.E., XII, 321 ; Fr., in R.F.P., 1929, III, 3, 442.

(4) Cf. Abraham (K.). Versuch einer Entwicklungsgeschichie der Libido auf Grund der Psychoanalyse seelischer Stôrungen, 1924, 258-65.

(5) Cf. Freud (S.). Über Triebumselzungen, insbesondere der Analerotik, 1917. G.W., X, 402-10 ; S.E., XVII, 127-33.